Enseigner la transition écologique : enfin !!

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Remis le 16 février dernier à Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, de la recherche (ESR) et de l’innovation, le rapport JOUZEL appuie sur la nécessité d’engager résolument l’enseignement supérieur dans la transition écologique, d’assurer un socle commun de compétences dans le domaine, d’enseigner la transition écologique auprès des jeunes. Enfin ! Pourrait-on dire. Mais, on y va quand et comment ? devrait-on surtout dire…

Enseigner la transition écologique revient à regarder en face le paradoxe

On ne peut former nos apprenants à la transition écologique sans aborder et dépasser le paradoxe suivant : l’enseignement du management repose sur des principes capitalistes (hyperconsommation, financiarisation de l’économie…) et dans le même temps, il doit intégrer les principes de la transition écologique, laquelle prône sobriété et pensée collective. Cette torsion est plus qu’inconfortable : comment continuer à enseigner les vieux modèles quand la sobriété, le réusage, l’allongement de la durée de vie des produits, voire la décroissance apparaissent comme la seule issue ? C’est le paradoxe auquel sont confrontés les acteurs de l’ESR, en particulier les grandes écoles de management, il faut donc changer de paradigme.

Transition, transformation, traduction écologiques pour tous !

Répondre à ce paradoxe suppose notamment d’embarquer simultanément équipes enseignantes et entreprises/organisations. La transition écologique implique une profonde transformation des modèles pédagogiques et leur traduction en compétences transférables à nos apprenants, futurs cadres et managers. Elle implique aussi des efforts proportionnels des entreprises et organisations : comment donner des clés de compréhension, d’action, de mesures d’impact à nos apprenants s’ils se heurtent aux murs d’une entreprise qui n’évolue pas et à l’impossibilité d’être acteur du changement. La transition écologique appelle un mouvement de transformation systémique, à l’échelle du monde économique et des acteurs de l’ESR et donc des instruments de traduction pour opérer efficacement ces changements.

Transition vers une révolution de l’écosystème apprenant

Pour enseigner la transition écologique, il nous faut sortir du cadre. Celui du vieux monde. Cela suppose une profonde révolution de notre manière d’enseigner et du contenu des curricula, ainsi que la mise en mouvement  de l’écosystème apprenant : co-construire les enseignements avec les apprenants, intégrer l’intergénérationnel et favoriser l’interdisciplinarité. Pour cela, il nous faut de l’audace, voire du courage, comme Pierre Rabhi(1) l’écrivait, « il est urgent de placer l’humain et la nature au cœur de nos préoccupations et l’économie à leur service ».

Pour changer de modèle, nous devons nous appuyer sur les enseignants, les chercheurs, les apprenants, les alumnis, les entreprises, et aller vite. Les instances accréditrices doivent le prendre en compte et redonner à l’enseignement ses lettres de noblesse, parfois relégué au profit d’une course à la publication dont l’impact réel sur les enjeux actuels est à démontrer. Et donc valoriser la recherche à impact. L’interdisciplinarité doit être favorisée et reconnue comme essentielle : décloisonnons enfin et pour de vrai nos disciplines ! Car c’est là que réside l’innovation et les solutions à nos problèmes. La méthodologie des classements doit aussi évoluer : intégrer l’empreinte « transitionnelle » des formations et le type d’emploi occupé, plutôt que privilégier le critère du salaire de sortie, en contradiction totale avec les changements sociologiques profonds chez nos apprenants – cf. le mouvement « Pour un réveil écologique ».

Pour enseigner la transition écologique, il faut former les formateurs

Enfin, il faut se regarder en face. Dans nos grandes écoles, nous savons que seule la transformation des états d’esprit, des pratiques, des modèles de consommation évitera la catastrophe. Mais il faut plus d’audace, changer nos regards et être plus actifs dans la transformation de notre monde. Les enseignements de gestion doivent être profondément remaniés, les enjeux écologiques ne peuvent pas/plus être cantonnés à des cours spécifiques. Chaque enseignement (marketing, finance, RH, économie, stratégie, supply chain…) doit intégrer les impacts de la transition écologique. Cela passe par la recherche et par la formation des formateurs. De telles approches commencent à émerger, comme à Excelia, avec le Sustainability Mindset et un plan de formation pour l’ensemble de notre faculté.

Notre responsabilité est immense. Il s’agit de (re)donner de l’espérance à nos jeunes générations en leur montrant que l’on peut agir, qu’ils le peuvent, qu’ils en ont le pouvoir et qu’on va leur donner les moyens de l’exercer. Il est de notre devoir de leur montrer qu’une autre réalité est possible et qu’ils se projettent dans un futur souriant.

1 – La part du colibri: l’espèce humaine face à son devenir. p.25.

Pr.Valérie FERNANDES

Doyenne du corps professoral d’Excelia

Professeur HDR, Pôle Supply, Purchasing & Project Management

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