Posture ou rupture ? L’innovation passerait-elle par un changement de l’enseignement ?

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Crédits Unsplash / Matt Ridley

Favoriser l’apprentissage des étudiants ne requiert pas forcément des innovations de rupture, des moyens techniques ou financiers importants. Il nécessite une connaissance fine de leurs attentes et besoins et un changement de posture des acteurs de l’enseignement supérieur. Peut-on encore vraiment innover dans l’enseignement supérieur ? Étonnante question, mais : que signifie VRAIMENT innover ? Peut-on NE PAS innover ?

Des innovations techniques, mais sont-elles pédagogiques ?

L’innovation pédagogique, souvent limitée à l’innovation technologique, a introduit depuis l’essor des NTIC (nouvelles technologies de l’information et de la communication), une réflexion techno-pédagogique à ce sujet. Est-elle suivie d’une amélioration de la qualité des apprentissages ? A ce titre, l’UNESCO souligne des inégalités d’accès aux technologies dans l’éducation et la nécessité d’avoir des données sur leur valeur ajoutée. Les nouvelles technologies sont des outils et techniques d’animation. Elles ne peuvent se résumer à faire des cours en distanciel, sur une plateforme ou dans le metavers. Une innovation pédagogique doit conduire à de nouvelles formes d’attention, des changements de capacité de concentration et d’implication pour permettre aux étudiants de développer des connaissances et compétences.

Le changement d’enseignement propose des innovations pour s’adapter

Innover est une injonction forte, peut-être encore plus pour les jeunes générations, baignées depuis la naissance dans la fast fashion, l’obsolescence programmée et le sentiment de pouvoir tout swiper ou scroller. Mais l’étudiant a-t-il si profondément changé ? A priori non sur les plans physiologique et psychologique, mais oui sur celui des valeurs, des engagements, du sens de la vie, du travail et de la formation. Dès lors, une compréhension fine des étudiants sur les plans économique, social, culturel est nécessaire pour mieux s’adapter à leurs besoins, attentes et aspirations, prévenir le décrochage et favoriser l’engagement dans leur apprentissage.

Des innovations de posture…

Innovation de l’étudiant

Notre société prône l’immédiateté et l’individualisme, à l’opposé de la notion d’apprentissage. Ce n’est pas un produit de consommation livré en 5 minutes et obtenu en 2 clics. Cela implique efforts, difficultés et échecs (Yan et al., 2016 On the Difficulty of Mending Metacognitive Illusions (apa.org)) et interactions entre pairs et professeurs. “On apprend toujours seul mais jamais sans les autres” (P. Carré – L’apprenance : vers un nouveau rapport au savoir – Persée (persee.fr)) Comment aider l’étudiant à devenir actif et acteur ? À comprendre et valoriser son statut d’apprenant ? Comment faire avec 20/200 étudiants ? Peering, co-construction avec le professeur, favoriser le plaisir d’apprendre, l’engagement, la curiosité… pour créer un espace propice à l’apprentissage sont à développer.

Un nouvel enseignement par le professeur

L’apprentissage implique les dimensions émotionnelle, physique et cognitive de l’étudiant. Ces deux premières dimensions sont régulièrement omises. Alors que le professeur, par son style motivationnel, est un antécédent de la motivation intrinsèque (Escriva-boulley_Tessier_&_Sarrazin-2018-Engagement et motivation.pdf (ac-grenoble.fr)), le système éducatif français est organisé de manière descendante avec un enseignant sachant qui transmet un savoir à l’étudiant moins sachant. Pourquoi ne pas changer de posture en passant d’enseignant en posture haute à accompagnant, gardien d’un processus et d’un cadre propice aux apprentissages, et générant une relation de confiance essentielle ?

De l’enseignement supérieur change et innove

Dans l’enseignement supérieur, les enseignants sont également chercheurs. Mais, parce que plus facilement objectivables, ils sont principalement motivés et récompensés pour et par la recherche, par la création de connaissances au détriment du premier pilier de leur profession : l’enseignement et la formation. Il paraît nécessaire de changer les évaluations dans l’enseignement supérieur, de repenser leurs fonctions, les incitations et leur utilité sociale. Quelles sont leurs contributions au développement des connaissances des étudiants ? Quelle est la légitimité et le bénéfice pour le professeur pédagogiquement innovant ?

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Par Benoît Lorel, Directeur des programmes et Coralie Damay, Enseignante-Chercheuse & Directrice de l’Action Learning Lab, ISC Paris

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