StopCovid : les questions que vous vous posez

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A partir du 2 juin 2020, le gouvernement français mettra en place une application mobile qui signalera à ses utilisateurs un contact éventuel avec une personne contaminée par le Covid-19. Son nom ? StopCovid. Entre fake news et problèmes éthiques, nous avons de quoi nous poser des questions. Le Docteur Ouail Oulmakki, chercheur à l’Institut de recherche MOBIS de NEOMA Business School, nous apporte quelques éléments de réponse.

 

Beaucoup de spécialistes de l’informatique mettent en garde contre les dangers de StopCovid (collecte de données…) Pensez-vous également que le respect de la vie privée et des libertés individuelles sera atteint ? Big brother will watching us ?

Effectivement, c’est un risque à prendre en considération. Si les utilisateurs ne seront pas identifiés par leur véritable identité, ils le seront tout de même par un identifiant. Il ne s’agira donc pas de données anonymisées, mais pseudonymisées. L’utilisation du Bluetooth devrait cependant permettre de ne pas pouvoir pister précisément les utilisateurs car il ne permet pas de savoir où l’on se trouve, ni de remonter un historique des déplacements. Il ne détecte que les smartphones à proximité. Saisie par le Gouvernement pour rendre un avis sur le principe du projet StopCovid, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) considère qu’une telle application ne pourrait être conforme au RGPD qu’à certaines conditions : utilité du traitement, usage temporaire, stockage limité des informations, pour lesquelles la CNIL demande des garanties supplémentaires. Elle indique également son souhait d’être saisie à nouveau lorsque le traitement sera formalisé, avant sa mise en œuvre effective. Les mesures prises devraient permettre de sécuriser le déploiement de StopCovid.

Faut-il se méfier d’une application développée en trois mois quand un an serait nécessaire pour s’assurer de son bon fonctionnement ?

A l’heure actuelle, il existe plusieurs contraintes techniques associées au déploiement massif de l’application StopCovid. Premièrement, le Bluetooth n’est pas prévu pour être un outil de mesure des distances. Il faut aussi qu’il puisse être disponible en permanence, mais les applications ne sont pas en mesure de le faire en arrière-plan pour diverses raisons : préserver la batterie, empêcher les abus de développeurs dans le domaine de la publicité et se prémunir de dérives en matière surveillance. Deuxièmement, il ne faut pas oublier le problème d’interopérabilité entre les applications développées par les membres de l’Union Européenne (UE), étant donné que les pays européens se déconfinent progressivement et que les flux de voyageurs devraient repartir à la hausse dans les prochaines semaines. Troisièmement, la compatibilité de StopCovid avec les smartphones du marché : l’application doit fonctionner avec un maximum de systèmes d’exploitation présents sur le marché, dont Android et iOS bien sûr. Mais pour iOS, l’application doit être au premier plan, rendant ainsi l’utilisation d’autres impossible. Le gouvernement français a fait une demande auprès d’Apple, restée sans suite.

En Islande, par exemple, l’application a été téléchargée par 40 % de la population : une utilisation insuffisante pour des résultats pertinents ?

Cette application est efficace seulement si l’ensemble de la population joue le jeu. Or, dans une enquête Harris Interactive pour Data Publica publiée le 14 mai 2020, seulement 49 % des Français sont prêts à installer l’application, sur le principe du volontariat. Techniquement, la diffusion de l’application se heurte au taux d’équipement des Français en smartphones, qui n’est que de 77 %, selon une enquête de 2019 du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie. Les applications de type StopCovid ne sont qu’une partie de la réponse sanitaire. La décrue des cas de coronavirus dépendra sûrement plus des mesures de distanciation sociale, de la mise à disposition de tests de dépistage rapides et sérologiques à grande échelle, de la distribution de masques et d’équipements médicaux, de la mobilisation d’enquêteurs sanitaires et de l’isolement efficace des malades.

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