Refonder les modèles éducatifs : entre emprise technologique et engagement sociétal

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crédits Pixaby

Le développement des nouvelles technologies et plus particulièrement des potentialités liées à l’intelligence artificielle bouleverse tous les secteurs d’activités, y compris le monde de l’enseignement supérieur. En parallèle, les questions sociétales et d’impact environnemental questionnent fortement nos modèles d’apprentissage éducatifs. Ce contexte technologiquement sans limites dans un monde menacé par le réchauffement nous oblige ainsi à repenser la mission des établissements d’enseignement supérieur.

L’intérêt de refonder les modèles éducatifs

Chacun va devoir refonder son modèle éducatif, non seulement pour attirer les apprenants et démontrer l’intérêt de suivre une formation en présentiel dans un environnement où tout est disponible en ligne, mais également pour attirer d’autres parties prenantes qui viendront enrichir la proposition de valeur des institutions. Dans ce cadre chahuté, le rôle des enseignants sera décisif pour mettre en musique ces nouveaux modèles et les gouvernances devront faire des choix stratégiques.

Sous l’emprise des technologies, la tentation du tout savoir et la fin de l’esprit critique des étudiants

Le développement récent des fortes potentialités liées à l’intelligence artificielle, et en particulier aux Large Language Models, bouleverse tous les secteurs d’activités, et en particulier les établissements d’enseignement supérieur. Tout est devenu facile pour les apprenants : les données sont disponibles de suite, les réponses aux questions sont désormais générées automatiquement. Dès lors, la tentation est grande pour l’étudiant de se reposer sur l’IA et les LLMs, de prendre pour argent comptant la réponse à la question posée, pouvant ainsi aboutir à des non-sens ou des contre-vérités, questionnant la place des technologies dans l’enseignement. De là, il n’y a qu’un pas à franchir pour perdre son esprit critique et aboutir à des réponses standardisées, où finalement l’humain n’aura plus de valeur. C’est là que se joue le rôle des établissements d’enseignement supérieur et finalement leur survie, puisqu’il leur faudra démontrer la valeur ajoutée de toute formation, d’autant plus si elle est payante. C’est là également que le rôle de l’enseignant intervient.

Le challenge des enseignants : devenir maître à penser tout en développant une littératie numérique

Au cœur d’un système éducatif chahuté, l’enseignant devra devenir le guide des apprenants pour développer leur autonomie, forger leur esprit critique et asseoir leur conscience citoyenne. Ceci peut apparaître comme une révolution, puisque ce rôle fait évoluer la mission de l’enseignant, passant d’un rôle de simple transmetteur de connaissances à un statut de maître à penser des apprenants, dans un contexte ultra-digitalisé. Ce rôle est complexe et confère une réelle responsabilité à l’enseignant qui devra questionner les objectifs pédagogiques formulés et les finalités intellectuelles et citoyennes de son cours, tout en intégrant les potentialités mais aussi les risques générés par l’IA et les LLMs. Cela implique un investissement fort des enseignants tant au niveau de la conception de leurs cours qu’en termes de formations à suivre pour acquérir une nécessaire littératie digitale.

Développer une offre plurielle où l’enseignement est davantage co-construit et ouvert au monde

L’intégration de ces paramètres devient une opportunité pour créer une valeur unique et enrichie où l’étudiant est acteur de sa formation et conscientise son action dans la société tout en développant ses compétences. Par ailleurs, les formations doivent s’ouvrir sur le monde extérieur et faire rentrer les acteurs de la société dans la salle de classe, devenue aussi bien réelle que virtuelle : entreprises, associations, artistes, philosophes, etc. L’interdisciplinarité renforcera l’attractivité des cours. Cet enrichissement disciplinaire bouscule les codes d’un enseignement pensé en silo et par grands domaines comme la médecine, l’économie, les arts… Il permettra ainsi de renforcer la légitimité et l’impact sociétal des établissements d’enseignement supérieur.

L’innovation se comprend comme systémique

La vraie innovation des établissements d’enseignement supérieur sera dans la création d’un modèle d’apprentissage tirant profit des nouveaux outils technologiques, qui saura intégrer tout le potentiel créatif et pédagogique des enseignants pour imaginer des contextes d’apprentissage engageants, en partenariat avec des acteurs de la société civile ou d’autres institutions dans des champs interdisciplinaires. Pour supporter ces changements, des choix stratégiques sont à initier de la part des gouvernances en place.

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Par Virginie Hachard, Enseignant-chercheur en finance, Doyenne associée de la Faculté, et Olivier Lamirault, Directeur Edtechs, EM Normandie

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