La force de la Française des Jeux réside dans ses clients fidèles qu’il est essentiel de conserver tout en attirant un public plus jeune. Pour s’adapter aux nouveaux modes de consommation et imaginer les jeux de demain, l’héritière de la Loterie nationale est entrée de plain-pied dans l’ère du numérique. Décryptage avec Pascal Chaffard (ESCP Europe 92), son Directeur Général Adjoint en charge de la Performance, de la Finance et de la Régulation. – Par Bertrand Bourgine
Quelle est la stratégie FDJ pour répondre à la « consumarisation » digitale des jeux et paris en ligne ?
FDJ vit une révolution des usages de ses clients, en réinventant la façon d’accéder à ses jeux, mais aussi une révolution de ses jeux, désormais en concurrence latérale avec ceux du gaming, première industrie culturelle au monde. Comme notre bassin de quelque 26 millions de clients tend à s’éroder, nous voulons reconquérir nos joueurs en mettant l’accent sur les femmes et les jeunes générations (18-35 ans), qui sont nos clients de demain, et ce toujours dans un modèle de jeu récréatif. C’est pour toutes ces raisons que nous cherchons à mettre encore plus de jeux dans nos jeux avec une offre innovante et sans cesse renouvelée. Nous n’oublions pas non plus de développer des synergies avec nos 31 900 points de vente physiques qui sont notre véritable ADN de proximité. A l’ère du « phygital » (intégration du digital dans les lieux physiques), nous testons des solutions technologiques dans notre réseau de vente pour développer la connaissance du client et améliorer son expérience de jeu.
Est-ce que ces évolutions impactent votre façon de travailler ?
Il n’est pas possible de pouvoir concevoir des produits et des services adaptés au monde de demain si nous-mêmes sommes dans un mode de fonctionnement du passé. Comme FDJ s’est historiquement développé sur un modèle traditionnel, il fallait ouvrir une nouvelle page. Il y a encore du travail car on touche profondément à la culture de l’entreprise. Ainsi le management très vertical et hiérarchique qui est peu adapté à un monde agile « drivé » par le client fait place à un mode de travail de plus en plus en transversalité en responsabilisant les différents collaborateurs. Le manager doit accepter qu’il ne sait pas tout, notamment sur des sujets comme le digital, les réseaux sociaux et le gaming parfois mieux appréhendés par les collaborateurs les plus jeunes. FDJ a ainsi notamment demandé à des étudiants de la Web School Factory, qui sont des digital natives, de réfléchir à ce que pourraient être les jeux de demain, notamment le Loto.
NOUS CHERCHONS À METTRE ENCORE PLUS DE JEUX DANS NOS JEUX AVEC UNE OFFRE INNOVANTE ET SANS CESSE RENOUVELÉE.
Qu’est ce qui vous anime et vous passionne le plus au quotidien ?
Mon poste, mais globalement l’écosystème de l’entreprise, permet de traiter une grande diversité de sujets, donc je n’ai jamais de lassitude. Je trouve passionnant d’être au coeur de la révolution numérique des clients et du jeu, mais surtout de participer à cette mutation de l’entreprise dans une phase de croissance en ayant les moyens de mettre en oeuvre les projets nécessaires et dans une vision de long terme. C’est à la fois une grande chance et une grande responsabilité car on n’a pas le droit d’échouer en ayant toutes ces cartes en main. De plus il y a vraiment une bonne qualité de vie entre les hommes et les femmes de l’entreprise. Cet avis est partagé par les jeunes embauchés et les extérieurs qui nous fréquentent. Lorsqu’on s’investit dans son travail en y passant du temps, cette dimension humaine et relationnelle est très importante.
Outre la Performance et la Finance, vous êtes en charge de la Régulation ?
FDJ est là pour faire jouer les françaises et les français, mais pas n’importe comment. Nous avons une responsabilité sur ce que le jeu peut produire en termes de risques d’addiction, de blanchiment, de fraude, etc. FDJ utilise également les nouvelles technologies comme le big data, pour prévenir les comportements à risques chez certains joueurs ou pour prévenir les risques de fraude. Les valeurs du jeu responsable ne sont pas une posture de communication mais un point clé de la culture de l’entreprise. Notre marché doit intégrer des mutations fortes et permanentes qui doivent conduire le régulateur à être agile et à adapter sans cesse les réglementations aux nouvelles formes de jeu. Moi qui suis savoyard d’origine, j’ai un peu l’impression de marcher sur une ligne de crête. Cela m’anime de devoir toujours trouver le bon niveau d’équilibre.
Quels sont les points d’entrée les plus proposés aux jeunes diplômés ?
Ce sont ceux qui tournent autour de l’IT, de la data et du marketing digital. Ces métiers se rapprochent. On peut y accéder par une école de commerce en élargissant ses connaissances à la data et au digital, par une école d’ingénieurs en entrant par la data ou le développpement ou encore par des écoles de design ou de web mastering.
Quelles qualités mettriez-vous en avant pour s’épanouir au sein de FDJ ?
La curiosité pour bien comprendre les métiers et l’environnement de l’entreprise. La capacité de travailler en transversal et de se positionner au service de l’entreprise, hors de tout silo quel que ce soit sa place dans l’organigramme. Enfin l’autonomie et l’esprit d’initiative, mais avec toute la transparence et l’intégrité que requiert FDJ.
FDJ 2020 : UNE VISION AUGMENTÉE ET ÉLARGIE
Le Groupe prévoit 500 M€ d’investissements entre 2015 et 2020, pour transformer son socle informatique (250 M€), numériser le réseau (180 M€) et investir dans l’innovation à travers des fonds de startups. Comme l’innovation dans le digital rime souvent avec partage de savoir-faire, FDJ a noué des partenariats stratégiques avec Amodée, deuxième éditeur de jeux européen, pour explorer de nouvelles mécaniques ludiques. FDJ a également investi 13 M€ dans des fonds gérés par Partech Ventures afin de se rapprocher de startups novatrices.
DE NOUVELLES FRONTIÈRES
• Jeux et services FDJ développe ses services et vise près de 10 % des mises réalisées sur des jeux à innovation de rupture en 2020, tels « Duel de Cartes » ou « Happy Dés », jeux de nouvelle génération ludiques et interactifs ou des jeux qui mêlent grattage et jeu vidéo.
• Réseaux L’intégration du digital dans les 31 900 points de vente LDJ, 1er réseau de proximité de France, va simplifier le quotidien des détaillants et des joueurs en permetttant à ces derniers de varier leurs pratiques où qu’ils soient via les mises numérisées.
• International FDJ vient de lancer « FDJ Gaming Solutions », sa nouvelle marque commerciale de vente de technologies, de jeux de nouvelle génération et de services à l’attention du monde des loteries et des paris sportifs.
L’APPORT DE MA FORMATION ESCP EUROPE
C’est une formation généraliste, de touche à tout à l’image de mon parcours FDJ où j’ai successivement occupé des postes de direction dans divers domaines d’activité : le contrôle de gestion, la direction de projets sur la supply chain puis sur le pricing des produits lors du passage à l’euro, le marketing produit, la stratégie, l’innovation, la transformation, et enfin la performance, la finance et la régulation. J’avais adoré mon année de césure chez Peugeot. Cette expérience professionnelle m’a complètement ouvert les yeux et permis de comprendre la richesse, l’intérêt concret et pratique de ce que j’apprenais. L’école, alors très parisienne, est devenue très internationale, c’est essentiel dans le monde de demain.
CHIFFRE S CLEFS :
13,7 Mds€ de ventes en 2015 (CA record en progression de 5,4 % par rapport à 2014)
26,3 millions de clients en 2015 (dont 1,3 million de clients en ligne)
100 M€ investis en 2015 dans le cadre du projet stratégique FDJ 2020
66 % des mises collectées sont redistribuées aux joueurs sous forme de gains (soit 8,5
Mds€), 23 % revient à l’Etat, 5 % à FDJ et 6 % au réseau de distribution
42 jeux au total proposés (16 nouveaux en 2016)
1 800 collaborateurs (vision groupe, chiffre 2015)
31 900 points de vente FDJ en France en 2015 qui réalisent 96 % des ventes
Contacts : fdj.profils.org – www.groupefdj.com