Un des critères de succès de l’entrepreneur ? L’inconscience ! – L’interview d’Eric Larchevêque

Interview Eric Larchevêque
crédits Pierre Olivier / M6

Ingénieur de formation devenu serial entrepreneur et investisseur, Eric Larchevêque est le co-fondateur de Ledger, spécialiste de solutions sécurisées uniques dédiées aux applications de la blockchain. Il est aussi une des têtes d’affiche de la saison 3 de Qui veut être mon associé, sur M6. Il partage son parcours et ses conseils avec les entrepreneurs de demain.

Si sa passion d’enfant pour la pâtisserie aurait pu le mener vers une autre émission à succès de M6, sa passion pour l’informatique en a décidé autrement ! Armé de son premier ordinateur reçu à l’âge de 10 ans, la programmation n’a rapidement plus eu de secret pour lui. C’est donc tout naturellement qu’Eric Larchevêque s’est dirigé quelques années plus tard vers des études d’ingénieurs à l’ESIEE, où il s’est orienté vers l’électronique et la microélectronique. Et c’est pendant ses études que l’entrepreneuriat est devenu une évidence.

A quel moment avez-vous eu le « déclic entrepreneurial » ?

Je ne sais pas si on peut parler de déclic. Le fait de monter une entreprise s’est plutôt imposé à moi en rejet du salariat.Lors de mes premiers stages dans de grands groupes, j’ai découvert un environnement où il était très difficile de développer un engagement maximum et une vraie passion. Je me suis retrouvé face à des gens un peu « amorphes » et j’en étais très triste. Moi je voulais être habité, il était impératif que mon travail soit passionnant. J’ai donc monté mon entreprise, même si à l’époque, l’entrepreneuriat n’était pas une notion aussi claire et affirmée qu’aujourd’hui. On ne parlait pas de startup ou de business angels. J’étais un gérant de SARL… ce qui est beaucoup moins sexy ! Mais j’avais l’ADN pour être indépendant et une appétence au risques assez forte pour me lancer là-dedans. Je savais que la seule solution pour moi était de créer mon entreprise, alors je me suis dit « vas-y » !

Vous n’y connaissiez alors rien ou presque à l’entrepreneuriat. Comment ne pas être effrayé par la hauteur de la tache ?

J’ai toujours été assez naïf et optimiste : un défaut et une qualité qui m’ont permis d’y aller sans m’arrêter à des trivialités. C’est d’ailleurs un conseil que je donne souvent à de jeunes entrepreneurs : arrêtez de vous poser des questions et cultivez votre inconscience. Quand on débute, on n’a pas réponse à tout, il faut travailler à l’instinct, se faire confiance et ne pas être en mode analytique sur tout. Quand j’ai débuté, je ne savais même pas par où commencer. J’ai acheté des livres sur la SARL, j’ai passé six mois sur des choses aussi basiques et concrètes que les formalités administratives ou les statuts, avant même de réfléchir au produit.

Qu’attendiez-vous de cette aventure ?

Un mode de vie : je voulais me lancer corps et âme dans mon projet, passer mes soirées et mes nuits à bosser et finir par dormir sous mon bureau ! J’attendais quand même aussi d’avoir des clients et de faire vivre l’entreprise. Mais sans objectif de taille. Nous étions en 1996 et donc pas encore dans la folie des années 2000 : on gérait très au jour le jour, sans avoir une ambition de malade. Mais mon approche a changé dans les années 2000. Avec mon associé, nous avons créé une nouvelle entreprise en développant des solutions de paiement, de monétisation de contenu et d’affiliation sur le net assez novatrices pour l’époque. Nous avons assez vite atteint les 20 millions d’euros de CA avec la chance de traverser sans encombre l’explosion de la bulle internet, car nous étions complètement autofinancé, avec une entreprise rentable. Nous voulions alors en faire un leader européen mais le marché de l’internationalisation étant très difficile pour les Français, nous avons revendu notre solution à un grand acteur de l’internet de l’époque.

Beaucoup de beaux projets ont suivi : certains avec succès, d’autres moins. Quel est l’échec qui vous a le plus appris ?

Je ne fais pas partie de ceux qui célèbrent les échecs. Il ne faut pas faut les cacher ou en avoir honte bien sûr, car ils nous apprennent beaucoup, mais je ne suis pas un grand fan de failcon. D’autant que si j’ai rencontré des moments difficiles et que j’ai pu rater des opportunités, je n’ai jamais vraiment eu un échec qui m’a mis par terre.

Votre conseil à un jeune entrepreneur en cas de coup dur ?

La vie d’un entrepreneur est faite de hauts et des bas et il faut savoir se poser les bonnes questions au bon moment. On rencontre forcément des moments durs où tout va de travers et où on doute. La grande difficulté est alors de savoir si on doit continuer à fond ou se dire que c’est un échec et arrêter. Il est très important de s’entourer pour analyser la situation avec un maximum de recul. Car une des plus grandes conséquences de l’échec, c’est le risque de se replier sur soi. D’ailleurs, lorsqu’on veut créer son entreprise, le fait d’y aller avec un ou plusieurs associés fait une différence énorme et permet de passer les moments difficiles. Avec mes associés, nous avons traversé des phases proches du renoncement, mais lorsque nous étions au bord du précipice, le fait d’être plusieurs a créé un effet d’entrainement qui nous a permis de ne rien lâcher. Mais si on fait face à un terrible échec, il n’y a qu’une solution : le temps. Le plus dur, mais aussi le plus vertueux, est alors de réussir à profiter de ce temps pour faire son introspection et comprendre la raison de son échec.

Comment choisir le bon associé justement ?

C’est effectivement LA question, car faire une erreur sur ce point peut être fatal. Choisir son associé, c’est comme choisir sa femme ou son mari : il n’y a pas de méthode ! En revanche, on peut créer des opportunités en networkant au maximum. Ensuite, il faut être très pragmatique. Essayez de faire un Paris-Toulouse coincé dans un train corail avec votre futur associé : si vous arrivez à passer toutes ces heures sans vous sentir obligé de combler le vide et que tout se passe naturellement, c’est que les indicateurs sont bons !

C’est d’ailleurs cette association de talents qui est à l’origine de la réussite de Ledger ?

Absolument. Nous l’avons créé à huit associés, avec huit caractères différents et donc… beaucoup de risques potentiels ! Mais la magie a opéré dès le début : chacun s’est mis dans son rôle mais nous allions tous dans la même direction. Nous nous sommes attaqués à un sujet global, avec une entreprise globale et une technologie française, ce qui nous a donné une vraie légitimité. Nous avons tout de suite ouvert un bureau aux USA, qui n’a rien donné au début. Mais lorsque le marché a explosé, nous étions déjà sur place, nous étions prêts et les gens nous ont donc fait confiance. Une confiance qui a perduré grâce à une exécution sans faille par la suite, une condition sine qua non du succès.

Pourquoi accompagnez-vous de jeunes entrepreneurs aujourd’hui ?

J’ai commencé à investir dans de nouveaux projets en2010. Vers 2016/2017, j’ai eu de plus en plus envie d’accompagner de jeunes entrepreneurs, curieux de la diversité des business models et des challenges, que je vivais de façon indirecte grâce à l’investissement. Le succès de Ledger m’a donné plus de hauteur pour poursuivre dans cette voie et j’ai tout de suite eu envie de participer à l’émission Qui veut être mon associé sur M6 : je voulais consacrer une plus grande partie de mon temps à aider d’autres entrepreneurs et c’était un super tremplin pour le faire. J’ai d’ailleurs un plaisir énorme à découvrir des projets et à les amener vers la réussite : il n’y a rien de plus enrichissant que de partager sa propre expérience !

Qu’est-ce qui vous donne le coup de cœur pour investir dans un projet ?

Le ou la porteuse de projet qui a compris que l’entrepreneuriat est quelque chose qui consume l’âme. Quand je vois cette lueur j’ai envie d’investir. Il faut aussi bien sûr que le projet résonne dans ce qui m’intéresse, mais c’est secondaire.

Avis aux développeurs !

Eric Larchevêque a cofondé ALGOSUP avec Franck Jeannin en 2019. Une école d’informatique qui forme des développeurs full stack en 5 ans sur un cursus 100% en anglais. Avec un mode d’évaluation assez unique en son genre, basé sur un système de points dans une arborescence de 50 compétences différentes. Avec un objectif à 50.000 points, score nécessaire pour obtenir son diplôme.  

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