Oriana Ng, entre Paris et New York, le cinéma en ligne de cœur

Diplômée d’HEC et de NYU Tisch, Oriana Ng tisse son cinéma à la croisée des mondes. Entre France et États-Unis, entre théâtre et caméra, elle explore la fragilité des liens humains. Son film Les trois valseurs, avec Mikaël Mittelstadt et Ophélie Lehmann, est en compétition à Los Angeles le 21 juin.

Tout commence dans le sud-ouest de la France, dans la région toulousaine. Oriana Ng a 14 ans lorsqu’elle se prend de passion pour le cinéma : « C’est Martin Scorsese et Robert De Niro qui m’ont donné envie de devenir réalisatrice. À partir de ce moment-là, je n’ai plus jamais changé d’avis. » Mais la jeune fille choisit d’abord la voie royale : prépa commerce, concours, HEC Paris. Elle en sort diplômée en 2018, avec un master Médias, Art et Création. « J’ai fait tous mes stages dans le cinéma, je me suis spécialisée pour être productrice. Mais au fond, j’avais envie de raconter mes propres histoires. » Un échange à Los Angeles, à l’USC, lui met le pied à l’étrier. Elle y découvre la scène cinématographique californienne, baigne dans l’univers des studios. « C’est là que j’ai su que je devais me lancer. » Elle postule à la Tisch School of the Arts de NYU — l’école de cinéma par laquelle sont passés Martin Scorsese, Spike Lee, Cédric Klapisch. Elle est reçue.

New York, c’est le cœur du cinéma indépendant

crédits Tommy Sailt

À New York, Oriana se sent chez elle. « C’est une ville où tout peut arriver. Tout le monde a une histoire à raconter, les artistes se croisent tout le temps, il y a une énergie folle. » Elle y découvre aussi une nouvelle passion : le théâtre. « J’y vais trois à quatre fois par semaine. Les meilleurs acteurs viennent du théâtre, ils viennent avec une vérité brute. » Elle vient de terminer un master de réalisation et d’écriture de scénario à la Tisch. En première année, elle réalise un court-métrage dans un ascenseur new-yorkais, loué dans un vieux bâtiment reconverti en studios. « Ce n’était pas simple, mais on apprend à être débrouillard. À la Tisch, on a énormément de ressources, de conseils, d’entraide. » C’est dans ce cadre qu’elle développe Les trois valseurs, un court-métrage de 18 minutes tourné en France, avec une équipe cosmopolite : serbe, norvégienne, malgache, libanaise… « Le tournage a eu lieu dans un ancien pavillon de chasse d’Henri IV. L’équipe était composée de jeunes diplômés, la plupart bénévoles. On avait un petit budget, mais une envie énorme. » Cette sensibilité apprise au théâtre transparait dans sa réalisation qui capte les silences, les tensions, les gestes plus que les dialogues. « Mon cinéma est très dirigé vers l’intime. Je cherche la faille, le moment de bascule. »

De la scène française aux festivals internationaux

À l’écran, deux visages familiers. Mikaël Mittelstadt, connu pour son rôle dans Ici tout commence et dans la série Bardot, incarne le personnage principal. « On s’est rencontrés à New York. On a déménagé en même temps, on a des amis communs. Il m’a beaucoup aidée. » Face à lui, Ophélie Lehmann, actrice de théâtre, actuellement à l’affiche de Smile, plusieurs fois récompensée aux Molières. « C’est Mikaël qui me l’a recommandée. Elle est brillante. » Le film a déjà été projeté dans le Missouri et à Dallas. Le 21 juin, il sera en compétition au festival Dances With Films, à Los Angeles. Une étape symbolique pour Oriana : « J’ai vécu à L.A. pendant mon échange à HEC, et j’y retourne avec ce film. » Le film réunit une équipe jeune, multiculturelle, soudée autour d’un projet à petit budget et grandes ambitions. « C’est un film sur la rencontre de deux âmes solitaires, sur ce que ça coûte de s’ouvrir à l’autre et sur la grâce de ces instants où tout se connecte, enfin.»

L’art du doute, l’appel du récit

Entre cinéma et théâtre, casting et enseignement, Oriana Ng construit son univers. Elle termine actuellement un nouveau court-métrage de thèse, dirige des enfants, enseigne l’acting, travaille dans le casting de courts-métrages, et prépare la mise en scène de sa première pièce. Ses projets futurs ? Des courts-métrages, un long-métrage, si le financement suit. Et toujours, cette philosophie ancrée : « Il ne faut pas faire ça pour Cannes ou les César. Si on fait ce métier, c’est parce qu’on n’a pas le choix. Parce qu’on a besoin de raconter des histoires. » Le doute est toujours là : « Est-ce que je suis assez douée ? » Mais la passion l’emporte. « Avec peu de budget, on apprend à être malin. À aller à l’essentiel. À se poser la seule vraie question : de quoi a-t-on besoin pour raconter cette histoire ? »
De Toulouse à New York, Oriana Ng construit pas à pas sa place dans le cinéma. Entre courts-métrages, casting et mise en scène, elle avance avec méthode et détermination, bien décidée à faire entendre sa voix.