Le saviez-vous ? En intégrant le corps des administrateurs de l’INSEE, un polytechnicien s’ouvre la possibilité de travailler aussi bien au sein de l’institut statistique que dans différents Ministères, des organismes de recherche ou des institutions internationales, ou encore dans le secteur privé. Jean-Luc Tavernier (X80), Directeur Général, met un coup de projecteur sur les formidables opportunités qu’offre son Etat-Major.
Quelle est la force de l’INSEE ?
Sans aucun doute son expertise. Dans une société où règne la défiance, nous nous positionnons comme LA référence permettant d’éclairer le débat public en matière d’indicateurs économiques et sociaux. A la différence d’autres instituts statistiques dans le monde, nous ne nous contentons pas de produire et diffuser des chiffres : nous les faisons parler. Pas question de livrer l’information brute sans mode d’emploi ni sans mise en perspective. L’indépendance, l’autre atout fondamental de notre institution, garantit notre impartialité. Il n’y a pas d’information privilégiée : elle est la même pour tous et accessible au plus grand nombre. Nous créons un bien immatériel public, indispensable à la démocratie.
Les grands défis à relever ?
- Le « déluge » de la donnée, communément appelé le « Big Data », constitue notre principal challenge – et une fantastique opportunité. Il nous faut évidemment séparer le bon grain de l’ivraie pour pouvoir le mettre à profit. Auparavant la statistique s’appuyait sur les enquêtes et les données administratives. Désormais, nous accédons également aux données d’entreprises, appelées à devenir un troisième pilier de l’information statistique, avec toutes les précautions méthodologiques qui s’imposent et l’innovation en matière de système d’information que cela implique. Les domaines d’application sont nombreux : par exemple, grâce aux données dématérialisées des enseignes de la distribution, nous produirons demain des indices des prix beaucoup plus précis.
- L’autre grand défi consiste à aller au-devant des publics qui ne viennent pas à nous. Si les médias institutionnels puisent sérieusement l’information sur notre site, ce n’est pas le cas des nouvelles générations qui ne jurent que par les réseaux sociaux. Une de mes priorités concerne la pédagogie du chiffre et de l’information statistique, en particulier pour les élèves de collège et de lycée. Faire avancer la compréhension de l’économie et des phénomènes sociaux est essentiel pour que la société civile puisse engager un débat public éclairé – c’est, bien entendu, notre principale bataille.
Les métiers clés des administrateurs de l’INSEE ?
Je trouve le terme d’« administrateur de l’INSEE » doublement trompeur. D’une part, il s’agit davantage de comprendre et d’aider à réguler, plutôt que d’administrer. D’autre part, nous sommes amenés à exercer notre métier dans bien dans d’autres institutions qu’à l’INSEE. Nos missions couvrent ainsi trois grandes filières :
– La production statistique : collecte, traitement, méthodologie et développement des systèmes d’information afin de constituer la donnée puis la rendre accessible.
– Les études statistiques sur les thèmes relevant de domaines variés (marché du travail, conditions de vie, santé, éducation, économie régionale, aménagement du territoire…)
– Le conseil en politique économique et l’analyse conjoncturelle, afin d’améliorer l’efficacité des politiques publiques au regard des objectifs d’action.
Ces missions s’effectuent certes à l’Insee, mais aussi dans les services ministériels pour la production et les études statistiques (par exemple, au Ministère du Travail, de la Santé, de l’Education…), et plus particulièrement à la DG du Trésor, la DG du Budget, dans des cabinets ministériels, ou encore dans des organismes internationaux pour le conseil et l’expertise en politique économique. Et dans tous ces lieux, le savoir-faire des administrateurs de l’Insee est largement plébiscité.
Les opportunités de carrières pour les jeunes Polytechniciens ?
La gamme des possibilités est très diversifiée, allant de la recherche à l’appui à la décision politique. Nous proposons une dizaine de recrutements par an pour les X. En intégrant le corps de l’INSEE, les polytechniciens sont assurés d’avoir des postes opérationnels tout au long de leur carrière, c’est-à-dire de rester en prise avec leurs domaines d’expertise et d’intérêt – fait remarquable en comparaison avec d’autres corps de la fonction publique d’État. Le tout, en bénéficiant d’une assez grande diversité de débouchés et d’expériences professionnelles, grâce à une politique active de mobilité, tous les deux à trois ans pour les premiers postes.
Enseignant-chercheur, méthodologue, concepteur d’enquête, économètre, expert du marché du travail, économiste de la santé, conjoncturiste, manager au sein d’un établissement régional, conseiller en politique économique, voilà des postes que de jeunes X peuvent rapidement rejoindre en tant qu’administrateur de l’Insee. Leurs compétences très recherchées leur ouvrent les portes par la suite des organisations internationales comme le FMI, la Banque Mondiale, l’OCDE, la Commission Européenne ou bien dans le privé en tant que « top manager. »
« L’INSEE encourage à ne pas se spécialiser trop tôt. Profitez-en ! »
Que recommandez-vous aux diplômés ?
Je les invite à être plus libres et détendus sur le choix de leurs premières expériences professionnelles. Un premier poste ne les oriente pas de manière irréversible. Et rien de tel que de multiplier les points de vue dans son parcours. On est meilleur économiste quand on sait comment les statistiques sont produites, et inversement, meilleur statisticien quand on sait à quoi elles servent dans l’analyse économique. J’aime qu’il y ait du mouvement entre les différentes filières. Ils peuvent également aller essaimer dans des entreprises privées et revenir dans le secteur public dans d’excellentes conditions. C’est ce qu’a fait une jeune polytechnicienne, en partant dans la Silicon Valley travailler sur le big data avec l’intention de revenir. Le champ des possibles est infini.
Sont-ils préparés à cette diversité de métiers ?
En parachevant leur cursus à l’ENSAE ParisTech, ils sont formés à la réalité des carrières qu’ils embrasseront par la suite. Bien que l’école soit aujourd’hui indépendante de l’INSEE, nous travaillons en collaboration pour adapter au mieux l’enseignement aux besoins de compétences que nous observons. Je n’ai jamais vu une formation de haut niveau être aussi proche du « terrain ». Une fois diplômés, les jeunes administrateurs ne sont pas abandonnés à eux-mêmes. Le service RH et moi-même accompagnons chacun d’entre eux, ainsi que l’ensemble des 650 membres du corps.
Quelles étaient vos ambitions à la sortie de l’école ?
A l’époque, je souhaitais avant tout comprendre le monde. Je rêvais de devenir Chef du Département de la Conjoncture, un poste qui nécessite d’avoir une lecture d’ensemble de l’économie et de son fonctionnement. Sans plan de carrière précis, j’ai suivi mes envies et me voilà aujourd’hui Directeur général de l’Insee. Cette fonction dépasse toutes mes espérances. Mon quotidien ressemble à celui d’un chef d’entreprise, tout en restant proche de notre expertise métier : il m’arrive encore de plancher 3h sur la méthodologie d’une enquête… Et en tant que chef du corps des administrateurs de l’INSEE, j’ai en outre la mission de suivre les parcours de celles et ceux qui essaiment dans des environnements variés, et contribuent à la diffusion de l’expertise statistique. Encore une fois il n’y pas de parcours type. Mon expérience le prouve : j’ai moi-même travaillé durant 15 ans au sein de différents ministères avant de revenir au service de l’INSEE !
3 raisons de rejoindre le corps INSEE ?
– S’ouvrir des portes plutôt qu’en fermer
– Servir l’intérêt général et peser dans l’avenir de la France
– Nul n’a jamais regretté !
Souvenirs de Polytechnique ?
Plus que les cours de mécanique quantique, ce sont les moments de vie. Les mauvais coups entre les rugbymen et les basketteurs dont je faisais partie. Un voyage d’échange à l’université de Pékin en 1982 à l’époque où la Chine était encore fermée. L’apprentissage de l’indépendance à tout point de vue.
« Tous les acteurs, étatiques, régionaux, associatifs, expriment une attente très forte vis à vis des administrateurs de l’INSEE ; nous avons une véritable mission de service public. »
Contact : jean-luc.tavernier@insee.fr