Mettre en oeuvre la rigueur juridique, tel est le principe qui a guidé le parcours de Jean-Paul Baillet et auquel il ne déroge pas dans ses fonctions à l’Andra, Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs. Directeur général adjoint de l’EPIC, il est également directeur de l’établissement de Bure–Saudron, choisi pour accueillir le projet Cigéo, Centre Industriel de stockage géologique, si celui-ci est autorisé. Un projet qui repose sur un postulat de sécurité et de sûreté intangible.
Après une carrière dans l’ingénierie, vous avez rejoint l’Andra. Qu’est-ce qui vous a séduit dans cet EPIC ?
Dans mon métier antérieur, j’ai participé à de nombreuses opérations dans le nucléaire où nous intervenions en tant qu’ingénierie, sans jamais prendre conscience du problème des déchets, un sujet qui pèse durablement sur la sécurité et la sûreté des hommes, l’environnement, la santé, la biosphère. Il est temps d’y penser. Ce qui m’a intéressé c’est de participer à trouver la solution à ce problème qui n’en a pas complètement, et de vérifier que les choses sont bien faites. C’est mon côté écolo positif. Je suis entré à l’Andra comme secrétaire général en 2000.
Quels principes et quels moteurs ont gouverné votre parcours ?
Mettre en oeuvre la rigueur juridique et découvrir les modes de pensée des autres y compris à l’international. On ne négocie pas avec un chinois comme avec un anglais.
Comment vous répartissez-vous les rôles avec le directeur général de l’établissement ?
La décision a été prise en 2006 de faire progresser le projet Cigéo et d’avoir sur le site de Bure-Saudron en Meuse/ Haute Marne un représentant de l’Andra avec des pouvoirs de décision assez élevés, au moins équivalents à ceux que j’avais en tant que secrétaire général de cet établissement public. En tant que DGA et directeur du centre, je suis chargé de la gestion de l’ensemble, responsable de la rigueur contractuelle, de la sécurité des personnes qui travaillent sur le site. Je prends localement des décisions politiques qui s’inscrivent dans la stratégie de la maison, je suis indirectement responsable des essais sur la constructibilité des ouvrages dans lesquels seront stockés les déchets radioactifs. Je discute avec le directeur général des décisions plus engageantes sur le long terme.
Quelles sont les missions du centre de Bure-Saudron ?
Nous étudions depuis de nombreuses années sur le site l’influence de la chaleur sur la roche et faisons des essais de constructibilité. Nous nous sommes engagés à garantir la sécurité et la sûreté avant tout, un postulat intangible sur lequel nous ne transigeons pas, à préserver et développer le territoire d’accueil et à maîtriser les coûts du projet. Il me paraît bon de rappeler que l’Andra est une agence gouvernementale, créée et suivie par le parlement, cadrée sur le plan de la sûreté nucléaire par l’autorité de Sûreté Nucléaire (ASN), différents organismes scientifiques, dont notamment un conseil scientifique composé de scientifiques indiscutables et indiscutés en France comme à l’étranger.
Quels est l’intérêt pour les jeunes ingénieurs de rejoindre l’Andra ?
Je vois 2 intérêts fondamentaux pour les jeunes ingénieurs, la recherche fondamentale et appliquée dans le domaine géologique et les applications que l’on peut faire chez nous. Dans le domaine du génie civil, la recherche de modes de construction pour faire des ouvrages durables et sans maintenance lourde. Se pose également la question de la réversibilité et de la récupérabilité. Lorsque que Cigéo sera en fonctionnement, l’effectif du site devrait passer à 400 avec une proportion importante d’ingénieurs (Supélec, X-Mines, liberté d’action sur le plan technique. Ils rejoindront les personnels de l’Andra, des gens qui ont la passion de leur travail et qui s’attachent à faire progresser la connaissance dans le respect de l’environnement, en fonction de leur spécialité d’origine. Une de mes fiertés est de voir des jeunes diplômés de très haut niveau (Bac +5, 6 ou 7) y compris des doctorants qui viennent à l’Andra.
La France, 1ère de la classe avec le projet Cigéo
Au terme de 15 ans de recherche, la France a été la première, avec la loi capable de confiner dans des conditions satisfaisantes et de longue durée la radioactivité, érigé en principe pour l’ensemble des pays membres de l’UE en 2011. Le site de Bure-Saudron devrait accueillir à partir de 2030, les déchets radioactifs les plus dangereux, qui seraient stockés dans une couche d’argile située à 500 mètres sous terre. Fruit d’un dialogue permanent entre tous les acteurs qui y contribuent, les producteurs*, les autorités, les évaluateurs, les populations, les élus, les associations, les acteurs économiques, le projet Cigéo commencera par une phase industrielle pilote. Son objectif : conforter notamment avec des essais grandeur réelle, la maîtrise des risques en exploitation, les performances des équipements industriels et la capacité à retirer les colis de déchets de leur alvéole de stockage.
Les Arpenteurs : un média numérique pour les générations futures
Fruit de la rencontre entre l’Andra et le magazine qui explore le futur, le média Les Arpenteurs veut mettre en lumière la façon dont le mode de vie et les décisions de nos générations ont un impact positif ou négatif sur ceux qui nous succéderons sur « le vaisseau spatial Terre. »
www.lesarpenteurs.fr
Outil unique en France, le laboratoire souterrain permet d’observer, d’étudier en temps réel le milieu géologique et de partager les découvertes avec d’autres laboratoires.
Dans le cadre de l’Observatoire pérenne de l’environnement (OPE) dont le champ d’observations et d’études couvre une aire de 900 km2 autour du Laboratoire souterrain, des prélèvements sont réalisés de façon récurrente dans la biosphère. Ceux-ci sont conservés dans une écothèque et servent à définir l’état initial de l’environnement local, préalablement à la construction de Cigéo.
Portrait chinois
Que vouliez-vous faire quand vous étiez petit ? Si j’avais été moins paresseux en maths notamment, j’aurais aimé faire une école qui permet d’être marin
Le talent que vous aimeriez avoir… Jouer d’un instrument. J’adore la musique, plus je vis plus je me dis que j’ai raté quelque chose
Une phrase qui vous définit ? Mon ancien directeur général m’avait écrit dans un entretien annuel « mon cher Jean-Paul, il me serait agréable que vous traitiez aussi brillamment les sujets qui vous ennuient que ceux qui vous passionnent ». J’ai signé parce que c’est la vérité
Votre point faible : Il m’arrive d’être colérique, c’est parfois une force à condition que ce soit une force maîtrisée
Votre point fort : Je crois que je suis assez ouvert, j’écoute les gens, j’ai choisi un métier qui m’a ouvert sur le monde
Si vous étiez une chanson ou une oeuvre musicale : Je dirai modestement le lied de Schubert, La truite, un opéra, La flûte enchantée
Un personnage historique : J’aime bien Richelieu, je me suis finalement toujours retrouvé par rapport aux dirigeants, dans mon ancien métier comme dans le nouveau, en situation de premier ministre, en tout cas de ministre
Un animal : Un chat, c’est un animal pas trop idiot, pragmatiquement il retombe toujours sur ses pattes, ce qui pour un juriste est essentiel
Un verbe : tenir
Une personne que vous aimeriez rencontrer : Barack Obama
Votre hobby préféré : l’équitation, je suis cavalier
Les 4 ouvrages que vous emporteriez sur une île déserte : Le Prince, la série Fortune de France, le mystère de la grande pyramide en BD et le Code civil, quelque chose de remarquable à lire, parfois très rigolo
Un lieu ou un paysage où vous aimez vous ressourcer : J’adore être sur mon voilier entre Port Cros et Porquerolles
Votre livret de chevet actuel : Machiavel et Savonarole, je préfère Machiavel, l’un a mieux fini que l’autre
Votre devise ? Progresser
* Partenaires de l’Andra, les industriels responsables des déchets radioactifs qu’ils produisent financent le stockage, à hauteur de 78 % pour EDF, 17 % pour le CEA et 5 % pour Areva. Ils accompagnent depuis 2000 salariés dont 150 à Bure-Saudron – Plus de 1 000 producteurs de déchets radioactifs – Fin 2013 : 1 460 000 m3 de déchets radioactifs – Budget annuel : 334,8 M€
A.M.O.
Contact : jean-paul.baillet@andra.fr