Petit-fils de vignerons, Bertrand Girard poursuit une quête, celle de redorer le blason d’un secteur d’excellence, qui pourtant peine de plus en plus à s’exporter et s’interroge. » Le secteur du vin constitue un des joyaux de la France, et elle doit en être fière. » En associant le 1er groupe coopératif agricole (Invivo) au 1er groupe coopératif viticole (Vinadeis), il souhaite faire émerger un leader français à la hauteur des enjeux mondiaux. – Par Alexandra Montfort
Les pieds dans la glaise, la tête dans les nuages
Descendant de la famille Cognac, Bertrand Girard porte les valeurs d’un ancrage terrien fort, associées à celles d’un citoyen du monde. Ayant passé sa petite enfance au Maroc, avec des parents enseignants qui lui transmettent le goût de l’apprentissage et du voyage, il aspire à découvrir le monde. » Après mes études de commerce, alors qu’Erasmus n’existait pas, je suis parti étudier en Angleterre puis en Espagne. » Il y gagne en ouverture d’esprit et décide, après une 1ère expérience chez Danone, de se spécialiser dans les stratégies d’internationalisation. Il développe son cabinet de conseil à Hong Kong en 1998 puis sa société d’importation de vins français en Chine dès 2000. Acceptant la mission d’accompagner la privatisation de Sopexa, l’agence de promotion des produits français à l’international, il rentre au pays en renforçant sa connaissance des plus grands marchés d’exportation pour les avoir tous parcourus.
Le capitalisme coopératif
En 2010, cet amoureux du terroir reprend la direction de la coopérative viticole Val d’Orbieu et ses 3 filiales (qu’il renomme Vinadeis), afin d’imaginer une stratégie durable pour ce groupe en crise, qui réalise alors 138 millions € de CA, contre 220 millions dix ans plus tôt. Révolutionnant sa structure, il permet d’aboutir à un modèle unique qui allie la beauté du système coopératif, avec un conseil de surveillance essentiellement composé de vignerons, et le pragmatisme d’une SA, avec un directoire qui gère ses 26 filiales (créées ou reprises entre 2010 et 2016) de commercialisation, de marketing, d’internationalisation, d’innovation, de conseil dans le bio au service de la production. Avec 1 600 vignerons, 12 centres de vinifications et 17 000 hectares de vignes ancrées en Languedoc-Roussillon, Vinadeis devient un groupe verticalement intégré de la vigne au verre et prend la place de 1ère winery française. » En pratiquant la performance au service des vignerons et du développement, nous avons doublé l’activité, quadruplé l’export, créé 80 embauches et même versé des dividendes à nos producteurs en 2015, tout en réduisant drastiquement la dette et en renforçant les fonds propres du groupe (plus de 60 M d’€) ! »
« the only way to do it… it’s to do it… »
La rencontre d’InVivo Wine et Vinadeis
Au moment où Bertrand Girard cherche à développer Vinadeis, il échange beaucoup avec InVivo, un groupe composé de 216 coopératives adhérentes dans l’agriculture, la santé animale, la distribution grand public, et souhaitant créer un quatrième pôle dédié au vin français. Saisissant l’opportunité de réunir leurs ambitions, il travaille avec le conseil de surveillance ardemment à un partenariat entre les 2 groupes. InVivo prend 22 % de participations au capital de Vinadeis, bénéficiant ainsi de toute sa structure pour sa nouvelle branche InVivo Wine. » Inventer un tel modèle de croissance, nécessitait d’avoir une vraie compréhension de ce que vivent nos viticulteurs et même temps savoir décrypter les rouages du système financier et du marché mondial. » Il semblerait que ce doux rêveur aux racines profondes, aujourd’hui président du directoire de Vinadeis et DG d’InVivo Wine, ait su relever ce challenge !
Une date clé de votre parcours :
» Lorsque je travaillais chez Danone en 1995, j’ai manqué de perdre la vie dans un accident de voiture. Ce fût un déclic. J’ai réalisé qu’il me fallait mettre en application mes idées. J’ai alors repris mes études et suis parti en Chine pour fonder ma société. »
Un professeur qui vous a marqué ?
» Un professeur de philosophie venant de Salamanca à l’Université Complutense de Madrid. Il m’a fait prendre conscience que le centre du monde ne se trouvait pas forcément là où on le croit. Je me souviens d’un cours sur le droit international dans lequel il nous démontrait que celui-ci n’avait pas pris racine en Angleterre mais en Espagne avec les premières conquêtes et les flux commerciaux qui en ont découlé au 15e siècle. »
Un symbole de la réussite ?
» Les vignerons ont une confiance fragile en leur propre avenir car leur production dépend du bon vouloir de la nature. La structure, que nous avons mise en place, vise à leur apporter plus de sérénité. Aujourd’hui les enfants de nos membres participent aux AG, s’intéressent au métier de leurs parents et y voient une opportunité. Leur implication constitue le symbole de notre réussite. »
Contact : bgirard@invivo-group.com