ANDREAS MUNZEL, CHERCHEUR AU CENTRE RECHERCHE EN MANAGEMENT (CNRS / UNIVERSITÉ TOULOUSE 1 CAPITOLE)

LE BOUCHE À OREILLE ÉLECTRONIQUE, QUÈSACO ?

Week-end idyllique dans un hôtel de charme ou échange désastreux avec la hot line d’un fournisseur d’accès à internet : aujourd’hui les consommateurs n’hésitent plus à partager leurs expériences et à donner leur avis sur le web. Quelles sont les conséquences de cette montée en puissance du bouche à oreille électronique ? Andreas Munzel, chercheur au centre recherche en management (CNRS / Université Toulouse 1 Capitole) et spécialiste de ce phénomène nous éclaire. – Par Clarisse Watine

 

68 % DES INTERNAUTES FONT CONFIANCE AUX AVIS POSTÉS SUR LE WEB

Si le bouche à oreille traditionnel est un phénomène très ancien, le web démultiplie aujourd’hui ses effets. Ainsi si 68 % des internautes déclarent faire confiance aux avis postés sur Internet, c’est d’abord parce qu’ils y trouvent des sources indépendantes. « L’information diffusée sur le site d’un hôtelier peut donner l’impression d’être partiale ou embellie. Se fier au bouche à oreille électronique c’est se fier à de l’information provenant de personnes qu’on ne connait pas mais qui recommandent positivement ou négativement un service ou une prestation, sans y être intéressées commercialement », indique Andreas Munzel. Des anonymes pas si anonymes, tant les possibilités de renseigner son profil, et donc de créer une proximité avec celui des autres, sont élargies aujourd’hui.

© fotolia
© fotolia

DES AVIS À L’ESPÉRANCE DE VIE GRANDISSANTE

Si la portée des messages se trouve ainsi démultipliée par le canal digital, il en va de même avec sa durée. « Un message posté sur le web a une espérance de vie bien plus grande que celui qui vous est donné par votre cercle proche. Il peut être consulté à tout moment par une grande diversité d’utilisateurs. » D’où l’importance d’indiquer la date où ont été émis les avis, les messages les plus anciens étant par exemple souvent exclus des calculs des notes moyennes.

 

LES FAUX-AVIS, DES FAUX-AMIS

Outre ces questions de portée et de durabilité, LE grand sujet du bouche à oreille électronique est celui dit des « faux avis ». Postés par des prestataires et commerçants avides de bonne pub ou des concurrents peu scrupuleux, « ils représenteraient près de 45 % selon la DGCCRF, 20 à 30 % étant d’ores et déjà identifiés comme tels avant leur publication. » Leur détection s’avère donc plus que jamais essentielle, d’autant plus que « la présence d’avis positifs ou négatifs impacte rapidement la vie d’un hôtelier par exemple. En cas d’avis négatif, une étude anglaise estime que son CA peut baisser de 22 %, une baisse pouvant même aller jusqu’à -59 % dès 2 ou 3 avis négatifs. Si bien que certaines hôteliers vont même jusqu’à adapter le prix moyen de leurs chambres en fonction des avis qu’ils reçoivent. »

 

LE MARKETING FACE À DE NOUVEAUX CHALLENGES
La réputation est une problématique marketing très ancienne. Ainsi si la réputation d’une marque est l’affaire du marketeur, sa e-réputation est aussi celle du client ou du consommateur. Alors comment la contenir et la gérer alors même que tout le monde peut l’impacter en donnant son avis sur le web ? « Un client satisfait qui s’exprime, c’est une publicité à la force de persuasion incomparable. De même, les avis négatifs ont un effet néfaste extrêmement fort. Aujourd’hui, le marketing n’est plus unidirectionnel. Pour parler, le professionnel du marketing doit plus que jamais savoir lire, écouter et faire preuve d’empathie. Les marchés deviennent des conversations, on ne peut donc plus ignorer la voix du consommateur », insiste-t-il.