Dans son nouveau spectacle l’humoriste Caroline Vigneaux prône un féminisme de réconciliation - © Nicko Guihal
Dans son nouveau spectacle l’humoriste Caroline Vigneaux prône un féminisme de réconciliation - © Nicko Guihal

[Le pouvoir a-t-il un sexe] Femmes et humour – Interview de Caroline Vigneaux

Quelle place les femmes occupent-elles aujourd’hui dans le monde culturel ? Alors que le collectif 50 / 50 a été lancé en 2018 pour une meilleure représentativité des femmes dans le cinéma, seules quatre réalisatrices étaient en compétition lors du 72e Festival de Cannes. Aux Molières, après le discours choc de Blanche Gardin en 2018, la catégorie Humour était 100 % féminine cette année. Parmi les nommées, Caroline Vigneaux, ex-avocate qui a “tombé la robe”.

 

Blonde, jeune, sexy, marrante et pas issu du sérail, pas facile de faire sa place dans le monde de l’humour. Comédienne, artiste, humoriste, après 7 ans passés à arpenter le prétoire, Caroline Vigneaux n’avait pas le diplôme ! « Je ne sais même pas à partir de quand on peut dire qu’on en est. Quand on le décide ? Quand on monte sur scène ? Quand on est nommé aux Molières ? Alors je me suis fait mes propres examens. Et le jour où j’ai vu le DVD de mon premier spectacle dans le rayon « Humoristes » de la Fnac, j’ai décidé que j’avais mon diplôme. »

Une créative

Deux soirs complètement sold-out sur la scène mythique de l’Olympia ont achevé de la convaincre qu’elle était une artiste. « Ensuite, j’ai été nommée aux Molières. 10 ans après avoir changé de vie, pour la première fois, le milieu me disait de venir manger à sa table. » Celle qui se définit aujourd’hui comme une « créative » a mis du temps à l’accepter. « Je suis née dans un milieu où on ne doit pas trop salir sa robe quand on est une fille, c’était pas gagné ! ».

On n’a qu’une vie

Et pourtant, Caroline Vigneaux n’a pas hésité à transformer sa vie…alors que tout lui souriait. « Mes dossiers était supers, je gagnais très bien ma vie, mon patron était chanmé… je ne regrette pas d’avoir été avocate, mais ce n’était juste pas ma voie. » Mais alors pourquoi ce changement radical ?  « J’ai eu le déclic à la mort de mon grand-père. J’ai soudain réalisé que moi aussi j’étais mortelle. Et j’ai fait mienne cette citation de Confucius selon lequel « on a deux vies, et la seconde commence quand on comprend qu’on n’en a qu’une ». Ça m’a donné une soif de vivre encore plus forte. J’adorais mon métier mais il ne suffisait  pas à remplir ma seule et unique vie et je ne voulais pas regretter quoi que ce soit sur mon lit de mort. »

Le féminisme, y a de quoi en faire un sketch !

Un milieu qui en est pourtant pour beaucoup dans son engagement féministe. « Avant #MeToo, c’était compliqué de le revendiquer, on était tout de suite cataloguée comme la « chieuse de service ». Après ça voulait dire qu’on était dans l’air du temps et maintenant, on nous dit que ça va trop loin. J’ai écrit un spectacle pour rendre ses armes de noblesses au féminisme. Car le féminisme ce n’est pas une histoire de femmes, c’est une part de l’Humanité qui dit qu’elle en a marre de ne pas avoir les mêmes droits que l’autre moitié. »

Fervente défenseure d’un « féminisme de réconciliation », celle qui accueille beaucoup d’hommes dans son public, refuse tout net la notion « d’humour féminin » dans laquelle on la catalogue parfois. « L’humour ça n’est pas une question d’homme ou de femme, c’est drôle ou ce n’est pas drôle. On peut aborder tous les sujets et rire de tout, du moment qu’il n’y a aucun doute sur le fait que c’est de l’humour. » Violences faites aux femmes, lutte pour le droit des femmes et tabous féminins, Caroline Vigneaux n’élude d’ailleurs aucun sujet, même les plus touchy.

Save the date

Caroline Vigneaux est en tournée avec son spectacle « Caroline Vigneaux croque la pomme » jusqu’en juin 2020. Avis à ceux qui veulent suivre son exemple : elle prépare également un manuel sur le changement de vie, « le livre que j’aurais aimé avoir il y a 10 ans ».