TENSIONS DANS LE MONDE, DIALOGUE AU SEIN DE L’UNION EUROPÉENNE, PACTE RÉPUBLICAIN ET DIMENSION MAÇONNIQUE CONSTITUENT LES POINTS QUE DÉVELOPPE POUR NOUS DAVID KELLER, GRAND MAÎTRE DU GRAND ORIENT DE FRANCE.
Le climat mondial ne cesse de se dégrader. Quelles solutions préconisez-vous pour régler pacifiquement ces problématiques ?
On constate la carence d’un ordre international organisé. Si la structure de l’ONU a répondu à une situation historique particulière en instaurant la paix sur les ruines de la seconde guerre mondiale, nous nous trouvons aujourd’hui dans un monde en miettes où se développent de multiples conflits, plus particulièrement au Moyen- Orient. La question se pose de définir une organisation internationale capable de répondre aux problématiques de cette nouvelle configuration.
Le dialogue que vous entretenez au niveau de l’UE, sur la base juridique de l’article 17 du traité de Lisbonne, entre les organisations confessionnelles et les organisations a-dogmatiques, aboutit-il à des décisions concrètes ?
Je souhaiterais que l’on puisse réellement échanger car ces discussions sont toujours conduites de façon séparée. Nous devrions procéder à des échanges croisés mais les organisations confessionnelles ne sont pas très enclines à accepter cette proposition. Il est indispensable de se mobiliser pour réfléchir à la manière de reconstruire une Europe qui soit au service de ses citoyens avant de se tenir au service du libre-échangisme mondial. De plus, nous militons clairement pour que les droits fondamentaux s’affranchissent de toutes les préventions et pressions d’ordre religieux car on assiste à une offensive des milieux dogmatiques qui essaient de remettre en question certaines avancées sociales.
Le pacte républicain continue à se fragiliser entre les différentes composantes de la société française. Comment peut-on intervenir pour améliorer la situation ?
Je constate un appauvrissement de l’esprit républicain, la notion de république étant largement brouillée aussi bien à gauche qu’à droite. Je crains que le clivage politique droite/gauche qui s’est mis en place au lendemain de la première guerre mondiale ne soit obsolète. Il faut opérer une refondation de la République. La laïcité est en permanence victime de polémiques inutiles. Elles débouchent sur une sorte de torsion de la notion laïcité qui se réduit à une apologie de la coexistence des religions dans l’espace social, ce qui va à l’encontre de la mission qu’elle s’est donnée.
L’entrée au Grand Orient de France de jeunes étudiants de grandes écoles et d’universités peut-elle les aider à donner un sens à leur vie et à leur carrière professionnelle ?
On entre généralement en maçonnerie vers 40 ans. En revanche, nous devons présenter la franc-maçonnerie aux jeunes qui ne la connaissent pas. Lorsque je fais des conférences publiques dans les milieux universitaires, je découvre des étudiants intéressés. Je leur explique notamment que la maçonnerie est une école de spiritualité, une école de pensée et une école de l’engagement citoyen, pour résumer cela en trois tiers. L’école de spiritualité permet insondable du sens que l’on peut donner à sa vie, l’école de pensée amène la réflexion et l’école de l’engagement est celle de la citoyenneté.
Le thème-clé qui vous préoccupe pour l’année 2016 ?
Deux thèmes vont être largement abordés. Tout d’abord, le Grand Orient se mobilise sur ce qu’on appelle les « Engagements d’Humanisme » pour mener une réflexion sur toutes les atteintes inacceptables à la dignité humaine. Dans ce cadre, nous proposons un cycle de conférences sur différents thèmes comme l’épuisement au travail, la condition pénitentiaire ou encore la politique migratoire en Europe, par exemple. Un autre événement concerne la troisième édition des « Utopiales maçonniques » qui se tiendront les 9 et 10 avril 2016, où nous reviendrons sur la République en danger.
Patrick Simon