Transition écologique, réindustrialisation et transitions territoriales sont au cœur des programmes des candidats aux Présidentielles et sont autant d’enjeux nécessitant la force novatrice des ingénieurs. La Conférence des directeurs des écoles d’ingénieurs françaises (CDEFI) profite d’ailleurs de l’échéance électorale pour formuler les propositions des écoles d’ingénieurs aux candidats. On fait le point.
« L’immense majorité des licornes de la French tech comptent au moins un ingénieur parmi leurs fondateurs. Plus globalement, 21 % des fondateurs de startups françaises sont diplômés d’écoles d’ingénieurs. Or, la France ne forme toujours pas assez d’ingénieurs : le déficit d’ingénieurs diplômés en France est estimé chaque année à plus de 5 000 selon une étude EY pour l’OPIIEC réalisée en 2018, toujours d’actualité » indique Jacques Fayolle, président de la CDEFI lors de la conférence de presse de la Conférence le 21 janvier 2022.
Dans cette période de Présidentielles, les écoles d’ingénieurs insistent d’ailleurs auprès des candidats sur l’importance de l’articulation entre sciences et société et entre science et technologies, articulation devant être mise au cœur des politiques publiques. « Nous appelons d’ailleurs de nos vœux que ces politiques publiques soient déterminées en début de quinquennat dans une loi de programmation pluriannuelle de l’enseignement supérieur, mise en œuvre par un ministère de plein exercice en charge de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, en collaboration avec les autres ministères de tutelle des écoles » insiste Jacques Fayolle.
On manque d’ingénieurs !
Premier axe des propositions formulées pour les Présidentielles par les écoles d’ingénieurs : l’accroissement du nombre de jeunes aspirants à devenir ingénieurs et scientifiques afin de « s’assurer d’un vivier de scientifiques et de cadres capables d’assurer nos ambitions scientifiques et d’innovations. » Il s’agit ainsi d’abord de renforcer l’enseignement des mathématiques et des fondamentaux scientifiques le plus tôt possible. « Car la chute du niveau des élèves français dans ces matières et à double tranchant : il impacte à la fois le niveau des élèves qui entrent dans les grandes écoles d’ingénieurs mais aussi l’attractivité même des métiers de l’ingénierie, des sciences et des technologies. »
Comment cela peut-il se décliner ? « En adaptant les contenus avec des programmes raisonnablement vastes pour pouvoir approfondir les notions, donner le temps aux élèves de développer un réel intérêt pour ces matières et ainsi ancrer un socle de compétences et de connaissances stables. Avec pour objectif de placer la sciences et les mathématiques dans un environnement serein, bienveillant et plein de sens » pointe-t-on à la CDEFI.
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Présidentielles : les écoles d’ingénieurs appellent les candidats à favoriser l’ouverture
Former plus d’ingénieurs signifie aussi encourager davantage de jeunes femmes à envisager des carrières d’ingénieurs ou de scientifiques. Car on ne compte aujourd’hui encore que 28 % de femmes parmi les élèves ingénieurs. La CDEFI appelle ainsi à « définir des objectifs et des indicateurs de mixité dans la formation, à sensibiliser encore et toujours l’ensemble des acteurs à l’importance de la parité et à amplifier toutes les politiques qui vont créer un environnement favorable à la mixité. » Une ouverture nécessaire, qui implique parallèlement de favoriser l’égalité des chances et la diversité des recrutements. « Un impératif de société et un impératif démocratique qui nécessite de mettre en œuvre une stratégie à moyen et long terme, passant par exemple par une réflexion sur l’adaptation des modalités d’examens et d’accès à l’enseignement (notamment sur les épreuves orales avec une attention portée au parcours de l’élève et la diversification des membres des jurys) » rappelle la CDEFI en insistant sur son opposition aux stratégies court-termistes qu’elle voit dans l’application de quotas ou de bonus aux concours.
Objectif alternance
Le développement de l’alternance dans les écoles d’ingénieurs s’illustre également comme une voie d’ouverture. « Aujourd’hui, 16 % des ingénieurs diplômés le sont par la voie de l’apprentissage et nous avons pour objectif d’atteindre 25 % d’ici 2027. Mais pour cela, nous avons besoin d’être rassurés et accompagnés sur le modèle économique de l’apprentissage, encore instable. Il convient que l’Etat finance France Compétences à hauteur de cette ambition » interpelle la CDEFI.
Pour une meilleure qualité de vie étudiante
Second axe phare des propositions de la CDEFI aux candidats à la Présidentielles : « accroitre les moyens des écoles et lever les verrous administratifs pour leur permettre de former des ingénieurs supplémentaires dans de bonnes conditions. » Un objectif qui passe bien sûr par des mesures économiques (accroissement de la dotation et des effectifs des personnels des écoles d’ingénieurs, multiplication par deux de la dotation aux écoles EESPIG pour compenser sa division par deux en 10 ans etc.), mais aussi par l’amélioration de la qualité de vie étudiante, la lutte contre la précarité et un enseignement supérieur plus inclusif. « La crise Covid a été un révélateur de précarité qui nous a permis de prendre conscience de la fragilité du modèle économique de nos étudiants. Nos écoles ont déployé des moyens pour lutter contre leur précarité économique (aides d’urgences, prêts et dons de matériel informatique, etc.) mais aussi pour lutter contre leur précarité psychologique » indique la CDEFI.
A l’heure où certains candidats à la Présidentielle considèrent que les élèves en situation de handicap n’ont pas tous leur place dans le système scolaire, la Conférence rappelle quant à elle son engagement pour l’inclusion. Une inclusion qu’elle estime plus que jamais indispensable dans les écoles d’ingénieurs. « Si faciliter leur accueil répond à une exigence sociale et citoyenne, il est aussi fondamental de former plus d’ingénieurs en situation de handicap, pour qu’ils participent à la construction de la société de demain, une société où les questions d’accessibilité sont de plus en plus prégnantes. »
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Présidentielles : pour les écoles d’ingénieurs l’amélioration de la vie étudiante passe aussi par…
Accroitre l’offre de logement CROUS disponibles, envisager une aide à la mobilité internationale, mener une politique ambitieuse pour une alimentation saine et équilibrée pour les étudiants (la CDEFI s’exprime par exemple en faveur d’un ticket restaurant étudiant financé par l’Etat), faciliter un dispositif de garantie des prêts par l’Etat pour les étudiants qui ne peuvent pas s’appuyer sur des garants familiaux, construire plus de centres de santé universitaires ou encore, revaloriser les fonctions d’accompagnants des élèves en situation de handicap.
Présidentielles : les écoles d’ingénieurs forment par et pour la recherche… et l’affirment !
La CDEFI n’oublie pas non plus d’interpeller les candidats à la Présidentielle sur le volet « recherche ». Car « les écoles d’ingénieurs ont aujourd’hui pleinement investi le champs de la recherche. Elles forment par la recherche mais aussi pour la recherche. » La Conférence appelle ainsi de ses vœux le ou la futur.e présidente.e à s’engager pour une meilleure association de l’enseignement supérieur privé à la politique nationale de formation et de recherche et pour une intensification des liens entre recherche universitaire et entreprises, pour que tous les talents contribuent aux innovations de demain. » Pour atteindre cet objectif, elle considère ainsi nécessaire de « faire des écoles d’ingénieurs des acteurs à part entière de la recherche et de l’innovation nationales, valoriser davantage le doctorat et améliorer les liens entre la recherche universitaires et les entreprises. »
Quid des droits d’inscriptions ?
Des mesures ambitieuses qui nécessitent des moyens. « Il y a une pression forte à l’entrée de nos écoles car le diplôme d’ingénieur a de la valeur. Il nous faut donc augmenter les moyens à notre disposition et nous avons d’ailleurs des attentes fortes vis à vis de l’Etat à ce sujet. Concernant l’augmentation ou la défiscalisation des droits d’inscription, nous pensons qu’il est dangereux de décréter quelque chose dès lors que les parties prenantes n’ont pas été consultées en amont. Si une augmentation des droits, modulée et accompagnée d’un système de répartition, fait effectivement partie des sujets sur la table aujourd’hui, rien ne peut être envisagé avant une concertation entre l’Etat, nos établissements et leurs usagers » insiste la CDEFI.
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