Séverine Le Loarne-Lemaire © Aurélie Allanic

Mixité des réseaux professionnels :  l’accompagnement spécifique des femmes en débat

Le critère « sexe de l’individu », indépendamment de l’expérience professionnelle, la classe sociale, la situation familiale, permet-il d’identifier une spécificité qui mériterait un accompagnement dédié ? Nous en doutons. – Par Séverine Le Loarne-Lemaire, Professeur associé, titulaire de la Chaire « Femmes & Renouveau Economique » et Mark Smith, Doyen du corps professoral de GEM

 

Les réseaux professionnels : peu ouverts aux femmes ?

Réseau entreprendre : plus de 10 000 adhérents, 12 % de femmes. 20 % de femmes adhérentes au Médef Rhône-Alpes. Ces exemples ne sont pas des exceptions. Les femmes sont peu présentes dans les réseaux professionnels. Face à la montée de réseaux dédiés aux femmes, les réseaux mixtes s’interrogent : Comment intégrer plus de femmes ? Faut-il créer des cellules dédiées aux femmes ? Le cas de Réseau Entreprendre est éloquent : il encourage la création d’une cellule test (Réseau Entreprendre Isère au Féminin), tout en considérant que la femme entrepreneur est un entrepreneur comme les autres.

 

Les femmes et les réseaux professionnels : une pratique en question

Les pratiques de réseautage des femmes et des hommes divergent. Une étude menée pour Réseau Entreprendre en 2014 montre que l’homme adopte une logique de « don – contre don » tandis que la femme a une approche plus utilitariste sans être pour autant opportuniste : Par souci de temps, elle s’intègre dans un réseau lorsqu’elle y cherche quelque chose contre une implication. Une fois la quête réussie, elle se retire. Cette attitude est gênante car elle laisse peu de place aux rencontres pour résoudre les imprévus économiques.

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Les femmes et la croissance de l’entreprise : une autre pratique en question ?

Même s’il n’y a pas de lien entre réseautage et croissance d’activité, certaines femmes éprouvent des difficultés à faire croitre leur activité. Consciemment ou non, elles n’intègrent pas la délégation de taches dans le modèle économique de leur acticité. Souhaitant concilier activité et vie familiale, soit elles s’épuisent, soit elles voient leur activité se restreindre.

 

Le sexe de l’individu : le bon critère discriminant ? La situation familiale plutôt !

Ces deux éléments justifient-ils l’accompagnement dédié des femmes ? Celles qui réussissent leur entreprise se trouvent surtout dans les réseaux mixtes ou, lorsqu’elles sont inscrites dans des réseaux féminins, elles sont souvent associées avec des hommes. Le critère « Femme » ne serait pas le bon : il cache des situations différentes en termes d’éducation, d’origine sociale, de situation familiales. Comme chez les hommes ? Oui, sauf que les pratiques de conciliation entre vies professionnelle et familiale diffèrent selon le sexe. Lorsqu’il y a famille, l’homme déclare y consacrer moins de temps que la femme. Lorsqu’il y a garde alternée des enfants, l’homme et la femme sont tous deux très engagés dans leur activité, surtout dans la semaine sans enfant. Enfin, lorsqu’il y a garde de l’enfant et célibat, l’homme devient une femme comme les autres et son comportement à l’égard des réseaux sociaux change tout comme la croissance de son activité.
Aussi, le meilleur moyen de favoriser la place des femmes dans l’économie ne réside pas tant dans la mise en place d’une « école des femmes dirigeantes » mais d’une école « de parents dirigeants ».

 

Contact :
severine.le-loarne@grenoble-em.com
mark.smith@grenoble-em.com