Secteur en pleine mutation
Le secteur du transport, particulièrement celui de l’automobile, connaît une importante mutation technologique vers moins de pollution, plus d’autonomie, plus de logiciels embarqués, plus d’intelligence, d’automatisation, ce qui, anecdotiquement, signe la mort annoncée du mécanicien bricoleur. La mécanique, jusqu’à présent coeur du métier, doit composer avec d’autres disciplines, celles de la technologie de l’information, des capteurs en tout genre, de détecteurs, de réseaux de neurones, de systèmes d’apprentissage intelligents, de logiciels, de connectivité, etc. Et pourtant son rôle reste essentiel pour concevoir de nouveaux matériaux, de nouvelles architectures, pour des questions de sureté, de durabilité, de fiabilité des nouveaux composants comme des composants classiques, d’allégement, de down-sizing. La priorité va au véhicule, si possible partagé, dans tous les cas, connecté, non polluant, électrique, hybride ou à hydrogène. Il est ergonomique et sans nuisances sonores, obeit à la voix, au toucher ou à la vue. Conduire un tel projet, demande des compétences pluridisciplinaires, faisant place à la créativité et à l’inventivité.
Anticiper les besoins industriels et sociétaux
La définition des besoins industriels et sociétaux du futur nécessite une concertation active entre enseignants chercheurs et acteurs du monde socio- économique. Dans une « société réticulaire » où les individus et les objets sont interconnectés, où les préoccupations sont environnementales et de préservation de nos ressources, l’interdisciplinarité devient indispensable à l’innovation, notamment dans ce secteur très concurrentiel. Une formation moderne sur les systèmes de transports, terrestres ou maritimes, doit permettre d’appréhender cette complexité, de répondre aux problèmes d’aujourd’hui et d’anticiper, en se fondant sur de multiples ancrages : une excellence scientifique bâtie sur des connaissances solides en lien avec les recherches les plus avancées du domaine, l’interdisciplinarité, un lien étroit avec l’industrie, la possibilité de valorisation et l’internationalisation. Les enseignements théoriques approfondis doivent côtoyer des formations technologiques up-to-date données par des ingénieurs créateurs, concepteurs, pilotes de grands projets, issus des entreprises comme PSA, DCNS, MICHELIN, SNCF, AKKA, etc.
L’ingénieur N-dimension
L’ingénieur, notamment ENSTA ParisTech, baigne dans un monde de passionnés, en prise directe avec le réel, que ce soit les enseignants chercheurs, par leurs recherches sur les matériaux (composites, fonctionnels, actifs, intelligents), la récupération et le stockage d’énergie (issue des vibrations, du vent, etc.), les réductions de bruit, les relations homme-machine, les nouveaux procédés de fabrication (impression 3D), l’aérodynamique, la fiabilité, ou que ce soit les industriels par leur savoir-faire. Il est multi-dimension. Sa formation lui donne les moyens de conduire des projets complexes et innovants. Toujours solide scientifiquement avec, d’une part, des cours théoriques portant aussi bien sur le choix ou l’élaboration de nouveaux matériaux (actifs, composites, polymères, architecturés), la conception et le dimensionnement des composants et systèmes structuraux, l’aérodynamique, que sur l’apprentissage par ordinateur, le traitement d’images, les composants et capteurs, les systèmes embarqués et la motorisation, d’autre part des cours pratiques sur l’ingénierie automobile, ferroviaire et maritime, sa force est sa capacité à mener des projets complexes comme à développer des solutions techniques spécifiques.
Des écoles, comme l’ENSTA ParisTech et l’Ecole polytechnique, s’associent et associent les acteurs clés de cette mutation technologique pour monter des formations, des chaires, des projets, des openlabs, autour des transports et de l’énergie, des nouveaux procédés de fabrication comme l’impression 3D. Un point fort de ce dispositif est la stimulation de la créativité des étudiants par des projets autonomes, en leur donnant accès aux moyens des laboratoires, et aussi aux fablabs (comme sur la fabrication additive) destinés à ceux qui veulent s’initier, inventer et tester librement de nouvelles idées.
Quels métiers ?
Ingénierie automobile, ingénierie ferroviaire, génie maritime : sur terre, sur mer ou dans les airs, le véhicule d’aujourd’hui et plus encore, celui du futur proche, est forcément intelligent, économe, « durable », et donc complexe, évoluant et communiquant avec un environnement réticulaire hétéroclite, en constante mutation. La place de l’ingénieur est essentielle dans la gestion globale de ce système, le développement d’outils numériques, de logiciels comme celui de composants électromécaniques fiables, l’assurance de la sureté des installations et équipements, l’optimisation, la lutte contre la pollution. Ses domaines de compétences sont divers: systèmes embarqués, technologies de l’information, science sur les matériaux et des structures, propulsion, aérodynamique et hydrodynamique, acoustique, nouveaux procédés de fabrication, usine du futur. Elles sont complétées par la gestion de projet, l’analyse de valeur ou de risque. Un atout essentiel pour réussir cette mutation est une formation scientifique multidisciplinaire de grande qualité.
Par Habibou Maitournam, Directeur de l’Unité de Mécanique,
Professeur, ENSTA ParisTech. Habibou Maitournam a encadré une vingtaine de thèses CIFRE.