hydrogène vert
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L’hydrogène vert est-il la solution miracle pour remplacer le tout-pétrole ?

Les évènements climatiques, violents et récurrents, nous montrent que le modèle de développement des pays occidentaux au 20e siècle, fondé sur l’extraction de ressources et d’énergies fossiles, n’est plus soutenable. Promouvoir des énergies renouvelables (éolien et photovoltaïque) est impératif, mais leur intermittence requiert un stockage à court et long terme pour ne pas déstabiliser le réseau. Si l’hydroélectricité est efficace, les sites compatibles sont déjà équipés et les contraintes environnementales fortes. Quant aux batteries, elles sont limitées par leur besoin en matériaux stratégiques et critiques, leur empreinte au sol, leur coût, ainsi que les problèmes de sécurité et d’autodécharge (ce dernier étant incompatible avec le stockage saisonnier). Alors, l’hydrogène vert est-il la solution miracle pour remplacer le tout-pétrole ?

Hydrogène vert ou stocker l’électricité sous forme chimique une solution ?

Stocker l’électricité sous forme chimique (power-to-gas) est donc envisagé comme l’une des solutions les plus prometteuses, en particulier le stockage sous forme d’hydrogène. L’idée est de produire de l’hydrogène par électrolyse de l’eau en utilisant l’électricité excédentaire dans les phases d’excès, de le stocker et ensuite de le valoriser sous forme de réactif chimique, de combustible (fours et moteurs à hydrogène), ou en l’utilisant pour produire de l’électricité afin d’alimenter en réseau par le biais de piles à combustible.

Ainsi, l’électrolyse de l’eau permet de stocker l’électricité sous forme d’hydrogène à grande échelle et sur le long terme, ce qui permettrait d’exploiter au mieux les énergies renouvelables et d’assurer un meilleur tampon sur le réseau électrique. Cette « économie de l’hydrogène » est désormais envisagée dans de nombreux pays d’Europe, dont la France, avec son plan hydrogène de près de 9 milliards d’euros. Son objectif est de se doter de 6,5 GW d’électrolyseurs en 2030, qui permettront de fabriquer de l’hydrogène vert à partir d’électricité décarbonée (renouvelable ou nucléaire).

Des défis multiples

Les électrolyseurs et les piles à combustible sont des technologies en développement, encore mal industrialisées : leur fiabilité et leur durée de vie sont incertaines, et leurs coûts encore élevés. Le recours aux matériaux critiques (Pt, Ir) est un vrai souci pour les systèmes dits « à membrane échangeuse de protons » (PEM), de même que celui à des polymères et composés fluorés. Ces problèmes sont contournables pour les systèmes alcalins (surtout à membranes), dont les performances pourraient atteindre celles des systèmes PEM. L’alcalin est donc l’avenir des technologies de l’hydrogène, même si la maturité des membranes alcalines est faible, pour l’instant.

Si le chemin est encore long et tortueux, les technologies de l’hydrogène, intrinsèquement plus « vertes » que le pétrole, sont indispensables pour atteindre les objectifs de neutralité carbone. Néanmoins, espérer remplacer le tout pétrole est illusoire. La technologie ne peut certainement pas tout, et une plus grande frugalité énergétique de nos sociétés ainsi qu’une priorisation des usages sont indispensables, quels soient les vecteurs énergétiques envisagés, hydrogène compris.

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Marian Chatenet

Par Marian Chatenet (LEPMI), Professeur à Grenoble INP – Phelma, Chercheur au Laboratoire d’Electrochimie et de Physicochimie des Matériaux et des Interfaces, Co-responsable « Axe mobilités » – Fédération de Recherche « hydrogène » du CNRS