Parité, un mot qui devient progressivement une réalité que tous les ministres du gouvernement français souhaitent mettre en oeuvre dans leur politique en commençant par Geneviève Fioraso, ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche.
Comment faire pour attirer plus de public féminin dans les filières scientifiques ?
On peut distinguer deux problèmes différents. D’une part, l’orientation est très sexuée. Les stéréotypes imprègnent notre société. Les filles se tournent trop peu vers les sciences et l’ingéniorat, les garçons sont rares en lettres. C’est injuste et inefficace : les potentiels s’expriment mal lorsque les vocations sont ainsi biaisées.La refondation de la formation des enseignants prendra en compte ces sujets. Celle, à venir, des dispositifs d’orientation entre le secondaire et le supérieur fera également. Mais il y a un deuxième sujet à ne pas négliger. Les femmes sont peu encouragées à exprimer leur ambition scolaire et sociale. Ceci conduit à ce que la supériorité scolaire des filles sur les garçons qui est très nette jusqu’au baccalauréat et dans les premières années qui suivent diminue au niveau des masters et des doctorats. Les étudiantes sont moins nombreuses dans les filières les plus sélectives et prestigieuses, alors qu’elles ont tout à fait les capacités d’yréussir. Ce plafond de verre est difficile à lever, car il touche à des habitudes de vie bien ancrées dans la société. C’est très tôt que les femmes intériorisent l’idée que si elles ne sont pas parfaites, alors mieux vaut pour elles ne pas tenter. Il y a des blocages culturels et de représentation des métiers dits « masculins » donc mais accessible et des blocages psychologiques qui empêchent les filles de se projeter dans une ambition professionnelle à la même hauteur que les garçons, à compétences égales. Le changement passera par l’exemplarité et le mentorat. Enfin, il y a une injustice dans le déroulé des carrières : au bout de 5 ans, à formation, compétences et postes égaux, avec l’apparition d’un enfant ou pas, les femmes ont moins de promotion que les hommes. C’est la raison pour laquelle je soutiens les initiatives de « femmes et sciences », le prix Irène Joliot- Curie ou l’accompagnement individuel proposé par l’association « capital fille ».
Les grandes écoles et les universités préparent-elles suffisamment les femmes à occuper des postes stratégiques en entreprise ?
Il a fallu rendre obligatoire la parité, en politique comme dans l’entreprise, pour avancer réellement. Et il reste du chemin à parcourir, dans tous les secteurs. Mais je suis raisonnablement optimiste. Des progrès ont été enregistrés mais la vigilance l’emporte et rien n’est jamais acquis. On avancera en mobilisant les trois instruments déjà cités : la norme, l’exemple et l’accompagnement individuel. J’entends aussi faire de l’égalité un axe du dialogue contractuel entre les établissements d’enseignement supérieur et le ministère.
Qu’attendez-vous des assises de l’enseignement supérieur en matière de parité, d’égalité des chances et de diversité ?
Je veux remercier Najat Vallaud-Belkacem d’avoir bien voulu venir en personne présenter la contribution de son ministère devant le comité de pilotage des Assises, dont le rapporteur n’est autre que Vincent Berger, en charge de l’égalité homme-femme à la Conférence des présidents d’universités. En parallèle, la CPU prépare avec la Conférence des écoles d’ingénieurs et celle des grandes écoles une charte commune, que j’espère contresigner avant même la tenue des Assises nationales. Ceci montre une convergence des volontarismes, en phase avec l’orientation du Président de la République, pour la justice sociale et l’égalité réelle. En 2013, je suis résolue à innover pour la parité. On révisera le gouvernement des universités, les modes de promotion et de déroulement de carrière et on déconstruira les stéréotypes dès l’entrée dans l’enseignement supérieur, pour changer la donne sans délai. Enfin, dans les nominations décidées par le MESR, je porte une attention particulière à l’équilibre hommes-femmes.
Patrick Simon