La recherche en Finance a été assez profondément influencée par l’évolution conjoncturelle récente, c’est-à-dire par la crise qui a frappé le monde entier à partir de la fin 2007. Des tendances, précédemment observées, se sont confirmées et des pistes nouvelles ont vu le jour.
La recherche sur la modélisation de la valeur des produits financiers, initiée depuis plusieurs décennies, se poursuit toujours à l’heure actuelle, mais des courants qui étaient perçus comme un peu secondaires, deviennent des axes centraux de recherche. Une prise en compte satisfaisante des événements dits « extrêmes » est aujourd’hui au cœur des débats et les modèles s’efforcent d’intégrer des processus de diffusion rendant compte des événements catastrophiques. Dans le même ordre d’esprit, des travaux sont entrepris en vue de modéliser la valeur dans le long terme des produits financiers, et notamment des produits de nature optionnelle, cette opposition entre le court et le long terme correspondant en partie à une opposition entre des évolutions sans rupture tendancielles et des évolutions avec sauts. La thématique de la gestion des risques et de leur couverture est elle aussi concernée par ces nouvelles voies de recherche.
La régulation financière est un deuxième axe aujourd’hui très présent dans les recherches académiques.
Elle peut prendre plusieurs formes. Par exemple, porter sur l’utilité et la fonction des agences de notation sur le marché des titres de créances : assurent-elles une réelle fonction de transmission aux investisseurs d’informations relatives au risque de crédit de l’émetteur ? Dans la négative, quelle a été jusqu’à présent leur utilité ? Quel rôle ont-elles joué dans la naissance et la diffusion de la crise des subprimes ? Le cas échéant, comment les réformer ? Mais la recherche s’exerce aussi en comptabilité des groupes puisqu’en retenant une image trop volatile des caractéristiques d’un groupe, la compta- bilité a sans doute contribué à inquiéter les marchés et à entretenir des anticipations baissières. Faut-il en conséquence revenir sur la norme IAS 39 qui préconise un enregistre- ment à la valeur de marché ? L’illiquidité des marchés est aussi une des caractéristiques des périodes de crise, et celle de 2007-08 n’a pas failli à cette règle. Des travaux visent à mieux connaître les déterminants de cette illiquidité et son impact sur le prix des produits financiers. Ces considérations amènent tout naturellement à s’interroger sur la micro-structure des marchés financiers et sur leur meilleure organisation possible. La mise en œuvre de Bâle III s’est aussi accompagnée de recherches spécifiques comme celles relatives au risque de modèle.
Les recherches en finance d’entreprise ont connu une évolution moins marquée. La structure bilantielle, et notamment la structure de financement, demeure un thème de recherche majeur. L’analyse de l’impact d’un amoindrissement des immobilisations physiques, par le biais de diverses opérations d’externalisation, sur la rentabilité et le risque des capitaux propres est aujourd’hui un sujet d’étude. Les déterminants de la politique de dividendes et son impact sur le cours des actions sont toujours des thèmes d’actualité, ainsi que l’examen des inefficiences de marché à l’occasion d’émission de produits financiers (augmentations de capital, intro- duction en bourse, …). Le gouvernement des entreprises demeure bien sûr une préoccupation des chercheurs.
La crise financière récente a ainsi induit une évolution des travaux de recherche en finance, ou plus exactement elle a accéléré le développement de travaux qui avaient été initiés préalablement.
Ph. Raimbourg
directeur du Master Ingénierie Financière
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne