L’évolution de la technologie et des techniques s’accompagne de l’évolution des compétences et donc des métiers. Certains disparaissent victimes d’une technologie obsolète, d’autres évoluent et d’autres encore apparaissent avec les mutations profondes de sociétés globalisées et de plus en plus technocratiques.
Si former à des métiers existants semble la mission première des établissements d’éducation, nous ne devons pas ignorer à quel point préparer à des métiers nouveaux doit faire partie de la mission des formations d’ingénieur.
Les évolutions de la technologie
En effet, quel que soit le secteur, les évolutions de la technologie, notamment de l’électronique et de l’informatique, ont profondément changé si ce n’est les métiers, tout du moins la façon de les exercer. De la conception à la fabrication d’un produit, la généralisation des outils numériques, l’automatisation des tâches, la diffusion de l’information ont transformé profondément les différents services des entreprises et les compétences requises pour y exercer les mêmes fonctions. Peuton parler de nouveaux métiers ?
Un exemple
Prenons par exemple l’attribution d’un nom à un véhicule produit par l’industrie automobile. Aux débuts, c’est le nom du chef d’entreprise qui naturellement fut porté par ses produits. Plus tard, lubie d’ingénieur, des appellations très techniques affublent les voitures de sigles obscurs où l’influence du marketing sera grandissante. Jusqu’à imposer des petits noms à nos voitures actuelles. Mais dans une économie mondialisée le nom d’un produit, ici une voiture, doit être international. Qui eut pu croire que des profondeurs des facultés on irait extirper linguistes, sociologues et philologues, doublés de compétences commerciales, pour qu’ils donnent des appellations pertinentes et non équivoques en une vingtaine de langues différentes ? Si la fonction demeure, les compétences requises ont tellement évolué qu’il serait possible de parler de nouveau métier. Partout, l’évolution des technologies et l’apparition d’objets nouveaux fait émerger des nouveaux métiers, y compris au niveau technique. Quelles compétences devra posséder un réparateur de lessiveuses à nano-robots capables de séparer les lipides des brins de laine au niveau microscopique ? Quels seront les modules de formation des éboueurs orbitaux quand il faudra nettoyer notre haute atmosphère pour permettre les vols ou les échanges spatiaux sans risque ?
Préparer aux nouveaux métiers c’est, bien entendu, être à l’écoute de l’évolution des technologies pour anticiper les mutations des compétences. La recherche joue là un rôle déterminant pour diffuser dans les formations les possibilités ouvertes pour l’avenir. Mais si la recherche permet d’approfondir les spécialités, une très large culture technique est aussi nécessaire pour entrevoir les apports interdisciplinaires. Sans oublier la méthodologie, qui passe par quelques fondamentaux. L’accès généralisé à l’information donne l’impression que chacun peut tout savoir de tout à tout moment, mais seuls ceux ayant réellement acquis l’information sont en mesure de produire de nouveaux savoirs, et de discriminer entre nouveauté et rediffusion. « Apprendre à apprendre », formule qui reste un fondamental de la formation à de nouveaux métiers, et qu’il faut interpréter comme un entraînement à la lecture, la mémorisation, l’assimilation tout au long de la vie, à la culture. L’accès à des outils de gestion et d’organisation pour toutes sortes d’activités donne aussi la fausse impression que l’acquisition de la méthodologie n’est plus aussi prégnante, mais ce serait illusoire de penser que les nouvelles innovations et les compétences- métier associées n’auront pas besoin de méthode pour voir le jour, se traduire en produits industriels et se faire fonctionnelles. Encore faut-il que ces fondamentaux, apprentissage et méthodologie, dépassent le cadre scolaire pour devenir fonctionnels et opérants, à travers de nouvelles méthodes pédagogiques notamment.
Luis Le Moyne Directeur de l’ISAT
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