Ilian Mihov, premier Doyen non-américain de l’INSEAD, a un profil atypique. Il a grandi dans l’ex-bloc soviétique, a étudié aux Etats-Unis, travaillé en France et vit depuis 12 ans à Singapour. Il fait confiance à la chance et surtout saisit chaque opportunité pour en tirer le meilleur.
Fils d’un ingénieur et d’une sagefemme, Ilian Mihov grandit en Bulgarie. Il fréquente un établissement anglophone de Sofia et y rencontre sa future épouse et son ami de toujours, Ivan Krastev. Pour ce dernier, Ilian Mihov se caractérise par son insatiable curiosité. « Il voulait toujours savoir le pourquoi des choses. C’est un génie en mathématiques. Il était l’un des meilleurs élèves de notre lycée. » Etudier dans un établissement anglophone est « l’occasion de lire autre chose que la presse officielle de ce qui était encore une dictature, raconte le Dean avec un sourire. Pour quelqu’un qui vient d’un petit pays, être exposé à l’international est essentiel. »
Entre chance
Il est reçu dans plusieurs universités à Moscou, Pékin et Belgrade. « Mon frère était à Moscou et ma mère m’incitait à le rejoindre. Ma femme qui est bien plus courageuse que moi avait postulé à un programme pour deux ans à l’Université de Caroline du Sud. A un an près, j’aurais été trop âgé pour en bénéficier. Je pense que la chance compte dans la vie. » Il étudie à la Moore School of Business dont il recevra en 2006 le prix du plus éminent jeune ancien.
Et détermination
« L’un de mes professeurs m’a incité à étudier la finance et à postuler pour un PhD à Princeton. Je ne l’aurais jamais fait sans cela. » Il a néanmoins failli ne jamais rejoindre la prestigieuse université faute des 50$ nécessaires pour les frais de dossier. La veille de la date limite, il tente sa chance et appelle Princeton. Il apprend qu’il peut joindre une lettre expliquant sa situation financière à sa candidature. « Il faut chercher et saisir toutes les opportunités et surtout être ouvert ! J’ai ainsi fait l’inverse de ce qu’on nous recommandait à Princeton : ne pas intégrer une business school, ne pas faire de recherche et rester aux Etats-Unis là où se fait la « vraie économie ». » « Il est convaincu que l’on peut tout faire si l’on y croit ! » confirme son ami Ivan Krastev. Son professeur qui allait devenir le patron de la Réserve Fédérale, Ben Bernanke, ne s’y est pas trompé en le prenant comme assistant de recherche. « Lorsque j’ai dû écrire mon premier papier, il m’a demandé de lui présenter 5 idées. Je suis arrivé dans son bureau fier d’avoir une liste de 11 sujets. Il les a réfutés un à un jusqu’au 11e qu’il a enfin trouvé bon ! » Il écrira 4 autres papiers avec son mentor et deviendra un expert des politiques monétaires et fiscales.
Quand le destin se transforme en opportunités
En 1996, il choisit l’INSEAD, qu’il ne connait pas du tout, pour débuter sa carrière. « L’INSEAD m’avait écrit avant le forum annuel de recrutement des business schools mondiales, je croyais que c’était l’INSEE…» Ilian Mihov craint qu’intégrer une business school ne l’éloigne de la dimension académique. Le Dean de l’époque le convainc alors qu’il est en train de développer la dimension recherche.
Vocation académique
A l’été 2001, au moment de partir pour 6 mois à Princeton, un problème de visa retarde son départ pour New York au 11 septembre. « J’étais dans un avion au dessus de l’Atlantique au moment des attentats. Cet évènement a changé la suite de nos vies. » La famille Mihov prend la direction de Singapour. 12 ans après ils y sont toujours. « La manière dont il prépare ses cours et prend plaisir à enseigner témoigne de ce qui à ses yeux est le plus important dans la vie : éduquer les gens, raconte Ivan Krastev. Lorsque nous étions adolescents, il était déjà évident qu’il avait la vocation du professorat. » Son amie le Dr. Shirin Jacob qui a donné naissance à sa seconde fille se dit être « une grande fan d’Ilian ! Son haut niveau intellectuel le dispute à sa loyauté et à son humilité. Ce qui compte pour lui, c’est le travail. Il est doté d’un charisme inné, or, nous avons tous besoin de personnes qui nous montrent la voie, nous permettent de progresser. » Sa première réaction lorsqu’on lui propose de se présenter pour le poste de Dean est de refuser. « L’activité académique est beaucoup plus facile que le management ! » C’est sa loyauté envers l’INSEAD qui le décidera. Il s’emploie depuis à la développer mais anticipe avec joie son retour devant les étudiants. Un plaisir qu’ils lui rendent bien : il a été nommé 3 fois professeur d’exception de l’INSEAD et une de ses classes a composé une chanson en son honneur, la Mihovian Rhapsody :
https://www.youtube.com/watch? v=G9d0XpwDU_g
A. D-F