Enquête sur les femmes et le pouvoir en entreprise

spécial Président(e)s

 

Le titre de mon étude est révélateur des problématiques posées : « Femmes et pouvoir. Tabou ou nouveau modèle de leadership ? »  Les femmes ont elles une approche particulière du pouvoir ? Comment s’en emparent-elles ? Comment l’exercent-elles ?… Les réponses apportées lors des entretiens ont complété les travaux académiques et éclairé notre sujet. Viviane de Beaufort, Professeur à l’ESSEC Business School

 

A l’origine
Ayant constaté qu’en matière de leadership féminin, les femmes employaient le terme de « gouvernance » sans jamais utiliser celui de « pouvoir », j’ai tenté un état de l’art sur la question. Hélas bien peu d’éléments et surtout d’origine anglo-saxonne. J’ai alors choisi de mener une enquête qualitative par le biais d’une cinquantaine d’entretiens la moitié en France et le reste à travers le monde. Etant juriste, j’ai souhaité préparer le questionnement avec une psychoclinicienne, professeure à l’ESSEC ; le cabinet Boyden Global m’apporte son aide sur le terrain.

 

« Les femmes françaises à la quête de sens plus que de promotion ? »
Elles affirment ne pas avoir construit leur carrière de manière délibérée, leurs choix de poste relevant davantage de l’intérêt d’une mission, voire de la perspective de participer à quelque chose d’utile. Dans la nouvelle génération, les femmes renoncent à des postes plus lucratifs pour investir des fonctions qui les intéressent particulièrement au risque d’avoir une trajectoire plus aléatoire. Les anglo-saxonnes s’affirment sans complexes plus carriéristes.

 

De l’utilité des quotas ?
Le quota doit être considéré comme un outil parmi d’autres. Si en France, les femmes sont favorables aux quotas, dans les anciens pays socialistes où la structure de la société était assez égalitaire, elles considèrent qu’ils ne sont pas nécessaires. Tout est question de contexte.

 

Question de pouvoir
Le pouvoir isole ; ce ressenti est très fort, au point de les faire parfois renoncer à grimper au sommet. D’autres, ayant ressenti d’abord un certain mal-être, trop rares dans ce modèle masculin, arrivent à l’apprivoiser, une fois rassurées sur leurs compétences et leur légitimité ; elles tentent alors le besoin d’exercer le pouvoir sur un mode plus collectif et en restant elles-mêmes.

Si, face à un conflit de pouvoir, l’homme l’assume plus formellement, les femmes tentent de contourner l’obstacle, d’obtenir une médiation. Nuance cependant du coté des anglo-saxonnes qui perçoivent les conflits comme un jeu normal de pouvoir et de contre-pouvoir qui permet la discussion du fait du système de gouvernance sophistiqué qui prédomine et encore pour les femmes dans les pays émergents où il faut résister à un pouvoir encore vertical.

 

« En France, le mode
de pouvoir malgré
les progrès demeure vertical en entreprise, c’est pire en  politique d’ailleurs. »

Ethique, courage et sixième sens
Entre autres spécificités, les femmes pensent qu’elles se prennent moins au sérieux que leurs homologues masculins, acceptent plus facilement la contradiction. Toutes semblent  attachées aux valeurs, à l’éthique et ont du courage pour « monter au créneau ». Elles acceptent moins « les petits arrangements entre amis ». Elles s’estiment aussi plus sérieuses, finalisant mieux leurs dossiers. Etant plus dans l’émotion et le feeling, elles s’autorisent un mode de pensée qui intègre l’intuition.

 

L’avenir de l’homme !
La littérature ressources humaines évoque cet an-ci un mode de leadership idéal qui combinerait le quotient « féminin » (A.Arcier) et les valeurs « masculines ». Si l’on est encore loin du compte, les évolutions sont en marche et les qualités dites féminines sont mieux adaptées aux nouveaux défis de l’entreprise dans un monde où changement et innovation sont de mise : le handicap peut devenir un atout.

 

« La génération « Y » est en train de se réinventer un avenir. »
J’adore la nouvelle génération « Y » ; ils sont innovants, courageux, cherchent du sens et n’hésitent pas à partir à l’étranger. Ils bousculent le système, garçons et filles confondus. Face à une possible résistance de la gent masculine au pouvoir, ces interpellations pour un changement des femmes et des « Y » doit s’accompagner d’un travail de pédagogie et de sensibilisation pour aider femmes et hommes à travailler ensemble.

 

En savoir plus :
https://sites.google.com/a/essec.edu/viviane-de-beaufort/engagement-women/leadership-au-feminin

 

Patrick Simon