Trouver un travail qui a du sens ! Oui mais pourquoi ?
Trouver un travail qui a du sens ! Oui mais pourquoi ? Crédit Unsplash

Dis-moi, c’est quoi un travail qui a du sens ?

Que sait-on du travail ? Cette question, ils sont plusieurs chercheurs à se l’être posée en 2023 à l’occasion du projet de réforme des retraites dans le cadre d’un projet porté par le Laboratoire interdisciplinaire d’évaluation des politiques publiques de Sciences Parmi eux, Bruno Palier, directeur de recherche du CNRS à Sciences Po, nous éclaire sur la question du sens au travail.

Comment vous est venue l’idée de cet ouvrage : Que sait-on du travail ?

Bruno Palier : Pendant la réforme des retraites de 2023, nous avons voulu comprendre pourquoi les Français ne voulaient pas travailler plus longtemps. Il en ressort que les conditions de travail se sont fortement dégradées en 30 ans. En France, le travail est souvent perçu comme un coût que les entreprises veulent à tout prix réduire en délocalisant, en ayant recours à la sous-traitance et en réduisant les effectifs. Résultat : ceux qui restent doivent faire plus, ce qui dégrade la qualité et les conditions de travail.

Quels critères permettent de mesurer le sens du travail ?

Cela se résume à ne pas se sentir écouté ni reconnu. Le management vertical offre peu de possibilité aux salariés de s’exprimer. Le management par les chiffres impose une pression mal vécue. De plus, ceux qui prescrivent le travail travaillent de moins en moins sur les lieux de production et sont donc éloignés des réalités du terrain. Conséquence de quoi les salariés se sentent de plus en plus désappropriés de leur travail et ne savent plus pourquoi ils bossent. Le travail a un sens lorsqu’on a le sentiment d’être utile et d’avoir les moyens pour effectuer les tâches qui en découlent.

Quelles sont les conséquences de la perte de sens ?


On retrouve en premier lieu l’absentéisme. Le risque dépressif est multiplié par deux en cas de perte de sens du travail et la volonté s’accroît de partir en retraite le plus tôt possible. On retrouve aussi le vote pour l’extrême droite car il y a un lien très fort entre l’absence de reconnaissance au travail et le sentiment de ne pas être entendu dans l’espace public, sauf par les partis qui prétendent représenter « ceux qui travaillent dur ».

Quels sont les métiers les plus riches de sens ?

Un travail a du sens lorsqu’il permet de se sentir utile comme c’est le cas par exemple dans les métiers de la santé, de la logistique, du commerce, du soin ou de la construction. Mais pour cela, il faut avant tout avoir les moyens de bien faire son travail.

Est-ce que le niveau de diplôme a un lien avec le sens du travail ?

Le sens du travail n’a pas toujours de lien avec le niveau de diplôme. Preuve en est, dans les métiers les plus démunis de sens, on trouve notamment les cadres de la banque et des assurances.

Est-ce que le niveau de salaire a un impact sur le sens du travail ?

Oui, mais cela n’est pas suffisant. Il est nécessaire de se sentir utile, d’avoir les moyens de bien faire son travail, et d’être reconnu pour les tâches accomplies.

Comment redonner du sens au travail ?

Nous sommes en train d’établir un recueil de propositions dans le cadre d’un vaste projet intitulé “Travailler mieux”. Il faut redonner la parole aux salariés en organisant une fois par mois une réunion où ils peuvent parler des conditions et de l’organisation de leur travail et faire remonter les problèmes à la direction qui devra y répondre. Il est essentiel de remettre de la démocratie au travail et d’opter pour un management de proximité pour avoir un meilleur impact sur l’organisation du travail. On redonne du sens au travail en désintensifiant la production, en organisant mieux le travail et en accordant plus d’écoute et plus d’horizontalité dans le management.

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