compte rendu de la confÉRENCE TREMPLIN – CDMGEU 2013
L’association Tremplin – Etudes, Handicap, Entreprises est partenaire du Challenge du « monde des Grandes Ecoles et des Université s ». Pour l’édition 2013, son directeur Christian Grapin a réuni des responsables d’entreprises et d’établissements d’enseignement supérieur en charge du handicap ainsi que des étudiants handicapés pour une table ronde. Au cours d’un débat réflexions d’une heure trente, ils ont échangé sur le thème « Entreprise et enseignement supérieur, agir ensemble pour les étudiants handicapés ». Ils ont montré de belles réussites personnelles et institutionnelles, sans naïveté , parlant aussi des freins et préjugés persistants dans la société et de l’importance de favoriser les rencontres entre entreprises et étudiants handicapés.
Agir ensemble !
Christian Grapin oeuvre à l’intégration dans les études et le travail de jeunes handicapés avec le soutien de plus de 200 entreprises. Ces moments d’échanges sont pour lui un levier pour répondre à la nécessité d’agir ensemble dans le domaine du handicap. « Depuis 21 ans, c’est ensemble, avec des entreprises et des établissements, que nous accompagnons des lycéens et étudiants pour leur permettre de mener leurs études le plus loin possible. » Car le problème majeur de l’emploi des personnes handicapées est leur manque de qualification, la non-concordance entre leurs compétences et les besoins des recruteurs. « Grâce aux entreprises, les jeunes que nous suivons peuvent engranger de l’expérience au travers de stages ou de l’alternance. » Au cours du débat, Christian Grapin souhaitait aussi poser la question du rôle de l’enseignement supérieur dans l’établissement de ce lien entre entreprises et étudiants.
Une nécessaire montée en compétences
Astrid Perdrix est coordinatrice nationale de l’accord handicap chez Schneider Electric, le 9e du genre dans le groupe. « Il indique notre engagement à mener des actions en faveur des personnes handicapées pour le recrutement, le maintien dans l’emploi, l’accessibilité, la formation et la sensibilisation. » Un champ de l’accord cible les jeunes pendant leurs études. « Ce que nous mettons en place dans l’entreprise doit aussi se traduire dans le supérieur, a insisté Astrid Perdrix. Car nous recrutons avant tout les compétences dont nous avons besoin. » Afin de créer les synergies nécessaires pour former les professionnels que les recruteurs recherchent, des partenariats ont été noués entre établissements de formation et entreprises.
Toucher du doigt la réalité professionnelle pour bien s’orienter
Disneyland Paris en est à son 7e accord d’entreprise et a créé une mission handicap dès 1993. L’entreprise aux 500 métiers axe sa politique sur le recrutement, l’insertion de publics éloignés de l’emploi, la collaboration avec le secteur protégé. « Notre objectif est de recruter plus de personnes handicapées, a expliqué Marie-Françoise Arrighi, chargée de mission recrutement handicap et maintien dans l’emploi. Notre enjeu étant de trouver des personnes formées à nos métiers. » Pour entrer en contact avec des étudiants, l’entreprise collabore avec Tremplin, avec la Fédéeh (Fédération Étudiante pour une Dynamique Études et Emploi avec un Handicap). Disneyland Paris accueille aussi des adolescents dans l’entreprise pour leur faire découvrir ses métiers. « Toucher du doigt la réalité professionnelle est essentiel, a insisté Marie-Françoise Arrighi, pour choisir son orientation, cibler un métier compatible avec son handicap. Nous sommes aussi là pour dire ce qui est possible… ou pas. » Cette découverte doit être proposée aux étudiants au travers de partenariats entre établissements et entreprises. « Les jeunes qui viennent en stage ou alternance sont les meilleurs ambassadeurs du handicap dans une entreprise, ils montrent à nos salariés et managers que c’est possible ! »
Stages et alternance pour vivre l’entreprise et y trouver sa place
« Le handicap est une réalité chez GDF SUEZ avec 3 000 salariés en situation de handicap en France », a tenu à affirmer Bernard Navas, chargé de mission handicap. Chaque entreprise du Groupe a son accord collectif. Dans tous les cas, il y a des objectifs de recrutements, comprenant « Il est important de proposer des parcours, de ne pas cantonner les salariés handicapés à certains postes, a insisté Bernard Navas. Or, la capacité à évoluer est aussi liée à la qualification. » Le Groupe déploie une politique spécifique en direction des étudiants. Il communique sur son engagement au travers des actions du service marque employeur auprès des établissements et étudiants. « L’idée est de leur faire savoir que nous avons une volonté et une expertise pour l’intégration des personnes handicapées. Nous voulons aussi les aider dans la poursuite de leurs études, les accueillir en stage et en alternance afin qu’ils vivent l’entreprise et y trouvent leur place. L’intégration de jeunes handicapés pâtit de deux mondes qui ne se rencontrent pas. »
Partenariats ciblés
La signature de chartes handicap par la CPU et la CGE en 2007 a témoigné d’une prise de conscience de la nécessité de créer des liens avec l’entreprise au profit des étudiants handicapés. « Depuis 5 ans de nombreuses actions ont été engagées pour accompagner et mettre des jeunes en relation avec des acteurs économiques, et sensibiliser l’ensemble des personnels et élèves » illustre Sarah Richard pour l’EM Strasbourg dont elle est la chargée de mission handicap. Nous avons des partenariats avec des entreprises ciblés sur le handicap, nous organisons des évènements ensemble et avec Tremplin et Hanploi. »
Se former pour un métier
Pour Patrick Courilleau, chargé de mission handicap et enseignant-chercheur à l’université de Cergy Pontoise, la difficulté est de penser et construire un parcours depuis le lycée jusqu’à l’intégration professionnelle. « C’est pourquoi nous devons avancer sur le volet lien entre les étudiants handicapés et le tissu recherche ou sensibilisation. Il est anormal de former quelqu’un sans savoir vers quel métier il va aller ! » L’université a créé un réseau d’entreprises handi-engagées à Cergy pour accueillir ses étudiants. Elle est aussi depuis un an invitée par la région à participer à ses réflexions pour développer une vision globale du handicap. « Nous devons travailler main dans la main avec les entreprises pour mener des actions de découverte des métiers dès le lycée. Cela permettra aux jeunes de fonder un projet d’orientation et de formation. »
Rachel Ortholan, acheteur hors projet chez Technip, elle a fait ses études en alternance
L’alternance une voie royale pour définir son projet
Quel a été votre parcours d’études ?
J’ai étudié en université et en école de commerce. J’ai opté pour l’alternance car je souhaitais allier théorie et pratique, mieux appréhender des missions intéressantes et de créer un lien avec l’entreprise. J’ai testé différents univers professionnels, plusieurs entreprises, j’ai pu considérer l’impact de mes missions.
Quels ont été les apports de l’alternance pour vous ?
Elle m’a aidé dans mon orientation professionnelle, pour cibler un métier compatible avec mon handicap, et surtout me plaisant. Il est crucial d’aller au contact des professionnels durant ses études, de leur poser des questions, de mener l’enquête pour son avenir !
Sami El Guedarri, champion de natation paralympique, diplômé d’un master Staps
Il faut poursuivre les efforts
Comment avez-vous envisagé votre orientation durant vos études ?
A l’université – de Valence puis de Montpellier – nous avons créé un référentiel adapté à mes contraintes. J’ai néanmoins manqué de contacts avec les entreprises, et mes stages m’ont peu apporté car j’étais cantonné à un rôle limité ou d’observation. Cela m’a pénalisé dans la construction de mon projet. Ce manque de lien a eu une incidence sur ma méconnaissance des métiers auxquels je pouvais prétendre. Le handicap exacerbe ces difficultés. De grands changements se sont tout de même opérés dans les entreprises depuis 10 ans concernant l’intégration des personnes handicapées. Lors des Jeux Paralympiques 2012, Nestlé m’a soutenu et j’ai pu constater que l’entreprise a une réelle politique d’accueil.
Les liens avec les entreprises se développent-ils assez selon vous ?
Malheureusement on a fait le chemin en sens inverse : en imposant par la loi de 2005 aux entreprises d’augmenter leurs taux de salariés handicapés alors que les jeunes en formation dans le supérieur ne sont pas assez nombreux ! Les entreprises se sont heurtées au manque de qualification des personnes qu’elles étaient censées recruter. En outre, les mentalités n’évoluent pas aussi vite que le fait d’imposer par la loi. Je pense que le lien entre jeunes et entreprises pourrait se faire mieux via les établissements en plaçant le métier au coeur d’un projet partagé. Car pour être compétent et recruté, il faut suivre un cursus adapté aux besoins des entreprises !
Augustin Deney, étudiant en alternance à Sciences Po et chez Schneider Electric
L’entreprise a encore du mal à faire confiance à un jeune handicapé qualifié
Comment avez-vous rencontré Schneider Electric ?
Une interview de moi réalisée par le Journal des Grandes Ecoles & des Universités est aarrivée sur le bureau d’un responsable qui m’a contacté ! J’ai pu évoquer mon handicap durant les entretiens sans difficulté. La mission handicap a pris contact lorsque j’ai intégré l’entreprise.
Avez-vous indiqué votre handicap sur votre CV ?
J’ai choisi de ne pas le faire. Car il existe une peur irrationnelle du manager à recruter un handicapé. J’ai beau avoir une formation de haut niveau, de l’expérience, qui témoignent de ma capacité à travailler sur de gros et complexes dossiers, expliquer que grâce aux outils informatique je compense mon handicap visuel, on me pose des questions révélant un manque de confiance en mes capacités. Avoir un accord d’entreprise ne signifie pas que les mentalités ont évolué, que les préjugés sont tombés.
A. D-F