Mounah est diplômé Audencia Grande Ecole 2017. Aujourd’hui Senior Data Consultant chez Artefact, il a fait de son bégaiement, reconnu comme un handicap, une force, et aide aujourd’hui des dizaines de bègues. Il a notamment créé en 2019 le concours d’éloquence du Bégaiement. Pour que leurs voix puissent s’exprimer et se faire entendre !
A quelles difficultés vous êtes-vous retrouvé confronté pour intégrer une école de commerce ?
J’ai vécu des moments difficiles. En classe préparatoire, on sanctionnait parfois mon bégaiement très durement. On a même refusé de me noter pour cette raison.
J’ai appris que je pouvais bénéficier d’un tiers temps supplémentaire pour le concours seulement 6 mois avant, car je suis bègue et dysgraphique. A une épreuve orale, une professeure d’espagnol m’a par exemple mis un 12,5/20 tout en m’indiquant que j’avais un excellent niveau, mais qu’elle ne pouvait pas me mettre la note que celui-ci mériterait car j’avais pu dire moins de choses que d’autres.
Avez-vous le sentiment d’avoir été accompagné afin que vos études se déroulent au mieux ?
Il y a 10 ans que j’ai entamé mes études supérieures. A l’époque, la prise en compte des handicaps était beaucoup moins formalisée, moins claire. Je n’ai pas spécialement cherché à bénéficier d’aménagements, car je n’avais pas conscience qu’il y avait un accompagnement possible. Soit on se laisse abattre devant les difficultés, soit on se bat. Mon handicap a alimenté ma motivation. Je me suis dépassé. J’ai galéré plus que les autres pour trouver mes stages, etc…, mais tout ça a forgé mon caractère.
Comment avez-vous perçu la relation au handicap au sein de la promotion ?
J’étais très bien intégré et je faisais partie de 4 associations. On m’appréciait pour qui j’étais. Les étudiants me respectaient beaucoup, car je gérais avec beaucoup de courage. En février 2014, six mois après la rentrée à Audencia, j’ai surmonté ma plus grande peur en participant au concours d’éloquence, Eloquencia. J’étais terrifié. J’ai réussi grâce au soutien de mes camarades. Après ça, j’ai reçu beaucoup de témoignages de gens qui soulignaient mon courage. Cette expérience a été un tournant : à partir de là, j’ai beaucoup mieux accepté mon bégaiement.
Selon vous, comment les écoles pourraient améliorer leur prise en charge des élèves porteurs de handicap ?
La priorité, c’est d’améliorer l’information, dès la réunion de rentrée, par mail, via des retours d’étudiants, des professeurs, etc. Il est important que ces élèves soient reçus et qu’on leur explique de quel accompagnement ils peuvent bénéficier.
Je pense aussi que l’administration a tout intérêt à s’associer avec l’association handicap de l’université ou de l’école, ou même extérieure : les étudiants peuvent être acteurs pour leurs camarades concernés.
Pour aider les milieux éducatifs et professionnels à accompagner les personnes bégues comme moi, j’ai justement créé la plateforme gratuite en ligne Handicapossible. Elle met à disposition des guides avec des conseils clés pour intégrer les spécificités de chaque handicap (dyslexie, bégaiement, surdité, etc…). L’objectif, c’est de prendre conscience que recruter une personne porteuse de handicap, c’est apporter beaucoup de richesse à l’entreprise.
Fort de mon expérience, j’ai aussi créé l’Eloquence du Bégaiement dans l’association Parole Bégaiement. Pour la deuxième édition, la Secrétaire d’Etat au Handicap était présente ainsi que le PDG de Doctolib. Notre 3e édition a lieu le 23 novembre, dans la soirée au Théâtre Bobino. Nous avons une équipe d’une quinzaine de personnes, qui accompagne les participants pendant plusieurs semaines jusqu’à l’événement selon notre propre méthode, qui mélange formations, coaching, et ateliers pratiques. Les participants en ressortent souvent transformés, plus épanouis.
Un dernier conseil que vous souhaiteriez donner aux élèves porteurs de handicap ?
Informez-vous, et n’ayez pas peur d’exprimer votre vulnérabilité ! C’est votre force et votre richesse !
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