Ingénieur général des Mines, DRH du Corps des Mines : Mines Paris-PSL n’est pas une institution inconnue pour Godefroy Beauvallet, qui en a pris la direction générale en août 2024. Il revient sur les piliers de sa feuille de route.
Quels sont les sentiments qui ont dominé le jour de votre nomination ?
De la fierté et de l’humilité d’abord, car c’est une marque qui incarne la figure de « l’ingénieur à la française », qui s’inscrit dans une longue histoire et dans un collectif de taille. J’ai aussi été heureux de renouer avec la formation de la génération montante en France, un pays qui se caractérise par un pacte social particulier noué avec sa jeunesse.
Quels sont les principaux axes de votre feuille de route ?
Je parlerais d’abord de la formation. Mines Paris-PSL veut former des ingénieurs de l’innovation, mais aussi des ingénieurs de la protection. Dans un monde en pleine transitions écologiques, numériques, énergétiques, nous avons en effet besoin d’ingénieurs portant un certain optimisme technologique, mais aussi la volonté de préserver les systèmes naturels et techniques, de les faire durer longtemps et même parfois d’en reconquérir la compréhension. D’ailleurs, nos élèves le revendiquent : ils ne veulent pas faire partie des problèmes du monde de demain, ils veulent y apporter des solutions. C’est une dimension à laquelle je suis très sensible et sur laquelle je veux que nous allions plus loin.
La recherche est aussi bien sûr au cœur de ma feuille de route. D’autant qu’aux Mines, elle se caractérise par son double impact : impact lié à sa qualité et son excellence académique bien sûr, mais aussi à sa pertinence économique, sociale et sociétale. De fait, elle est la pleine incarnation de ce que doit être l’ingénierie : la mise en correspondance des enjeux du vrai monde avec un ensemble de solutions relevant de la science, du design, de la conviction. Ici, on ne forme pas des problem solvers mais des gens qui savent formuler les problèmes. D’où l’importance de poursuivre et de vivifier notre recherche au regard des problématiques actuelles de réindustrialisation, mais aussi de souveraineté, de sécurité et de défense notamment.
Et PSL ?
C’est notre université de référence et nous participons au développement d’objets permettant à nos communautés de circuler. Je citerais par exemple nos parcours croisés avec l’ESPCI Paris-PSL, les CPES, le programme ENAMOMA avec l’Université Paris Dauphine – PSL et l’École des Arts Décoratifs, la vie étudiante, le centre de langues mutualisé etc. Nous souhaitons aussi lui apporter notre expérience en matière de recherche partenariale, qui permet de réussir de beaux projets au contact des entreprises, sans abandonner sa liberté académique. C’est notamment le cas de notre chaire industrielle TwinHeat, qui propose d’utiliser des jumeaux numériques couplés à l’IA pour optimiser les fours de l’industrie verrière, parfois très polluants.
La France a besoin d’une communauté d’ingénieurs plus grande et plus diversifiée. Quelles sont vos actions en ce sens ?
Sur l’aspect volume, nous avons augmenté nos promotions (même si, eu égard à notre taille, nous restons des artisans de la formation), nous ouvrons un campus à Versailles, nous créons un nouveau bâtiment sur notre campus en plein Paris : le dossier bâtimentaire et campus est et doit rester important. Sur l’aspect diversité, nous accueillons 24 % de femmes sur le cycle ingénieur et 40 % dans le doctorat. Cela reste insuffisant bien sûr, mais ces taux sont supérieurs à ceux des viviers dans lesquels nous recrutons. Nous espérons que notre mise en avant de la figure de l’ingénieur de la protection appelle dans nos rangs des jeunes femmes (et hommes) qui ne se reconnaissent pas encore dans les codes de l’ingénierie tels qu’ils sont perçus aujourd’hui. Je citerais enfin le programme Talents du service public, auquel je suis très attaché. Celui-ci permet à de jeunes boursiers méritants, issus d’écoles partenaires (IMT, INSA, UTC notamment), intéressés par la chose publique, de passer un concours pour obtenir un double diplôme à l’Ecole des Mines et de préparer les concours des grands Corps d’Etat. Un programme ambitieux qui permet à la fois de lutter contre l’autocensure face aux concours et de diversifier la haute fonction publique. Ce type de programme existe déjà dans d’autres établissements du Supérieur, mais nous en sommes les pionniers au sein des écoles d’ingénieurs.