Chef du département Stratégie et Entrepreneuriat de l’EM Normandie, Nizar Ghamgui prend la parole sur un sujet on ne peut plus actuel et insiste : « Sortons du mythe de la startup-nation, l’entrepreneuriat est bien plus vaste ! » Découvrez sa tribune.

Depuis quelques années, le discours dominant glorifie un entrepreneuriat spectaculaire, celui des start-ups technologiques, des levées de fonds à plusieurs millions et des licornes promises à conquérir le monde. Cette vision, omniprésente dans les médias et les politiques publiques, fausse la perception de la réalité entrepreneuriale. En effet, la majorité des entrepreneurs ne correspondent pas à ce modèle, mais participent tout autant à la vitalité économique et sociale du pays.

Une réalité bien plus diversifiée

Contrairement aux idées reçues, environ 90 % des entreprises créées ne sont pas des start-ups technologiques, mais des PME, TPE et travailleurs indépendants qui innovent autrement. Parmi eux, des acteurs souvent invisibilisés : les femmes entrepreneures (33,1 % en 2025, un chiffre en hausse mais loin de la parité), les seniors en reconversion (38 % des candidats à l’entrepreneuriat, avec des taux de succès élevés grâce à leur expérience et leur réseau), les entrepreneurs en situation de handicap, confrontés à des défis d’accessibilité, et ceux issus de milieux défavorisés, qui surmontent des obstacles financiers avec résilience. Pourquoi ces profils restent-ils dans l’ombre ? Parce qu’ils ne correspondent pas au mythe de la « Start-up Nation » : pas de levées de fonds spectaculaires ni de croissance fulgurante. Pourtant, ils innovent autrement : en développant des modèles alternatifs (ESS), en dynamisant les territoires et en proposant des services essentiels à la cohésion sociale.

Les grandes écoles et les universités doivent faire plus !

Les grandes écoles et leurs incubateurs jouent un rôle crucial dans l’accompagnement des entrepreneurs, mais doivent aller plus loin. Acteurs majeurs de l’écosystème, elles ont les ressources pour soutenir une variété d’initiatives. Pourtant, elles privilégient souvent les succès des start-ups technologiques, laissant dans l’ombre d’autres formes d’entrepreneuriat tout aussi essentielles. L’entrepreneuriat social, territorial, artisanal ou de reprise d’entreprise doit être valorisé. Les grandes écoles et universités doivent promouvoir une vision plus inclusive et adapter leurs dispositifs pour accompagner TOUS les entrepreneurs, pas seulement ceux en quête de levées de fonds.

Vers une vision plus inclusive de l’entrepreneuriat

Il est temps de changer de regard sur l’entrepreneuriat. Valoriser ces entrepreneurs sous-représentés, c’est bâtir une économie plus juste, durable et résiliente. L’innovation ne se limite pas aux levées de fonds, mais à son impact réel sur la société. Plutôt que de mythifier la « Start-up Nation », donnons enfin leur place à ceux qui façonnent, au quotidien, l’économie de demain, ancrée dans les territoires et les besoins de chacun.