Pour beaucoup Polytechnique rime avec pouvoir. Pour son président Jacques Biot, plus que de pouvoir, il s’agit de former des cadres de haut niveau aptes à apporter une contribution majeure à leur pays et portés par des valeurs généreuses.
Comment concevez-vous la notion de pouvoir à l’X ?
Bernard Esambert qualifie les X d’officiers de la guerre économique et François Cornut-Gentille évoque des forces spéciales de la mondialisation. Cela correspond à notre ambition de formation et à la vocation de nos diplômés en accord avec les valeurs qui animent la communauté.
Dans quel esprit les formez-vous donc ?
Pour leur majorité nos élèves n’ont jamais échoué ni réellement opéré de choix. Dès leur arrivée, nous travaillons sur l’écoute, le respect mutuel, l’acceptation de l’échec, la collaboration, le partage ; des postures importantes à l’heure où le pouvoir s’exerce de moins en moins hiérarchiquement.
Par quelle formation cela s’acquiert-il ?
Le cursus débute par la formation humaine et militaire, un tiers des élèves la réalisent dans le civil, deux tiers dans l’armée. Au sein du cursus académique, au-delà d’une formation pluridisciplinaire extrêmement solide en sciences, nous mettons une emphase sur les humanités et les sciences sociales, la philosophie. Nous formons au doute, à la réflexion avant l’action, des profils rationnels, rigoureux, à la recherche d’impact et d’efficacité. Cet esprit est nécessaire pour identifier des alternatives, pour décider. Leur compréhension des choses est en outre alimentée par les derniers résultats de recherche de nos laboratoires.
Et le management ?
La création d’un département de management de l’innovation et de l’entrepreneuriat témoigne de notre évolution dans ces enseignements tout comme dans notre approche de l’économie. Hier nous étions centrés sur l’économétrie, désormais les cours sont plus pratiques, appliqués. Nos élèves travaillent aussi en groupe sur des projets durant tout leur cursus. Nos jeunes X savent aborder les questions pratiques, apporter des solutions concrètes, s’adapter et gérer le collectif !
Comment former des hommes et des femmes de pouvoir aux enjeux du 21e siècle ?
Notre cursus aborde les grands enjeux économiques, climatiques, sanitaires, sécuritaires, etc. liés aux domaines dans lesquels des polytechniciens peuvent avoir une prise et donc un impact. Les technologies seront leur outil privilégié pour répondre à ces défis. Nous promouvons l’approche par les technologies de rupture. Celle-là même que déploient nos enseignants-chercheurs dans leurs travaux sur des thématiques pluridisciplinaires.
Les jeunes X sont-ils prêts à prendre le pouvoir ?
Je suis frappé par leur ambition de changer les choses, leur manière généreuse de prendre le pouvoir. Ils fonctionnent en réseau, collectivement. Ils montrent un réel intérêt pour la politique, le débat. Ils s’inscrivent dans une évolution des modèles économiques qui dilue le pouvoir. Je les qualifierais de smarts et généreux dans leur manière d’envisager leur future contribution à l’économie et au pays. Ils montrent un vrai sens de l’intérêt collectif par exemple dans le service civil, dans leurs binets dédiés aux autres. Ils se montrent enfin passionnés dans leurs engagements.
Le polytechnicien de pouvoir idéal selon Jacques Biot : Dans un monde très évolutif, incertain, les gens ont besoin d’une vision. Elle ne s’impose pas que par la voie hiérarchique. Notre mission est donc de former des personnes dotées d’une vision, capables d’entraîner, de mobiliser, de produire un discours clair, qui tiennent compte de toutes les parties prenantes ; des gens qui partagent et dégagent une forme de joie. Les rôles modèles de ce type d’X sont nombreux à l’instar de Xavier Huillard ou Isabelle Kocher.