Enquête étudiants de l’X sur la sous-représentation des filles dans les filières scientifiques
Six étudiants de l’Ecole polytechnique ont réalisé une étude sur la sous-représentation des filles à l’X. Elle nous donne plus généralement des pistes sur le pourquoi du déficit d’orientation des filles vers les filières sélectives scientifiques. Le projet intitulé Mixité à l’X a été réalisé en 2011 a été mené par Maël Buron, Alexandra Cosseron, Karina Cucchi, Xiaoxiao Ding, Valentin Somma et Mylène Dupas qui a répondu à nos questions.
Dans quel contexte avez-vous réalisé cette enquête ?
Nous l’avons réalisée dans le cadre de notre PSC (projet scientifique collectif) sur proposition du responsable du pôle égalité des chances. L’objectif était d’essayer expliquer pourquoi, alors que les filles sont majoritaires en terminale scientifique et y réussissent mieux en moyenne que les garçons, y a-t-il désaffection pour l’X au profit d’autres écoles ou filières ? Nous avons pour cela aussi étudié les motivations des filles pour choisir HEC et AgroParisTech qui ne peinent pas à les attirer.
Comment avez-vous travaillé ?
Ce projet sociologique était encadré par Pierre François, enseignant-chercheur du CNRS et de Sciences Po. Il nous a aidés à formuler la problématique, nous a formés au travail et aux outils sociologiques. Nous avons émis des hypothèses pour les vérifier à partir de données recueillies auprès des écoles ; et d’un questionnaire pour lequel nous avons reçu 1 136 réponses exploitables d’étudiants de l’X, HEC et AgroParisTech. Nous avons enfin réalisé 35 entretiens individuels avec des lycéens, des étudiants en CPGE et en école.
Quelles observations significatives avez-vous pu faire ?
La première est que les étudiantes à l’X sont plus souvent indéterminées quant à leur avenir professionnel que les étudiants. Notre analyse est que le faible nombre de diplômées, de repères féminins dans la filière ingénieur, rend plus difficile l’identification, la projection, décisifs dans le choix d’une orientation. Le second point est qu’elles semblent plus rechercher la diversité que les garçons, plus orientés vers l’efficacité et la performance de leur parcours. Les filles s’orientent plus vers des voies leur permettant de ne pas se spécialiser rapidement, elles s’intéressent au contenu avant la finalité professionnelle des études. Nous avons établi que l’incitation parentale était plus déterminante pour les filles faisant l’X que celles entrées à HEC, alors que les garçons ont fait l’objet du même investissement parental pour les deux écoles. L’étude souligne aussi que l’influence des professeurs est deux fois plus importante chez les filles que chez les garçons. Enfin, nous avons découvert que les filles vont en filière sélectives scientifiques si leur milieu les y encourage. Les filles qui intègrent l’X ou HEC viennent plus souvent d’un milieu «initié»’ que les garçons de ces écoles, s’interdisant l’accession à des milieux dont elles ne font pas partie.
Les polytechniciennes sont-elles ambitieuses ?
C’est un point intéressant que nous avons découvert en interrogeant les étudiants sur leurs plans de carrière, combien ils entendaient gagner dans 1 an, 5 ans et 10 ans. Nous avons identifié que les garçons se projetaient plus loin, se fixaient des objectifs à atteindre, et que cela passait par des études à l’X. Nous avons ensuite comparé avec HEC. Il apparait que les étudiantes d’HEC montrent une ambition plus forte que celle des polytechniciennes.
Et vous, saviez-vous ce que vous vouliez faire en entrant à l’X ?
Avant d’intégrer l’école je pensais qu’on n’y faisait que des maths, ce qui n’est pas le cas … et je ne savais pas ce que je voulais faire. Mais lorsqu’on est reçue à l’X pas question d’hésiter ! Je n’ai donc pas vraiment choisi l’X. Mais je suis sûre que c’est une formation qui m’ouvrira de nombreuses portes.
A. D-F