Bernard Ramanantsoa
Bernard Ramanantsoa

HEC Paris : « Il faut être en tête des clusters européens »

Désignée meilleure école de commerce européenne dans le classement 2011 du Financial Times, son programme Grande Ecole apparaissant en quatrième place des Masters in Management, HEC Paris n’est plus seulement une référence française mais constitue désormais bel et bien un  acteur de la scène internationale. Entretien avec son Directeur, Bernard Ramanantsoa.

 

Bernard Ramanantsoa

Que représente la marque HEC Paris à l’étranger ?
Soyons modestes, si vous en parlez sur la  cinquième avenue, personne ne sait ce que c’est. Mais d’après nos sondages, nous avons fait  pas mal de progrès dans les milieux étudiants  et professeurs. De plus, le fait que nous soyons  très bien classés depuis quelques années nous a aidés à nous faire connaître dans le monde  de l’entreprise.

 

 

Qu’est-ce qui, selon vous, fait l’excellence d’HEC Paris et justifie sa renommée internationale ?
Si on est exhaustif, il y a quatre choses :
1. Nous avons d’excellents élèves. En moyenne ce sont des gens qui ont beaucoup de capacité analytique, qui réfléchissent très vite, qui sont très ouverts en général et sur l’international en particulier
2. Nos professeurs, qui, je pense, sont meilleurs qu’à beaucoup d’autres endroits et qui sont de très bons chercheurs si on les compare aux standards internationaux
3. Nous avons une proximité avec le monde de l’entreprise qui est très forte
4. Notre réseau international

 

 

Les regroupements d’écoles se multiplient. Est-ce un modèle d’excellence à l’américaine ?
C’est vrai que les Américains ont beaucoup imposé leurs normes mais c’est déjà de l’histoire américaine. Aujourd’hui la concurrence dans l’enseignement supérieur est mondiale et elle se décline vite entre européens. Il faut donc être en tête des clusters européens. Parce que si vous êtes en tête du cluster européen, les Américains vous regardent comme un champion européen et les Chinois, les Japonais (…), pareil.

 

 

Est-il important pour une école de commerce d’avoir des domaines d’expertise, de se différencier, pour exister au niveau international ?
La question de la différenciation est une question de second ordre. Il faut avant tout que la machine tourne. Cela se voit terriblement dans les marchés comme celui du MBA. Il y a des normes : vous les respectez c’est bien, vous êtes incités à vous
asseoir à la table. Sinon, non. Il faut d’abord être arbre et pas buisson. C’est ensuite que la question de la différence se pose.

 

 

A quand un campus à l’étranger comme ceux de Madrid, Londres, Turin et Berlin pour ESCP Europe ou celui de Singapour pour l’ESSEC ?
Très bonne question, c’est un vrai choix. Telles que je vois les choses aujourd’hui, je ne pense pas que ce soit du vrai international d’avoir des campus comme ceux que vous avez cités. Ce qui compte, c’est d’avoir une population internationale sur le campus et de mettre les élèves dans un bain international. Par exemple, dans notre MBA, 85 % des étudiants sont internationaux. Ce que nous, nous avons fait comme choix, c’est de pouvoir envoyer nos étudiants dès la première année à l’étranger, dans des institutions étrangères : envoyer des élèves dans une université à Singapour, c’est davantage une immersion que de les envoyer sur un campus d’une école française. Mais c’est un vrai débat. C’est notre stratégie : elle a le mérite de la cohérence, mais ça se discute.

 

HEC Paris est classée première école de commerce française depuis d’innombrables années : n’y a-t-il pas un risque de se reposer sur ses lauriers ?
Non. Une partie significative de mes angoisses, c’est l’étranger. Je suis très inquiet de ce que fait l’INSEAD (je la considère comme une école étrangère), la London Business School, et quand je pense à l’Espagne, ça me réveille la nuit. Quand vous vous faites piquer des profs (et ça m’arrive tous les quinze jours) parce qu’ils partent à l’étranger, quand vous avez des étudiants qui disent « Je viendrais bien chez vous, mais j’ai une bourse pour aller à la London School of Economics », il faut un grand aplomb pour dire « Ce n’est pas grave, ça passera. » Donc on ne se repose pas sur ses lauriers, on stresse.

 

Quelle est votre réponse à cela ?
Il faut des moyens. Tout le monde sait bien combien les professeurs valent. Donc vous avez les moyens ou vous ne les avez pas. Et puis il faut les rassurer, leur montrer qu’ils seront encadrés.

 

 

Claire Bouleau