Le 10 octobre 2024, le campus parisien d’Arts et Métiers organisait sa Fête de la Science. L’occasion pour l’école de mettre en avant ses enseignants-chercheurs et leurs spécialités, mais aussi d’ouvrir les portes de ses laboratoires, illustrant sa palette de compétences industrielles.
En cette journée dédiée à la Fête de la Science, ce ne sont pas moins de 450 visiteurs qui se sont déplacés sur le campus de Paris d’Arts et Métiers. On y trouve des scolaires – du CE1 au Bac +2, avec une majorité de classes de 3ème – ainsi que des visiteurs extérieurs intéressés par le métier d’ingénieur. Pour Mickaël Rivette, directeur du campus depuis un peu plus d’un an et demi, l’ouverture de l’école lors de journées thématiques comme celle-ci est indispensable. « Cela nous permet de sensibiliser un public jeune à la science, de lui faire découvrir ce qu’est l’industrie et ce de façon concrète, en montrant nos réalisations, nos machines et en faisant participer le public à des ateliers » indique-t-il. Cette année, neuf stands sont animés par des enseignants-chercheurs de l’école. Leur défi : proposer des expériences accessibles à tous les âges et à tous les niveaux. Pour les rencontrer, direction la cour des ateliers qui conduit aux halles 1,2,3 et 4. Bâtiments en briques rouges surmontés d’une structure Eiffel au toit vitré, les halles regroupent quatre des cinq laboratoires industriels du campus. Procédés laser, biomécanique et santé, énergie thermique, fabrication additive ou encore conception mécanique, leurs spécialités sont variées. A l’occasion de cette Fête de la Science, nous avons pu en visiter trois d’entre eux : l’Institut de Biomécanique Humaine Georges Charpak (IBHGC), le Laboratoire d’Ingénierie des Fluides et Systèmes Energétiques (LIFSE) et le Laboratoire Procédés et Ingénierie en Mécanique et Matériaux (PIMM).
Capturer le mouvement grâce à la biomécanique
Premier arrêt à l’Institut de Biomécanique Humaine Georges Charpak, lieu unique dédié à la modélisation du système neuro-musculosquelettique. Ici, mécaniciens, chirurgiens orthopédistes, neurochirurgiens, spécialistes d’imagerie, physiologistes, automaticiens, radiologues ou encore physiciens se retrouvent dans un espace scientifique commun pour mieux comprendre les mécanismes d’endommagement corporels et contribuer à la conception et à l’amélioration du diagnostic et de la prise en charge thérapeutique. En cette Fête de la Science, un atelier est animé par Hélène Pillet, maître de conférences, autour des technologies de capture du mouvement et de leur utilisation en biomécanique grâce à un imposant tapis roulant. « Ce tapis, qui n’est pas un tapis de course, nous permet de mesurer et d’enregistrer les efforts appliqués sur le sol lorsqu’on marche » explique-t-elle. A l’aide de capteurs positionnés sur un individu, elle analyse le mouvement du corps, enregistre la posture ou le fonctionnement des articulations. « Ces mesures vont ensuite nous servir à produire des paramètres applicables aux pieds prothétiques qu’on fabrique pour les personnes amputées, par exemple. C’est tout un travail de recherches et de connaissances scientifiques sur la locomotion, qui vont ensuite être transférées sur un produit » illustre-t-elle. Autre application concrète existante : l’utilisation des paramètres biomécaniques en clinique pour faire un suivi post-opératoire. L’IBHGC collabore ainsi avec l’hôpital pédiatrique Robert-Debré sur des malformations congénitales des membres inférieurs pour comparer, grâce aux mesures, l’évolution de la marche après une opération.
Découvrir les procédés énergétiques
Pour la suite de la visite, le corps humain laisse place à l’énergie. Au sein du Laboratoire d’Ingénierie des Fluides et Systèmes Energétiques (LIFSE), Amélie Danlos et Mickaël Pereira, tous deux maîtres de conférences, animent l’atelier Comprendre ma planète. « Grâce à une petite manipulation, nous avons expliqué aux participants l’effet de serre et pourquoi le CO2 est considéré comme tel. Mon collègue Mickaël a ensuite expliqué d’autres phénomènes physiques qui prennent forme sur la planète comme les éclairs et les pôles magnétiques » développe Amélie Danlos. Rattaché au LIFSE, ce laboratoire combine différents champs disciplinaires pour analyser et améliorer des systèmes énergétiques innovants et respectueux de l’environnement, tout en maintenant des performances optimales. Il réunit ainsi la recherche en hydrodynamique, aérodynamique, acoustique, thermique ou encore thermodynamique. Des axes de recherche qui s’inscrivent dans des secteurs tels que l’énergie renouvelable, la mobilité durable, l’aéronautique et le spatial, et les procédés et la santé.
S’essayer à la fabrication laser
La découverte des laboratoires du campus de Paris d’Arts et Métiers se termine par des ateliers à l’allure encore plus industrielle que les précédents. Bienvenue au Laboratoire Procédés et Ingénierie en Mécanique et Matériaux, aussi connu sous le nom de PIMM. Parmi ses actions phares : la fabrication additive par laser, les matériaux architecturés métal/polymère ou encore la dynamique et l’interaction onde/interface. Au sein du laboratoire laser du PIMM, Corinne Dupuy, ingénieure de recherche, présente les possibilités offertes par l’impression 3D métallique, une technologie innovante utilisée dans l’industrie pour produire des pièces complexes et durables. Dans la paume de sa main, un matériau dentelé composé d’hélices et d’interstices côtoie une pièce cubique en titane, articulée façon casse-tête chinois. « Pour obtenir ce résultat, le laser fait fondre à grande vitesse de la poudre métallique, qui peut mesurer entre 20 et 63 microns. Une petite couche de poudre fond puis durcit, on remet une couche pour reproduire le même procédé et ainsi de suite, jusqu’à obtenir le résultat attendu, détaille Corinne Dupuy. C’est vraiment super de pouvoir dessiner sa pièce et ensuite de la réaliser, c’est un peu magique. » Si aujourd’hui, elle présente des objets de démonstration inutilisables en industrie, elle « réalise aussi des prestations pour des industriels ou pour des collègues qui ont besoin d’éléments spécifiques pour leurs travaux de recherche. Certaines pièces sont même fabriquées et certifiées pour composer des avions » assure l’ingénieure. Car dans tous les laboratoires de l’école, les machines utilisées sont à l’échelle 1, c’est-à-dire semblables à celles que l’on trouve dans l’industrie.
La robotique dans tous ses états
Plus loin, un immense morceau d’avion est installé dans un grand hangar. Sur le fuselage, un point vert se déplace. « Nous contrôlons les défauts de surface grâce à un vibromètre laser qui envoie des ultrasons. Ils rebondissent sur les petits dommages du fuselage, ce qui nous permet de les identifier facilement » explique Marc Rébillat, professeur associé au PIMM. L’enjeu est ici d’étudier la dynamique et l’interaction d’ondes mécaniques se propageant sur une structure. Mais les démonstrations ne s’arrêtent pas là. « Aujourd’hui, nous montrons également aux visiteurs comment la robotique s’utilise dans les activités mécaniques » insiste Marc Rébillat. Ici, un exercice de flexion de la matière. Là, un atelier de dévracage. « Il s’agit d’un robot capable de reconnaître des pièces posées en vrac et de les trier. Il peut par exemple différencier un boulon d’un écrou. Nous avons de nombreux partenariats de recherche avec des problématiques de ce type. Par exemple, en usine d’assemblage, un robot avec une caméra équipée d’IA va pouvoir faire le tri et ainsi gagner du temps sur les étapes de production. Ce mélange entre robotique et IA au service de l’industrie est très intéressant » ajoute-t-il, avant de se tourner vers un pôle d’usinage robotisé. « Le robot nous donne une grande amplitude pour usiner les pièces mais il vibre, ce qui pose des problèmes de contrôle. Le défi scientifique est donc de trouver comment le piloter pour qu’il soit le plus stable possible et être sûr d’avoir une pièce conforme. » En cette Fête de la Science, autant d’innovations et de compétences qui font d’Arts et Métiers une véritable vitrine de l’industrie du futur.