Apprentissage dans l'enseignement : pour Christophe Germain, il faut réaffirmer l’action et la dimension sociale pour les étudiants
crédit : F. Sénard / Audencia

Apprentissage dans l’enseignement : réaffirmer l’action et la dimension sociale pour les étudiants

À l’heure où la France redonne enfin ses lettres de noblesse à la filière en enseignement, les écoles ont su se détacher enfin d’une vision, sans doute très française, qui consistait à cloisonner l’enseignement théorique, conceptuel, de l’expérimentation au sens large, qui permet la pleine expression du potentiel de l’étudiant.

L’enseignant doit-il encore transmettre son savoir ?

À voir encore des cours réunissant dans une salle de classe des étudiants assis derrière leur ordinateur, écoutant le discours d’un ou une professeur(e), on pourrait reprocher à l’enseignement supérieur une certaine forme d’inertie apparente dans l’évolution de ses méthodes pédagogiques, comme l’apprentissage. Et que dire du virage du distanciel imposé par la crise Covid, raté pour certains, qui a entraîné le décrochage scolaire de milliers d’élèves au cours des 18 derniers mois.

C’est pourtant bien l’image la plus répandue de l’enseignant : un « sachant » transmettant son savoir à la génération suivante. Il est vrai que ce format a longtemps été privilégié dans l’enseignement supérieur. Il serait trop simple de le condamner purement et simplement. Il conserve un intérêt pour certaines disciplines et étapes de l’apprentissage, à condition de l’intégrer dans un ensemble de pratiques pédagogiques complémentaires plaçant l’étudiant en position d’expérimentation.

Faire de l’étudiant son propre enseignant

L’objectif de l’apprentissage, c’est l’action. Ainsi, à l’image de l’internat en faculté de médecine, les grandes écoles ont largement professionnalisé leurs cursus depuis plusieurs décennies. Passées les portes de l’école, l’apprenant ne retiendra à long terme que 10% de ce qu’il aura appris de façon passive. Seule la pratique permet de faire grimper ce chiffre entre 75% et jusqu’à 90%, lorsque celle-ci est immédiate. On comprend bien ici l’attrait de la filière apprentissage, qui permet une expérimentation immédiate et simultanée, là où le stage a l’avantage de l’immersion complète mais de façon asynchrone.

C’est aussi le fondement des méthodes pédagogiques actives. Classe inversée, peer learning, ou encore l’approche makers ont en commun de faire confiance aux ressources propres de l’étudiant qui devient l’acteur principal de son apprentissage. C’est le « learning by doing » de John Dewey, ou le « tâtonnement expérimental » de Freinet. Un terme intéressant qui souligne aussi l’importance de la prise de risque et du droit à l’erreur. À Audencia, le sport est incontournable, et même obligatoire en première année : la philosophie est identique : il n’y a pas d’apprentissage qui vaille sans pratique.

Dans l’enseignement, la dimension sociale, facteur clé de réussite de l’apprentissage

Les neurosciences ont prouvé l’importance des interactions sociales dans le processus d’apprentissage et de rétention. C’est tout l’intérêt des hackathons, et autres projets de groupe pour des entreprises inclus depuis bien longtemps dans les formations : l’intelligence collective au service de la résolution d’une problématique. Le dispositif Sauvons1Boîte d’Audencia en pleine crise sanitaire 2020 a ainsi permis aux étudiants en business development de sortir 7 entreprises de la tourmente. Basés sur les neurosciences, les séminaires Tipping Point (point de bascule, le moment où l’on s’engage dans l’action) permettent aux décideurs en entreprise de solliciter d’autres zones du cerveau que les zones « naturellement » sollicitées et ainsi de sortir des mécanismes « automatiques », comme ceux générés par le stress par exemple. Un format qui s’appuie sur deux piliers du plaisir de l’apprentissage : l’émotion et la motivation.

L’enseignant, nullement menacé par l’intelligence artificielle qui ne peut que l’assister dans son rôle, devient l’accompagnateur, garant des conditions favorables à l’expérience d’apprentissage. Une façon d’illustrer cette phrase de Benjamin Franklin : “Tu me dis, j’oublie. Tu m’enseignes, je me souviens. Tu m’impliques, j’apprends”.

Par Christophe Germain, directeur général d’Audencia