Si le pouvoir de séduction des sumos laisse la majorité des Occidentaux perplexes, il semble pourtant qu’il ne laisse pas les Japonaises indifférentes. Ces poids lourds du sport japonais génèrent une réelle frénésie au Japon depuis plus de 1 500 ans.
Les sumos sont de réelles célébrités, voire des demi-dieux au pays du Soleil Levant. Leurs combats ont été mentionnés pour la première fois en 712, dans le Kojiki, le premier livre d’écriture japonaise. A l’époque, les sumos devaient réaliser des rites au nom de la fécondité, et mener leur combat jusqu’à la mort. A travers les rituels réalisés à chaque combat, ils contribuent à la conservation du patrimoine traditionnel du Japon.
Toutefois, derrière le rideau de paillettes, le métier de sumo n’est pas de tout repos. Etre sumo, ce n’est pas que crouler sous les flashs des photographes, et profiter des soirées dans les boîtes les plus branchées et déjantées du Japon. Etre sumo, c’est aussi se soumettre à un entraînement rigide et contraignant au quotidien. Ils ne sont autorisés à manger que deux repas par jour, un vers midi, et le second à 20h. Leurs repas sont principalement des ragoûts possédant un taux élevé de protéines, les Chankonabe, leur permettant ainsi d’ingurgiter 8 000 à 10 000 calories par jour. De plus, à la fin de chaque repas, la sieste n’est pas un plaisir, mais bien une contrainte pour chaque sumo. Ils doivent dormir pour faciliter l’accumulation de graisse. Leurs combats sont aussi régis par des codes rigoureux. Alors que le combat ne dure qu’une poignée de secondes, le rituel dure environ 10 minutes. Le but est d’impressionner son adversaire et de mettre en avant sa masse musculaire. Cependant, cette lutte nationale croule sous les scandales depuis une dizaine d’années et perd de sa popularité. Face à l’américanisation croissante, le monde des sumos trouve difficilement des nouvelles recrues.
En 2007, l’association japonaise du Sumo a même été contrainte pour la première fois de son histoire d’annuler, faute de candidat, un test de sélection des nouvelles recrues. Les jeunes japonais sont en réalité bien plus passionnés par le baseball et le football que par les traditions.
De plus, les scandales de violence, combinés à ceux sur la consommation de cannabis par des lutteurs ou sur des soupçons de matches truqués, ont éclaté au grand jour, ternissant ainsi l’image idyllique du sport national. La mort de Takashi Saito, âgé de 17 ans, a plongé le monde opaque des sumos dans une crise importante. Ce jeune adolescent était rossé à coups de bouteilles de bière, et subissait des châtiments corporels afin de l’assagir. Face à ce scandale, le champion de sumo mongol Hakuho a lui aussi levé le voile sur la pratique taboue du bizutage dans ce vénérable sport japonais : « Quand vous me voyez maintenant, j’ai l’air heureux, mais à ce moment-là, je pleurais tous les jours », a avoué ce colosse de 1m 92 et 154 kg. Par ailleurs, un magazine japonais a révélé que le champion mongol Asashoryu avait payé 800 000 yens pour que ses adversaires perdent contre lui. L’affaire a fait grand bruit au Japon où les lutteurs sont censés être des parangons de vertu.
Il faut donc se méfier des apparences au pays du Soleil Levant.
Manuéla Delépine, pour le BDS de l’ESSEC