Réseaux sociaux, et marketing : des consommateurs de plus en plus investis et qui demandent une relation directe aux marques…

Le web social, tournant pour les entreprises. Parmi les nombreuses dimensions impactées par le web social, la communication a été la première fonction d’entreprise à avoir réagi. La vulgarisation de la prise de parole des consommateurs, et le développement induit de leur influence amène à un changement structurel de leur relation aux marques. D’ambassadeurs de ces dernières à opposants, le pas est vite franchi et mérite que l’on y prête attention.

La nouvelle tonalité des ces relations, plus rapide et agile remet en cause la communication corporate classique, et souligne l’importance de la bonne gestion du tryptique « paid, owned, earned ». Dans ce nouveau cadre, le « earned », inexistant il y a encore quelques années joue maintenant un rôle prépondérant, et implique un nouveau regard.
Avec la communication, c’est au tour de la gestion de la relation client de s’adapter : après l’ère du marketing transactionnel et relationnel, à écouter ce que disent les consommateurs et le traitement qu’en font les marques, on se demande si la relation n’est pas un peu écornée. À trop vouloir quantifier et segmenter, les consommateurs ne se sentent pas vraiment écoutés, encore moins engagés dans une relation. Pire, ils ont la « zapette » facile et ne se sentent pas liés à une marque ou une autre dans beaucoup de secteurs d’activités. La crise de confiance n’est pas loin. Les fonctions participatives, la liberté d’expression et l’accessibilité, caractéristiques des réseaux, ont libéré la voix des consommateurs non seulement vis-à-vis de la marque mais surtout entre eux. Les enjeux de ce nouveau paradigme débordent largement le cadre d’Internet puisque les marques vont devoir passer :
■ d’une logique transactionnelle à une logique conversationnelle : difficile maintenant d’assurer une vente sans avoir débuté une écoute attentive des besoins du consommateur et une réponse personnalisée à ceux-ci
■ d’une logique de distance et d’anonymat à une logique de proximité : de la hot-line standardisée à la conversation humanisée
■ d’un marketing de diffusion (écran TV, annonce presse, bannière Web, etc.) à un marketing d’engagement : la mise à disposition pour un client d’une équipe et d’une organisation spécifique
■ et probablement de valeurs consuméristes à des valeurs morales et de responsabilité sociale : les promotions sur les prix feront-elles face à des engagements moraux et sociétaux des entreprises ?

 

Le passage à l’« âge adulte » des médias sociaux
Même si les retours d’expérience s’accumulent, de nombreuses interrogations restent cependant, et les conversations continuent encore d’être vues comme une menace à réduire. Fait peu étonnant si l’on considère que peu d’entreprises ont pris la mesure des réseaux sociaux et de leurs potentiels (via les recommandations notamment), et n’y voient qu’un média de plus pour promouvoir leurs produits et leurs services. Le Web reste ainsi encore utilisé dans une logique de diffusion de l’information plus que dans l’échange et la collaboration. Les contenus ont trop souvent une orientation informative et non participative ; ils n’engagent pas l’Internaute à réagir (ex : Twitter). Les entreprises qui sauront profiter de l’ère digitale seront celles qui arriveront à faire évoluer un certain nombre de dimensions. La première est qu’il est nécessaire de développer une capacité à prendre en compte le consommateur dans sa dimension privée comme publique (citoyen, rapport à la marque… empathie), loin des segmentations classiques. Sur cette base, la question posée sera alors d’être pertinent pour un groupe spécifique de consommateurs plutôt que relativement intéressant pour une majorité. En parallèle de ces deux points, se pose finalement la question la capacité des marques à trouver les sources de discussion sur le web, à identifier les leaders d’opinion, et à s’engager avec eux dans une discussion, voir dans une démarche de co-construction.

 

Par Nicolas Minvielle, Professeur associé Audencia Nantes,
responsable du MS Marketing, Design et Création
et Mathieu Griffoul, Fondateur associé de The Creativists, spécialiste des problématiques d’innovation à l’ère du digital