Professeur d’université depuis 2000, Olivier Tillement est un serial entrepreneur. Il a cofondé 5 startups sur la base d’innovations issues de ses recherches. Responsable de l’équipe FENNEC au sein de l’Institut lumière matière (Université Claude Bernard Lyon 1/CNRS), il nous raconte l’aventure de sa dernière-née, NH TherAguix SAS. La société propose une solution thérapeutique pour lutter contre le cancer alliant les nanomédicaments hybrides aux radiothérapies. – Par Ariane Despierres-Féry
J’ai choisi la recherche publique pour aller au bout de ma liberté de scientifique
Pour Olivier Tillement s’atteler à un projet de recherche risqué et incertain, mener des travaux très amont puis des développements coûteux ne peut se faire chez un industriel. Il explore à la fois les sciences fondamentales et s’attache à trouver des applications de rupture, « un objectif auquel mes professeurs m’ont sensibilisé très tôt ».
Avant d’arriver aux essais cliniques sur l’humain, sa R&D a déjà couté près de 2 M€. « Il n’y a que la recherche publique qui peut offrir une telle opportunité de travailler sur le long terme, profondément. » A cela le chercheur couple la création d’entreprises et le dépôt de brevets pour s’assurer la mise au point d’un produit mûr que des big pharma seraient susceptibles d’acheter.
Une série de découvertes et de brevets
L’équipe FENNEC œuvre au sein de l’Institut lumière matière. Multidisciplinaire, il regroupe 20 laboratoires qui développent des nanoobjets connectés. « Mon équipe travaille sur des nanomatériaux hybrides et leur application au travers d’outils médicaux de lutte contre le cancer. » L’équipe a d’abord découvert comment stabiliser des nanoparticules, qui dans le monde réel s’agglomèrent très rapidement. A partir de là, elle a multiplié les innovations, déposé des brevets et créé des sociétés afin de développer ses solutions thérapeutiques.
Un rêve
« Toutes ces étapes sont cruciales pour avancer concrètement dans le développement de médicaments. Nous avons des brevets efficaces. Nous avons reçu en avril 2016 l’autorisation de mener des essais cliniques sur des patients volontaires. Je n’aurais jamais rêvé d’un tel aboutissement lorsque j’ai débuté en tant que maître de conférences ! »
Comment fonctionne la technologie AGuIX ?
L’équipe d’Olivier Tillement a mis au point des nanoparticules ou nanomédicaments hybrides. Ils se concentrent passivement sur les tumeurs améliorant ainsi l’efficacité de leur détection par IRM et de leur traitement par radiothérapie.
La recherche est parfois une surprise
« Notre solution fonctionne par l’injection de nanoparticules par intraveineuse afin de les diffuser jusqu’à la tumeur via le sang. Outre de permettre une localisation précise de la tumeur pour l’irradier, nous avons découvert que ces nanoparticules possèdent la caractéristique de radiosensibilisation. » Après avoir fait la preuve de concept de l’utilité des nanoparticules pour la localisation de tumeurs via l’imagerie, l’équipe a en effet fait une découverte majeure, et ce par hasard ! « Dans des recherches aussi complexes, il y a toujours une part de chance et les erreurs sont aussi utiles pour progresser ! »
Une solution thérapeutique très prometteuse
« Suite à une erreur de calcul, nous avons découvert qu’en irradiant ces particules elles agissent telles des boosters de rayons X. Le nanomédicament AGuIX peut être activé par les rayons une fois dans la zone tumorale. Ses propriétés lui permettent d’augmenter jusqu’à + 20 % de dose de rayons équivalente reçue dans la zone tumorale ! »
La démultiplication de l’action des rayons X augmente l’efficacité de la radiothérapie sans augmenter la dose de rayons reçue et donc ses effets secondaires (destruction des tissus sains environnants). La solution thérapeutique a obtenu le feu vert pour des essais cliniques sur patients volontaires en avril 2016.
La première injection chez un patient est l’aboutissement d’un rêve pour Olivier Tillement, « notre plus beau succès sera le lancement du médicament ! »
www.nhtheraguix.com