Qui sont les écotafeurs ? Sans forcément être éco-anxieux, de plus en plus de jeunes (et moins jeunes) sont éco-conscients et veulent mettre leur engagement au coeur de leur parcours professionnel. Le dernier rapport Gen Z and Millennial Survey de Deloitte illustre d’ailleurs cette envie exprimée par les jeunes de s’engager face au dérèglement climatique. Le constat est même sans appel : 70% des jeunes considèrent crucial que les entreprises agissent contre le changement climatique et 25% se renseignent sur les politiques environnementales des entreprises avant de postuler.
Un jeune sur cinq a d’ailleurs déjà changé d’emploi pour des raisons écologiques, et ils sont nombreux à envisager de le faire pour éviter des conflits éthiques. 54% des Z et 48% des Millennials font même pression sur leur employeur pour mettre en œuvre des actions climatiques. Mais qui sont ces écotafeurs, ces jeunes prêts à changer d’emploi pour s’aligner sur leurs valeurs environnementales ?
Dany Leroux, un écotafeur qui veut changer les choses de l’intérieur
Tout juste diplômé de NEOMA Business School, Dany Leroux est aujourd’hui en VIE en tant que Sustainibility Manager chez un acteur majeur de la cosmétique, à Milan.
L’engagement pour la sustainability a-t-il toujours fait partie de votre vie ?
En primaire, j’ai souvent participé avec ma classe à des opérations environnementales de type nettoyage de lieux naturels ou récupération de bouchons. Dans ma famille les préoccupations environnementales n’étaient pas vraiment un sujet et c’est moi qui l’ai amenée à s’y intéresser. Au fur et à mesure de ma scolarité, j’ai découvert qu’il était possible de conjuguer mes engagements personnels avec mes études et mes projets professionnels. Et j’ai vraiment plongé à fond dans le sujet en entrant à NEOMA (dont j’ai intégré le Comité RSE) et au Bureau National des Etudiants en Ecole de Management (BNEM) sur des enjeux de transitions en école de management.
C’était donc impossible d’envisager un premier job qui ne soit pas en lien avec la sustainability ?
J’ai très vite compris que je voulais avoir de l’impact et que trouver un métier en accord avec mes valeurs serait le top du top. Mais ça supposait de se poser la question de la place de mon engagement : est-ce que je voulais le garder à part dans mon temps personnel, où l’intégrer pleinement dans ma vie professionnelle ? Finalement, j’ai trouvé du sens à porter et à transcrire cet engagement dans le monde des entreprises. Mais encore fallait-il trouver où ! Et là encore, mes questionnements ont été nombreux : structure de l’Economie Sociale et Solidaire ou entreprise classique ? Métier 100 % focus développement durable ou métier classique (finance, marketing, commerce etc.) intégrant des enjeux de développement durable ? J’ai fini par choisir cette dernière option. Car j’en suis convaincu, le développement durable, c’est comme le numérique : ça ne peut pas être détenu par une poignée de personnes hyper spécialisées, ça doit infuser partout.
Du coup, plutôt team militant ou team changement de l’intérieur ?
Les deux modèles ne s’opposent pas. Moi, j’ai choisi l’entrisme parce que j’aime faire bouger les lignes de l’intérieur… malgré les contraintes et la complexité de faire changer tout un système ! Mais je me suis toujours dit « si toi qui est si convaincu tu ne vas pas en entreprise pour faire changer les choses, qui va y aller ? » Je ne suis pas hyper militant mais je soutiens les personnes qui le sont et qui pointent du doigt ce qui ne va pas, dès lors que le dialogue entre les mondes associatif, politique et les entreprises est constructif et révèle une volonté commune d’aller vers le changement. Mais j’avoue que je me suis régulièrement posé la question de savoir si mon action avait vraiment de l’impact ou si je ne participais pas finalement à une forme de green washing. D’autant que travailler sur les enjeux environnementaux comme la biodiversité demande de travailler sur le temps long, sans forcément voir des résultats concrets. En réalité, c’est une question de juste équilibre avec soi-même, ses missions et de son évolution personnelle.
Le red flag de l’écotafeur ?
Je suis attentif à la place du développement durable dans la gouvernance : s’il est rattaché à la direction générale, aux RH, aux opérations ou à la communication, ça donne une idée des priorités de l’entreprise sur le sujet. Par exemple, les postes estampillés Développement durable qui ne consistent qu’à organiser des événements, ça me chatouille un peu. Parler du sujet c’est important, mais ça ne suffit pas : il faut mettre en œuvre des actions ! Et si j’ai l’impression que le business model de l’entreprise rend impossible le changement, je n’y vais pas.