De problèmes en problèmes… on arrive à la problématique majeure si difficile à résoudre… et tous les responsables de grandes écoles ont-ils les mêmes préoccupations ? Pas sûr !… tentons de cerner la pire problématique de chacun.
Bernard Belletante, Directeur Général d’Euromed Management
La problématique la plus complexe que nous avons à résoudre est de faire face aux accréditations nationales et internationales en termes de recherche, car elles sont souvent basées sur des principes d’évaluation de processus de recherche supportés par une logique de financements publics, et nous, nous développons des business modèles différents. Il faut arriver à trouver le modèle économique adéquat pour financer cette recherche.
Jean-Louis Billoët, Directeur de L’INSA de Rouen
Celle qui se fait sentir aujourd’hui relève du fait que l’excellence repose sur deux moteurs à alimenter en simultané, la formation et la recherche avec quelques aspects antinomiques pour les enseignants-chercheurs dans la gestion des priorités et par ailleurs, le niveau financier des investissements pour ce qui relève de l’enseignement supérieur scientifique et technologique. La compétition internationale implique d’offrir des équipements les plus en amont de ce que les entreprises peuvent avoir besoin et donc des coûts très importants, d’autant plus que les technologies évoluent de plus en plus rapidement.
Jean-Guy Bernard, Directeur Général d’EM Normandie
La grande question c’est de choisir le modèle économique qui lui permette de répondre aux challenges de son évolution dans une situation économique mondiale tendue. Nous sommes tous à la recherche de partenaires pour monter des chaires d’entreprise, mais ce n’est pas encore aussi étendu qu’aux USA. Et nous prospectons des investisseurs potentiels pour soutenir notre développement d’activités. L’Executive Education, les formations en e-learning et la recherche appliquée constituent des leviers de financement. De plus, le réseau des entreprises partenaires et des diplômés sont de véritables soutiens pour une grande école comme la nôtre.
François Bonvalet, Directeur Général de RMS
Le financement ! La plupart des écoles de commerce ont des structures d’origine consulaire. Elles ont souvent été accompagnées par les Chambres de Commerce qui n’ont plus les fonds nécessaires à la marche de ces écoles. Du coup, les écoles sont confrontées à un double mouvement : avoir moins de support ou même aucun support de leurs structures tutélaires alors qu’elles doivent financer la recherche. Il y a 25 ans, quand un étudiant payait 1 franc de scolarité, ce franc servait à payer une minute de cours. Aujourd’hui, cet euro sert pour moitié à payer une minute de cours, celle-ci ayant augmenté, et l’autre moitié sert à financer la recherche qui ne génère pas de recettes directement. Quand on travaillait avec 40 profs, il en faut aujourd’hui 80 et l’on ne peut pas augmenter à l’infini le nombre d’étudiants. Entre 2000 et 2005, nous étions en forte croissance, puis la crise de 2008 est passée par là. Aujourd’hui, le marché mondial universitaire produit chaque année 2500 à 2800 doctorats et le marché mon- dial recrute de 3 à 4000 nouveaux profs ce qui implique de se battre pour recruter les meilleurs.
Stéphan Bourcieu, Directeur Général de l’ESC Dijon-Bourgogne
A court terme, dans un environnement de plus en plus globalisé où la France n’est pas forcément le pays le plus attractif, la pire problématique c’est de faire en sorte que nos écoles, de dimensions modestes, puissent continuer à bien se comporter au niveau international. Ce n’est pas en nous associant avec une école française que nous accéderons à cette dimension européenne. C’est pour cette raison que nous avons décidé de nous associer à un établissement anglais : la Business School d’Oxford Brookes University. A long terme, c’est largement le monde économique qui guide le monde et non plus le monde politique car il se plie à la discipline du marché. Notre véritable enjeu consiste à construire un futur qui ne soit pas trop rationnel et déshumanisé. Les écoles de management sont devenues des institutions qui contribuent très fortement à ce que sera la société de demain.
Pierre Charreyron, Président de l’UTC
En ce moment, ce qui nous gêne, c’est la « rigidification » des systèmes. Par exemple, les normes contraignantes de sécurité dans les établissements publics, mettent des entraves à certaines réalisations. De même, on ne peut pas aller travailler en bibliothèque à une heure du matin à cause de considérations réglementaires.
Financièrement, nous sommes inquiets sur le long terme car, avec la réforme de l’autonomie des universités, nous avons la charge de trouver des fonds supplémentaires pour compléter nos dotations.
M’HAmed Drissi, Directeur de l’INSA de Rennes
C’est d’offrir une formation qui soit en adéquation avec les besoins socio-économiques de la société.
Alain Dovillaire, Directeur de l’ENSAM Cluny
C’est de relever le défi des PME/PMI ! Ancien industriel, je pense que les grandes écoles françaises ne s’impliquent pas assez dans les PME/PMI comme c’est le cas en Allemagne, par exemple. Les grandes écoles font peur aux PME/PMI avec lesquelles il faut les réconcilier. Les PME/PMI ont besoin de s’orienter vers des activités de service alors que ce sont essentiellement des sous-traitants. Il faut également développer le goût de l’entre- preneuriat pour de petites structures. Les diplômes d’ingénieur en alternance me paraissent être un autre défi.
Alice Guilhon, Directrice Générale de Skema BS
C’est le financement ! Selon les pays, le mode de financement est inégal. Aux USA, l’accès au financement privé est 100 fois plus important que le nôtre. Nous n’avons pas la possibilité d’attirer des fonds privés car au niveau des lois et de la fiscalisation, c’est impossible.
Alain Jigorel, ancien Directeur de l’INSA de Rennes
Ma problématique aujourd’hui, c’est de faire mieux avec moins ! Nous devons progresser à moyens constants. Je crois beaucoup à l’investissement dans la formation mais cela doit se traduire dans les moyens. On cite toujours en exemple des universités améri- caines ou anglaises mais elles ont des budgets sans comparaison avec les nôtres !
J’ai eu cependant la chance, en tant que directeur, de pouvoir réaliser un certain nombre d’équipements mais c’est très éloigné de nos besoins. Finalement, avec le minimum vital, on fait des choses exceptionnelles.
Marc Renner, Directeur de l’INSA de Strasbourg
C’est de se forger une identité propre. Une grande école, n’est pas un copier-coller. Nous avons la chance d’appartenir à un groupe et l’INSA Strasbourg ayant une identité marquée par son groupe, je l’annoncerai toujours en priorité. Notre identité plus locale ne la sépare pas du groupe mais au contraire permet de l’identifier dans le groupe. Par conséquent, la problématique est de bien coller à notre identité, nationalement et internationalement.
Bernard Ramanantsoa, Directeur Général d’HEC Paris
C’est l’argent ! Pour être au niveau de nos concurrents européens, nous devons accroître nos ressources propres et trouver des financements extérieurs. La Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris investit plus de 100 millions d’euros pour la rénovation du campus et les nouveaux bâtiments (hors résidence). La Fondation HEC se développe rapidement et contribue à notre essor avec des sommes avoisinant 7 à 8 millions d’euros par an.
Didier Marquis, Directeur de l’INSA de Toulouse
Je vais répondre de façon très conjoncturelle. A la suite d’un incendie dans une résidence après une manifestation festive, un grave accident s’est produit. La gestion des conduites addictives et de leurs consé- quences est un problème difficile à gérer au jour le jour. On constate que les jeunes, lors des fêtes, s’alcoolisent très rapidement et de façon massive.
Arnaud Langlois-Meurinne Directeur Général de Rouen Business School
C’est l’équilibre de son budget. Il faut résoudre la quadrature du cercle budgétaire en recherchant de nouvelles ressources, tout en valorisant au mieux celles dont nous disposons.
Véronique Richard, Directeur du Celsa
Tout est important : la rigueur scientifique, la qualité et l’innovation pédagogique et la bonne gestion des moyens. L’objectif est d’articuler l’ensemble des exigences différentes et évolutives.
Alain Storck, Directeur de l’INSA Lyon
C’est aujourd’hui le maintien d’une capacité financière de l’établissement à faire face à la concurrence internationale en proposant une offre de formation pluridisciplinaire, ouverte et diversifiée, en développant une politique de recherche active au service de l’innovation et du développement socioéconomique, et en assurant l’internationalisation de l’école. Tel est le prix à payer à une visibilité et une attractivité internationales. A titre d’exemple, le maintien de la qualité de tous les parcours de formation que nous pro- posons (une soixantaine !), coute cher et nos moyens financiers se révèlent aujourd’hui insuffisants. C’est dans ce contexte que nous avons crée l’année dernière une fondation partenariale qui nous a déjà permis de collecter près de 7 millions d’euros provenant de grands donateurs (pour un budget global de l’INSA de Lyon de 150 millions d’euros).
Patrick Simon