Mes amis, mes amours, ma famille

Une fois emporté par le rythme de la prépa et assommé par la somme de travail, le préparationnaire Pourtant, l’entourage joue un rôle essentiel dans la réussite scolaire, et si les relations avec le monde à la prépa, elles n’en demeurent pas moins essentielles.

 

La famille…
Face aux difficultés rencontrées au quotidien, la famille doit savoir être présente pour apporter son soutien, tout en étant vigilante à ne pas transformer cette présence en poids. En effet, comme l’explique Sylvie Monnet, professeur retraitée d’histoire au Lycée Thiers (Marseille), « La famille peut être efficace en dédramatisant : les mauvaises notes, l’échec… mais elle peut avoir un rôle négatif si elle ajoute au stress de l’élève son propre stress. » Parfois, l’entourage a du mal à comprendre le fonctionnement étrange des classes préparatoires. Pauline, raconte ainsi que ses parents « ne connaissaient pas le système. Il fallait tout leur expliquer. Ils ne savaient pas que ça pouvait être aussi dur, ils l’ont appris avec nous. » Mais même s’il peut y avoir un peu d’incompréhension du côté de l’entourage, l’essentiel réside dans l’existence d’un réel soutien, psychologique avant tout. « Le milieu socio-culturel peut jouer un rôle quand on a une grande bibliothèque ou des parents passés eux-mêmes par la prépa, mais quelque soit le milieu, c’est l’intérêt porté aux études qui importe le plus », explique Sylvie Monnet. Christiane, professeur en université et dont le fils était en élève en prépa littéraire, déclare que « Ses choix scolaires, c’était les siens. On était plus dans une relation de soutien, parfois même jusqu’à dire “ Bon maintenant, arrête de bosser “. C’était un soutien logistique et moral mais jamais de la pression au niveau du suivi des études. C’est beaucoup plus dur sans le soutien de la famille. Les quelques étudiants que j’ai vus décrocher étaient des gens très seuls. Mais le soutien, ça part de la simple présence. »

 

Charlotte et Pauline, jumelles étaient dans la même classe en prépa Kléber, à Strasbourg.
Voici les réponses qu’elles ont données séparément, sans se concerter, aux questions suivantes. Est-ce que la prépa a changé votre relation ?
Charlotte : Je pense que ça nous a vraiment, vraiment rapprochées. On était toujours assises l’une à côté de l’autre.
Pauline : La prépa nous a rapprochées. On a vécu les pires moments ensemble. Comment décrirais-tu vos rapports ?
Charlotte : Une relation quasi fusionnelle. On était 24h/24 ensemble. On était très très soudées. C’était une relation fusionnelle efficace.
Pauline : Une relation d’entraide. On était toujours en train de s’aider, de travailler ensemble. Une relation de cohésion aussi. On était plus fortes toutes les deux. Tu te sentais différente dans ta classe parce que tu avais une jumelle ?
Charlotte : Je me sentais vraiment différente. J’avais un avantage et les autres me le faisaient bien ressentir.
Pauline : Ca se voyait que les autres savaient que c’était une force. C’est plutôt les autres qui m’ont fait sentir que j’étais différente. Penses-tu que ta réussite aurait été différente sans elle ?
Charlotte : Franchement, oui.
Pauline : Oui, oui ! Dès que l’une ne comprenait pas, l’autre lui expliquait. Tu penses avoir eu quel rôle pour elle ?
Charlotte : Moi j’organisais et elle réconfortait. Elle, elle avait le rôle de soutien, et moi d’organisatrice. Pauline : Elle a toujours été celle qui planifie, qui prend les choses en main pour l’organisation. Moi c’était plus le côté un peu psychologique

 

… les amis…
Les amis, comme la famille, jouent aussi un rôle de soutien, surtout quand il s’agit d’amitiés nées en classe préparatoire. Le fait de vivre ensemble cette même expérience crée souvent des liens très forts, qui perdurent une fois les concours passés. Thomas, élève à l’ESCP Europe, confie ainsi « je me suis fait la majorité de mes amis actuels en prépa. » Les amis de l’extérieur, ceux qui font des études tout à fait différentes, ont de leur côté également pour mission d’aider le préparationnaire à se divertir, à changer d’air. « Sans mes amis, je ne m’en serais jamais sorti, ça c’est sûr ! Etant parisien avant de rentrer en prépa à Paris, j’ai continué à beaucoup les voir » déclare Thomas. Mais ça n’est pas toujours facile pour ceux qui sont de l’autre côté de la barrière. Juliette, la meilleure amie de Thomas, explique : « Il m’avait clairement annoncé que ça ne serait plus du tout comme avant et qu’on ne se verrait plus qu’une fois par mois. Ca a été un peu dur quand il est entré en prépa mais il m’a mise au courant. » Faut-il en conclure que les amitiés d’antan sont menacées ? Non ! Juliette s’empresse en effet d’ajouter « notre relation a été d’autant plus forte qu’on se voyait moins. »

 

… et les amours !
Et les amours dans tout ça ? Pas toujours évident… mais pas impossible ! Certaines relations commencées au lycée survivent au « choc » de la prépa, malgré l’impression parfois désagréable, chez celui des deux qui ne fait pas partie du système, qu’il n’a plus autant d’attention que par le passé. On voit aussi souvent naître de belles idylles entre deux camarades de classe : c’est le cas de Laurent et Aline, en couple depuis 5 ans, et qui se sont rencontrés en classe préparatoire. (voir l’encadré ci-dessous).

 

 

Laurent et Aline, en couple depuis 5 ans, se sont rencontrés en prépa B/L au lycée Thiers à Marseille.
Voici les réponses qu’ils ont données séparément, sans se concerter, aux questions suivantes. Pour toi, quels étaient les avantages d’avoir Aline/Laurent en prépa avec toi, dans la même classe ? (au niveau scolaire, psychologique, matériel)
Laurent :
• Scolaire : La capacité à augmenter notre capacité de travail par la motivation réciproque, qu’elle fut consciente (« Allez on s’y met ! ») ou inconsciente (« J’ai très envie de m’arrêter mais comme elle travaille encore, je pousse encore un peu »).
• Psychologique : un soutien moral sans faille et continuel ; une émulation positive ; la capacité à mieux résister aux chocs (moins de solitude notamment)
• Matériel : ceux d’un travail de groupe, sans en avoir les inconvénients, puisqu’il y avait l’ingrédient en plus : l’intimité.
Aline : L’avantage principal d’être dans la même classe était que l’on se voyait tout le temps, sans devoir faire de concession sur notre travail puisqu’on travaillait ensemble, que ce soit en cours ou en dehors.
Au niveau du travail, ça nous a permis de nous motiver mutuellement et d’avoir davantage d’interactions, pour réviser mais aussi pour échanger sur des méthodes de travail, de dissertation ou d’oral.
Sur le plan psychologique, avoir toujours quelqu’un à côté de soi qui connaisse exactement la même expérience permet souvent de relativiser plus facilement quand on sort de colle ou de concours blanc. On essaie d’être positif pour l’autre et du coup, on l’est un peu plus aussi pour soi-même.
Une anecdote d’un moment fort et positif que vous avez vécu à deux en prépa…
Laurent :Le moment où l’on a su que nous étions admissibles à l’ENS Cachan, dans la cour de la prépa.
Aline : C’est clairement le jour des résultats des écrits en cube, quand on a été tous les deux admissibles à Cachan. On était à la fois content pour soi, pour l’autre et au-delà de ça, du fait d’avoir réussi ensemble, en ayant travaillé à deux.
Comment cette relation a-t-elle évolué au cours de vos trois années de prépa ?
Laurent : Vers davantage de compréhension, de réciprocité, de confiance et finalement de complicité.
Aline : On s’est beaucoup rapprochés dans le sens où on se comprenait de mieux en mieux, tant du point de vue personnel que du travail.
Quel était le rôle de chacun ?
Laurent : Aline apportait la motivation pour la lourde charge de travail, j’apportais la confiance et l’optimisme ; mais nous avons surtout progressé sur ce que nous avions de commun : la capacité à être efficaces, la même méthode de travail, les mêmes temps de travail, des objectifs proches. C’est aussi pour cela que la symbiose a fonctionné.
Aline : Moi j’étais plus scolaire et poussait à ce qu’on travaille toutes les matières et tous les sujets pour ne pas avoir de blancs. Lui était plus passionné et poussait plutôt à étudier certains plus en détail. Donc on a fait un peu des deux. Pour le moral, j’étais beaucoup plus pessimiste, et donc réaliste parfois, donc je lui remettais un peu les pieds sur terre et nous forçait à bosser. Lui, plus optimiste et confiant, me remontait le moral et me donnait confiance en moi.

 

Claire Bouleau