La recherche en finance dans les grandes écoles est très active. Cela n’est pas pour surprendre dans la mesure où la finance, à l’instar du marketing, est une discipline phare dans les écoles de commerce et de management. Par ailleurs, avec l’internationalisation croissante des grandes écoles de commerce et la globalisation des économies, la recherche en finance s’est fortement internationalisée.
Il suffit pour cela de constater le nombre croissant de publications dans les meilleures revues internationales de finance (The Journal of Finance, Journal of Financial Economics, Journal of Economic Theory, Journal of Banking and Finance, Journal of portfolio Management, Journal of Corporate Finance, Econometrica, Harvard Business Review, etc.) Cette recherche est également visible dans les revues académiques françaises classées par le CNRS (Finance, Bankers, Markets & Investors, Finance-Contrôle Stratégie). Cet excellent niveau de publications explique en partie la reconnaissance des grandes écoles françaises dans les classements internationaux, notamment du Financial Times.Avec la crise financière que le monde a connue suite à l’explosion des crédits Subprimes en 2008, la recherche en finance a été obligée de s’interroger sur les pratiques financières des institutions financières et des grandes entreprises. Cette inflexion se retrouve dans les programmes de recherche des écoles. Néanmoins, les programmes de recherche suivent les grandes problématiques de la discipline : difficile de sortir des sentiers battus par la communauté internationale ! Pour caractériser la recherche actuelle en finance dans les grandes écoles deux dimensions peuvent être retenues : mieux comprendre le fonctionnement des marchés financiers et mieux appréhender la responsabilité sociale de la finance.
Mieux comprendre le fonctionnement des marchés
L’économie mondialisée repose en grande partie sur le bon fonctionnement des marchés financiers et des banques. La crise financière mondiale qui a été déclenchée par les crédits Subprimes aux Etats-Unis en 1998 a constitué une profonde remise en question des postulats et acquis de la recherche en finance. L’éthique s’est ainsi invitée dans les programmes de formation comme de recherche avec l’investissement socialement responsable (ISR).Cette crise qui a frappé l’ensemble des économies a obligé les chercheurs en finance à revisiter leurs paradigmes. C’est ainsi que dans les grandes écoles de commerce la mission des chercheurs en finance de marché (Market Finance) s’ordonne principalement autour des thèmes suivants : produits dérivés, gestion d’actifs, gestion des risques, marchés de matières premières, gestion d’actifs, et microstructure des marchés. Dans tous ces domaines, la crise est présente afin de mieux comprendre le fonctionnement des marchés. Le comportement des analystes financiers en temps de crise ainsi que le rôle des agences de notation font également l’objet de recherches comme l’impact du credit Crunch sur le financement de l’économie. Par ailleurs, nombreuses sont les recherches visant à remettre en question le fonctionnement harmonieux des marchés financiers et à comprendre la formation des bulles spéculatives (valeurs Internet). Ces questions ne sont pas vraiment nouvelles mais avec la dernière crise elles ont pris une tournure d’actualité.
Mieux appréhender la responsabilité sociale de la finance et le comportement des acteurs
Les étudiants des grandes écoles de commerce sont désireux d’apprendre le social business et sont soucieux du lien entre l’entreprise et la société. L’investissement socialement responsable se retrouve doncnaturellement dans les programmes de recherche des professeurs de finance. C’est particulièrement le cas en ce qui concerne la finance d’entreprise (Corporate Finance). Classiquement la finance d’entreprise s’intéresse aux décisions d’investissement, de financement et de dividende des entreprises. Les opérations de fusions-acquisitions font naturellement l’objet de recherches. La gouvernance des grandes entreprises avec notamment la question de la rémunération des dirigeants fait également l’objet de travaux de recherche.
Au-delà des programmes standards de recherche en finance d’entreprise, les chercheurs en finance accordent de plus en plus d’intérêt au comportement des acteurs (dirigeants, investisseurs) en matière de gestion financière à travers ce qu’il est convenu d’appeler la finance comportementale (Behavioral Finance). C’est ainsi qu’on se demande ce qui peut advenir si on suppose que les dirigeants, comme les investisseurs, ne sont plus rationnels. Vaste programme comme on peut l’imaginer !
En conclusion, la recherche en finance dans les grandes écoles est vivante et elle se porte très bien : elle est reconnue internationalement, elle contribue à l’avancement des connaissances et elle s’efforce de répondre à la demande sociale.
Par Michel Albouy, professeur senior de finance à Grenoble Ecole de Management
Directeur du MSc Finance à Singapour, Membre du Conseil scientifique de l’AMF