Aleksandra Putra
Aleksandra Putra

La place de la natation dans les grandes écoles et universités

Ils nagent deux fois par jour tout en continuant leurs études. Ils participent aux compétitions les plus prestigieuses tout en révisant leurs examens. Ils sont à la fois nageurs de haut niveau et élèves de grandes formations scolaires. Rencontre avec ces étudiants qui ont décidé de tout faire pour concilier sport et études : Aleksandra Putra, en deuxième année à l’EDHEC, Colin Bridier, en master finance et stratégie à Sciences Po et Roxana Maracineanu diplômée en 2005 de l’ESCP Europe.

 

Aleksandra Putra

Une scolarité aménagée différemment selon les écoles
Si les filières dédiées aux sportifs de haut niveau comme celle de l’ESPEME restent rares dans les grandes écoles, ces dernières n’en restent pas moins très à l’écoute des nageurs professionnels. Aleksandra, Colin et Roxana ont tous les trois eu affaire à des professeurs et des membres de l’administration réellement prêts à les aider. Aleksandra est autorisée à manquer les cours pour pouvoir suivre les entraînements et bénéficie de l’aide des professeurs et des élèves. Roxana, lorsqu’elle était étudiante à l’ESCP Europe, avait étalé ses semestres sur 4 ans, de façon à ne travailler que la moitié de l’année. Et Colin, quant à lui, a pu aménager de manière personnalisée les horaires de son master. Bref, Aleksandra, Colin et Roxana ressentent une sincère reconnaissance pour ces trois écoles qui ont tout mis en oeuvre pour faciliter leur scolarité. Ils ont été accueillis à bras ouverts, soutenus, épaulés.

 

Colin Bridier

Sport/études : comment tout concilier ?
Mais malgré tous les systèmes qui sont mis en place, mener de front performances scolaires et sportives n’est pas évident. D’une part, la place que prennent les entraînements et les compétitions rend quasiment impossible l’implication dans la vie de l’école. « J’ai eu l’impression de vraiment passer à côté de ce que l’on peut vivre en grande école » se souvient Roxana, qui a participé à sa première et dernière soirée étudiante alors qu’elle avait déjà 30 ans, au moment de quitter l’école. D’autre part, l’intensité du rythme scolaire, même si les étudiants ont la possibilité de le moduler en fonction des échéances sportives, influe sur les résultats des nageurs. « C’est difficile. Je suis tout le temps épuisé » me confie Colin. Aleksandra évoque le rôle négatif joué par le stress des examens sur ses performances sportives. Roxana va même jusqu’à déclarer « Mon expérience à l’ESCP s’est très bien passée, mais sportivement, ça n’a pas été une réussite ». Pour elle, le problème est simple : « L’organisation de la natation n’est pas optimale pour mener de front des études à haut niveau ». Toutefois, les bénéfices de ce double engagement sont réels et Aleksandra et Colin m’ont tous les deux fait remarquer qu’avoir à gérer un emploi du temps aussi chargé les force à s’organiser parfaitement. « J’ai appris à m’organiser, je suis plus rapide, plus efficace » déclare Colin. Après des années à passer des entraînements aux examens et des cours aux compétitions, Colin et Aleksandra ont finalement tous les deux décidé de bientôt franchir le pas pour se consacrer entièrement à leurs études. Aleksandra s’arrêtera probablement après les JO de Londres et Colin après cette saison. Nostalgiques ? Pas tant que ça ! « Cela se fera naturellement » me dit Aleksandra. « Il faut savoir passer à autre chose » considère Colin.

 

Roxana Maracineanu

Un système à améliorer
Pourtant, si le système avait été mieux organisé, Aleksandra et Colin auraient peut-être réussi à continuer. Ils ont tous les deux été aux Etats-Unis et ont vu la différence. Là-bas, les étudiants ne travaillent que 12 à 15 heures par semaine et peuvent donc consacrer tout le temps restant au sport et à profiter pleinement d’une vraie vie étudiante. « Pour un sportif, c’est le rêve ! » s’exclame Aleksandra tandis que Colin parle de « grand luxe au niveau conciliation sport/études ». Ce que ce nageur trouve surtout dommage, en réalité, c’est de se dire que si le parcours scolaire français était réellement aménagé pour les sportifs, tout gérer serait possible. Sans aller jusqu’à reproduire le système américain, Roxanapense qu’« on gagnerait à mettre en place quelque chose d’officiel » et qu’« il faudrait que les étudiants aient quelqu’un à qui parler de leur projet sportif. »

 

Claire Bouleau