A l’occasion de la première édition du festival Deauville Green Awards, l’ESSEC organisait le 11 avril dernier un colloque sur les questions de gouvernance, de RSE et de mixité au sein de l’entreprise.
Le débat, organisé puis animé par Anne Jeny-Cazavan, responsable du département Comptabilité et Contrôle de gestion de l’ESSEC, initiatrice du partenariat entre l’école et le festival, posait une question centrale, celle du reporting social et environnemental. Comme l’explique Charles Cho, professeur associé au département comptabilité-contrôle de gestion de l’ESSEC, cette discipline vise à élargir les visées de la comptabilité afin qu’elle ne se focalise plus uniquement sur les performances financières de l’entreprise et sur les problèmes de coût et de profit, mais qu’elle devienne également un outil pour recenser ce qui est fait en terme de RSE. Plus exactement, le but du reporting social et environnemental pour Charles Cho serait de responsabiliser davantage les parties prenantes de l’entreprise en leur fournissant de meilleures informations sur son développement social et environnemental. Comment une thématique de RSE devient-elle un sujet de réflexion en entreprise ? Selon un processus en quatre étapes décrit par Geneviève Férone, directrice du développement durable de Veolia Environnement :
1. Latence : le sujet est quasi inexistant, à peine soulevé par certaines personnes, de façon marginale.
2. Emergence : la problématique apparaît dans l’entreprise et devient un sujet de conversation, de recherche.
3. Maturité : l’entreprise a pris acte de l’importance de ce sujet, et initie un processus de reporting, commence à recenser ce qui est fait en la matière. Mais, comme le souligne Geneviève Férone, à ce stade il s’agit de « figures de reporting libres et non imposées donc les entreprises racontent de façon plus ou moins véridique ce qu’elles mettent en place. Généralement elles ne veulent pas voir le législateur arriver pour mettre un cadre ».
4. Institutionnalisation : la loi entre en jeu et réglemente. « L’entreprise ne peut plus se tresser elle-même des couronnes de lauriers ».
La divulgation sociale et environnementale (le fait pour une entreprise de communiquer sur sa politique de RSE) varie considérablement d’une entreprise à l’autre, en fonction de sa taille, de son secteur, de son exposition médiatique. Ainsi, Charles Cho révèle qu’en 2008, 80 % des 250 entreprises les plus grosses du monde avaient publié des reportings dédiés uniquement aux questions de RSE. Ce pourcentage est évidemment bien plus faible au sein des PME. Le professeur « espère que cette information favorisera le développement des activités sociales et environnementales » mais tempère en précisant qu’il y a « encore du travail avant d’avoir des données fiables et solides ». Et Viviane de Beaufort, professeur à l’ESSEC et fondatrice du programme « Women », de compléter : « La RSE est perçue avant tout comme un coût. Or, tant que l’entreprise n’aura pas compris qu’elle ne représente pas seulement une obligation de reporting mais une source d’innovation, les choses ne changeront pas. » Le bilan est toutefois positif puisque, maintenant, au moins, comme le souligne judicieusement Geneviève Férone, « l’information existe : nous sommes passés du silence au bruit. »
Des femmes à la direction pour quoi faire ?
C’était la question que posait Viviane de Beaufort en deuxième partie de ce colloque, afin de rappeler que la problématique de la parité est un des enjeux majeurs de la RSE. Problématique dont les entreprises ont tout à fait conscience puisqu’elles sont soumises aux lois de féminisation, aux classements établis par certains organismes, au jugement des médias, etc. Et pourtant, la parité reste un défi, constate Viviane de Beaufort, « parce que notre culture occidentale prescrit un modèle de masculin dominant. » La preuve ? La très faible proportion de femmes dirigeantes parmi les entreprises du CAC40, par exemple. Et c’est bien dommage, car les femmes constituent pourtant un véritable enjeu économique. Parce qu’elles représentent un gisement de compétences incontournable tout d’abord, parce qu’elles stimulent l’innovation par leur manière différente de penser, ensuite, parce qu’elles améliorent l’image de l’entreprise auprès des parties prenantes, enfin, et pour de nombreuses autres raisons. Aux entreprises de s’attaquer sérieusement à ce problème, donc !
Claire Bouleau
Twitter @ClaireBouleau