Se perdre pour mieux se retrouver !
Tout se passe dans un vieux bâtiment au fond d’un parc, un laboratoire en cours de réhabilitation, siège du Centre de Développement Pédagogique de l’Université de Nantes. On croit être perdu, et on s’apprête à rebrousser chemin quand soudain d’autres visiteurs émergent aussi. On est bien au B9 ! La porte s’ouvre, et c’est la plongée dans l’inconnu. Pour le visiteur, ce lieu un peu incongru, en plein chantier, impose d’emblée une perte de repères totale. D’autant plus qu’il doit se dépouiller de ses affaires, enfiler une blouse et avancer les yeux fermés ! En bref, un sas de décompression et de décontamination qui illustre la position de l’apprenant dans toute sa « vulnérabilité » en pré-acquisition d’un savoir, et « à égalité » avec ses co-apprenants ! Il se retrouve plongé au cœur d’un parcours initiatique, découvrant progressivement plusieurs salles, au sein d’un petit groupe. Il est certes dans un univers inconnu, mais il est avec ses pairs ; et la route, bien qu’incertaine, est très bien fléchée. Les 5 salles-ateliers imaginées déclinent la métaphore de la maison, de quoi lui assurer un climat de bien-être et une sensation de refuge, qui assurent de bonnes dispositions pour tester ces expériences d’apprentissage.
Explorer les différentes facettes de l’apprentissage
Les univers traversés nous ramènent aux différentes facettes d’une expérience pédagogique. Dans la première pièce, la cuisine, un jeu de cartes composé de photos nous fait réfléchir à la création et la scénarisation d’une histoire. Improviser, créer en équipe : certains ingrédients fondamentaux pour créer les recettes de pédagogies actives et alternatives.
La pièce suivante permet de tester, au cours d’une cérémonie du thé animée par un étudiant asiatique, la reproduction d’idéogrammes : patience, maitrise du geste, concentration, à travers la découverte d’une autre culture. On se retrouve dans la position de l’apprenant, à répéter encore et encore, ne pas se décourager devant la difficulté, mais aussi aller à la rencontre de la différence. Ensuite, le « bureau » est blanc du sol au plafond, ainsi que l’ensemble des éléments de mobilier et des objets. Tout est support à l’écriture de ses idées et impressions. Et pour cause, cette salle symbolise la page blanche, et l’inspiration sans limite. D’emblée, on a envie de brainstormer ! Dans la chambre, noire, sous le plafond étoilé, on ressent sécurité et intimité, comme devrait le procurer un univers d’apprentissage rassurant et ressourçant. On a envie de prendre du recul sur ses expériences, se replier dans ses profondeurs, peut-être pour mieux rebondir ou en sortir une idée géniale ? La complémentarité entre les salles devient peu à peu évidente ! Entre chaque nouvelle exploration, on revient dans la salle de départ afin de transmettre au groupe les sensations éprouvées. A la fin du parcours, un vaste salon meublé de coussins et de poufs, relaxant, permet de débriefer tous ensemble sur ce qu’on vient de traverser.
Une expérience riche d’enseignements !
Que retire-t-on de ces moments immersifs ? Une impression durable, même plusieurs semaines après ! Celle d’avoir revisité, à travers la métaphore de la maison, ce qui fait un parcours pédagogique réussi : guidé mais non forcé, permettant à chaque individu de s’exprimer dans un cadre à géométrie variable, mêlant la diversité des expériences, l’aspect créatif autant que réflexif. Philippe Mairesse, le professeur d’Audencia et référent pédagogique le résume : « Passer par l’expérience esthétique permet de questionner les certitudes du savoir et de se mettre dans une véritable posture de sujet apprenant ». C’est testé et approuvé, on apprend mieux lorsqu’une émotion y est associée, car elle ancre ce moment dans notre cerveau. L’accent mis sur l’expérience prend tout son sens. De quoi inspirer durablement les pédagogues et étudiants qui ont vécu cet instant presque mystérieux au fond des bois !