L’importance des compétences relationnelles[1] se renforce dans un monde professionnel en profonde mutation. Il devient urgent, et incontournable, de repenser les dispositifs d’acquisitions de ces dernières suivant six principes d’actions pédagogiques : la pratique, la transversalité, la diversité, la prise de recul, la déconstruction d’idées reçues et un travail systématique. Par Emmanuel Baudoin, Enseignant-Chercheur en Ressources Humaines, Directeur du pôle RH d’IMT-BS et Laurence Bouvier, Ancienne DRH d’activité chez Nokia, Directrice Opérationnelle du pôle RH d’IMT-BS
Des compétences relationnelles plébiscitées par le monde professionnel
Selon la dernière étude conduite par le HRM Digital Lab de l’Institut Mines-Télécom Business School[2], 68 % des 1004 salariés français interrogés sur un échantillon représentatif estiment que les compétences relationnelles sont importantes dans leur métier. La tendance est la même du côté des 100 décideurs interrogés en Île de France, voire plus marquée. Pour 90 % d’entre eux, ces compétences de leurs collaborateurs sont importantes. Dans les deux cas, les compétences relationnelles arrivent en tête des sept compétences étudiées.
Compétences relationnelles, de quoi parle-t-on ?
Les compétences relationnelles peuvent être définies comme un ensemble de combinaisons de connaissances (connaître les différents profils de clients, connaître les étapes à suivre pour gérer un conflit…) et savoir-faire relationnels (savoir écouter de manière active un client/collaborateur, savoir rédiger un message de recadrage…) mobilisés par un salarié pour mener à bien des interactions avec d’autres protagonistes (clients, fournisseurs, managers, collègues…) en vue d’atteindre un objectif (informer, renseigner, convaincre, vendre, faire coopérer, faire adhérer…). Les domaines de mobilisation de ces compétences relationnelles sont multiples : vente, négociation, présentation, management d’équipe, travail d’équipe, insertion dans une équipe (…).
Comment renforcer l’acquisition des compétences relationnelles dans l’enseignement supérieur ?
Le travail pédagogique sur ce thème est ancien et revêt des réalités différentes suivant les établissements. Il nous semble devoir être renforcé, et rendu plus performant, dans un monde professionnel en profonde mutation.
Pour ce faire, 6 principes d’actions pédagogiques nous semblent importants à prendre en compte :
Des actions pédagogiques moins théoriques et plus pratiques avec un maximum de mises en situation. Il est par exemple possible de transformer les enseignements, souvent très théoriques, en management d’équipe, en enseignements plus pratiques.
Des actions pédagogiques plus transversales, plus liantes et moins silotées. Les étudiants sont amenés à réaliser de nombreuses présentations au cours de leur scolarité. Il est possible de créer des exigences communes, voire de profiter de la diversité des exercices proposés, pour aider les étudiants à progresser d’un cours à un autre. Le numérique, mais pas que, peut-être un formidable liant grâce à la création de différents tutoriels et d’un système d’évaluation de l’étudiant qui le suivrait d’un cours à un autre.
Des actions pédagogiques basées sur la diversité des situations relationnelles vécues par les étudiants (projets pédagogiques naturellement, mais aussi vie associative, stages/apprentissages). Pourquoi ce qui est appris dans le cours en management d’équipe ne pourrait-il pas, et ne devrait-il pas, être utilisé dans la vie associative ?
Des actions pédagogiques permettant plus de prise de recul sur qui l’on est, ses pratiques professionnelles actuelles, ses axes de maîtrise et ses axes de développement. Les approches basées sur des questionnaires de personnalité, différentes méthodes de coaching, peuvent être, entre autres, des solutions intéressantes si elles sont bien mobilisées.
Des actions pédagogiques permettant de déconstruire des idées reçues. On peut être timide et devenir un excellent vendeur. Le management d’équipe nécessite surement des prédispositions mais il n’est pas inné (…).
Des actions pédagogiques plus systématiques. La maîtrise des compétences relationnelles est devenu un enjeu primordial. Il est urgent de raisonner de manière systématique sur les dispositifs pédagogiques à mettre en œuvre pour couvrir l’ensemble des domaines, susmentionnés, où peuvent être mobilisées les compétences relationnelles.
[1] Cette définition se base, dans sa structure, sur l’approche des compétences proposée par Le Boterf (2002) – « Développer la compétence des professionnels » – Editions d’Organisation
[2] Le HRM Digital Lab est le laboratoire d’étude de la transformation digitale du management des ressources humaines de l’Institut Mines-Télécom Business School (anciennement Télécom Ecole de Management). Il a conduit de février 2018 à mars 2019 une deuxième étude sur « les salariés français à l’ère de la transformation digitale ». Cette étude repose sur trois enquêtes distinctes :
– une enquête qualitative conduite auprès de 50 salariés et managers de tous secteurs et de toutes professions de février 2018 à mars 2019,
– une enquête quantitative, auprès d’un échantillon représentatif de 1004 salariés français, administrée par OpinionWay en juillet 2018,
– une enquête quantitative, auprès de 100 décideurs français dans des entreprises en Ile de France (PDG, DG, DAF ou DRH), administrée par Bilendi en juillet 2018.
L’étude a été conduite avec le soutien du CFA EVE et de l’ANDRH Essonne. Elle est disponible sur le site de l’Institut Mines-Télécom Business School : https://www.imt-bs.eu/