Course aux diplômes : pourquoi il ne sert à rien d’en faire trop…

Dans la course aux diplômes, les gagnants ne sont pas forcément ceux que l’on croit. Car sur le marché du travail, certains profils Bac +5 ont autant, sinon plus, de difficultés que des profils moins diplômés, à trouver un emploi. Des études longues n’offrent pas automatiquement, loin s’en faut, la garantie d’une recherche d’emploi plus aisée ou d’une rémunération plus élevée. Il est donc temps de tordre le cou aux idées reçues qui poussent vers le « toujours plus de diplômes » !

 

Un problème d’inadéquation entre les compétences des jeunes diplômés et les besoins des entreprises
Pragmatiques, les entreprises cherchent certes un potentiel, mais avant tout – surtout en période de crise – des compétences en adéquation avec leurs besoins, c’est-à-dire des collaborateurs opérationnels rapidement. Nous souffrons malheureusement en France d’une inadéquation trop importante entre les compétences et attentes des jeunes diplômés avec les besoins et exigences des entreprises. Cet écart est, à mon sens, un des premiers facteurs expliquant le taux de chômage extrêmement fort chez les jeunes. Autre conséquence notable : de nombreux diplômés évoluent à un poste ne correspondant pas à leur qualification et situé en deçà de leur compétence. C’est le cas de 45% des Bac +4 selon l’Apec. La presse s’est ainsi récemment fait l’écho du cas d’une jeune diplômée d’un master 2 en biotechnologie et thérapeutique, qui, sans emploi, a rejoint l’Insee en tant qu’adjointe administratif suite à un concours de la fonction publique de catégorie C. Autre exemple, vécu au sein du cabinet de recrutement que je dirige: une jeune diplômée Bac +5 en communication à qui je n’ai pu proposer qu’un poste d’hôtesse d’accueil… Pour celles et ceux qui découvrent sur le tard, après un cursus long et exigeant, que leurs formations et compétences ne correspondent pas réellement à la demande des entreprises, la déception est de taille et parfois éprouvante à gérer psychologiquement.

 

Les Bac +2 plus recherchés que les Bac +5
Dans ce contexte, les Bac +2 tirent leur épingle du jeu, suscitant l’intérêt d’employeurs sensibles au savoir-faire et à l’affinité du candidat avec le monde de l’entreprise. D’autant plus que de nombreux métiers nécessitant une formation Bac +2 sont en pénurie : la vente et le marketing commercial, l’informatique, l’assistanat de direction bilingue, la comptabilité ainsi que les métiers du secteur paramédical.  Selon une étude réalisée par l’Afij, l’Association pour la formation et l’emploi des jeunes diplômés,45 % des employeurs souhaitent recruter uniquement des Bac + 2/3 et 12 % uniquement des Bac +5. L’étude révèle aussi que les Bac +4 sont de moins en moins recherchés. Il apparaît donc clairement qu’une stratégie d’accumulation de diplômes n’est pas forcément pertinente pour accéder à l’emploi.

 

Reconnecter notre système de formation au monde de l’entreprise
Au regard de ces éléments, il est urgent de reconnecter notre système de formation (et ses services d’orientation) au monde de l’entreprise. Un bon pas a été fait en ce sens avec la création des licences et des masters professionnels à l’université. Dans le même registre, une formation en alternance sera très souvent privilégiée à une formation théorique poussée. Pour autant, il n’est évidemment pas question de jeter aux orties les formations en lettres, communication, sociologie, etc. Mais il faut malheureusement reconnaître que ces filières souffrent d’une offre de candidats plus importante que l’offre d’emplois. Je conseille donc aux jeunes étudiants de faire preuve de réalisme et de se préoccuper en priorité des débouchés offerts par le diplôme visé.

 

Alexandre PHAM. Président de Lynx RH, Réseau de recrutement en franchise. Diplômé de l’Ecole Polytechnique et titulaire d’un MBA de la Harvard Business School. Membre du Club du XXIème siècle, qui vise à promouvoir la diversité en France. Membre du Conseil d’administration du Harvard Business School Club de France.