Alors que l’attention des technophiles de la planète est braquée sur la Silicon Valley, il se pourrait bien que les prochains Facebook ou Google surgissent d’un paradis technologique aussi inattendu que Bangalore en Inde. A côté de cela, dans les rues, des entrepreneurs naissent tous les jours et débordent de créativité.
Il y a quelques mois, la société Startup Compass a récolté des données auprès de 50 000 entrepreneurs partout dans le monde. Analysées par Telefonica Digital, ces données ont révélé le top 20 des écosystèmes pour startups sur la planète. S’il ne faisait aucun doute que la Silicon Valley allait arriver en tête grâce à son incroyable accès aux financements et sa moyenne de 9,95 heures de travail par jour, le classement a tout de même révélé quelques surprises : Bangalore, ville du sud de l’Inde et capitale de l’Etat du Karnataka, fait son entrée dans le top 20. Les employés y travaillent en moyenne 1h de plus par jour que leurs homologues de la Silicon Valley. Cependant, l’accès aux investissements y est logiquement moins bon et l’emploi des femmes y demeure très faible. L’une des startups à succès de Bangalore fut Zoho, une suite d’applications de bureautique basée sur le cloud computing qui a, depuis lors, délogé son quartier général en Californie. Cependant, il existe une autre facette de l’entrepreneuriat en Inde. Pour certains, être entrepreneur, c’est vivre ou survivre. Ela R. Bhatt, une septuagénaire indienne, a été couronnée en 2010 « entrepreneure sociale pour le monde » par le World Entrepreneurship Forum. Elle a fondé une organisation venant en aide à 1,2 million de travailleuses autonomes dans son pays. On la surnomme la « gentille révolutionnaire ». Son organisation de défense des travailleuses autonomes appelée Self-Employed Women’s Association a été crée en 1972 afin de regrouper une centaine d’organisation différentes dont une coopérative de microcrédit qui compte plus d’un million de membres dans une dizaine d’Etats du pays. Ela R. Bhatt a voulu défendre ces travailleuses autonomes que l’on trouve partout en Inde. Elles sont ouvrières, tisseuses, vendeuse, ramasseuses d’ordures ou tresseuses de paniers et ont construit leur entreprise à elles seules. Pour autant, la faim et le dénuement les guettent : l’échec n’est pas une option. C’est ici qu’intervient le microcrédit qui permet à ces femmes d’améliorer leur compétitivité en ayant accès à de la formation de base. Dans un tout autre style, l’Inde a vu naître un entrepreneur peu ordinaire. Arunachalam Muruganantham a révolutionné la vie de plusieurs centaines de milliers de femmes. Il est considéré comme le « Roi du Tampon ». En réalité, il a élaboré des serviettes hygiéniques low-cost d’une manière assez peu commune. En effet, en Inde, ce genre de produit n’est pas à la portée de la majorité des citoyennes qui utilisent des chiffons ramassés par terre. Lorsque notre entrepreneur à découvert cela, il a créé une machine qui produisait 120 serviettes par heures en cinq étapes simples, le tout pour un budget de 75 000 roupies, soit 1 000 euros. Il a tellement été emballé par son idée révolutionnaire qu’il a testé toutes les étapes de la conception. Pendant 4 ans, il a porté ses propres serviettes afin de vérifier leur ergonomie et utilisait du sang de chèvrepour tester leur absorption. Son génie ne s’arrête pas là, il va même jusqu’à se faire passer pour un investisseur et appelle des fabricants américains pour leur demander des informations sur la matière première qui se révéla être de la fibre végétale et non du coton comme il le pensait. Finalement, ses machines ont conquis l’Inde et, en 2009, Arunachalam Muruganantham s’est vu remettre le prix de l’innovation par la présidente Pratbha Patil en personne. Toutes ces histoires montrent à quel point l’Inde est un pays où il règne encore de nombreuses différences mais également d’innombrables opportunités. A force de courage et de persévérance, on finit toujours par réussir ce que l’on entreprend.
Valentin Haarscher (promo 2014)