« Pour relever les défis du XXIe siècle, nous avons besoin de former davantage de citoyens et de travailleurs. »

le grand entretien : Président Bertrand Monthubert, Université Toulouse III – Paul Sabatier

 

Bertrand Monthubert
Bertrand Monthubert

Fondements
Quelle est la philosophie qui sous-tend les actions de l’Université Toulouse 3 ?
Notre philosophie générale est celle d’une université qui remplit ses missions de service public. Nos actions reposent sur la création de savoirs par la recherche, sur la transmission de savoirs en formation initiale et tout au long de la vie, ainsi que sur la diffusion des savoirs dans la société. En effet, nous considérons que le savoir est un besoin essentiel et croissant de la société pour mieux comprendre le monde qui nous entoure, qu’il s’agisse, pour prendre quelques exemples, de la question énergétique, du changement climatique ou de la curiosité suscitée par l’existence potentielle de la vie sur Mars. À ce propos, je tiens à préciser qu’un des instruments de la mission Curiosity, menée par la NASA, a été conçu et fabriqué dans un de nos laboratoires qui maintenant le pilote depuis Toulouse.

 

Pédagogie et recherche
Le développement des enseignements à distance est-il à l’ordre du jour ?
Si nous utilisons l’enseignement à distance sous des formes variées (diffusion de supports de cours, plateformes d’exercices avec auto-évaluation, etc.), nous réfléchissons également à la problématique concernant les étudiants salariés et nos filières spécialisées pour les sportifs de haut niveau. Il s’agit de remplacer les cours auxquels ils ne peuvent pas assister par d’autres formes pédagogiques sans pour autant supprimer tous les cours en présentiel, cette dimension de proximité humaine étant pédagogiquement incontournable et nécessaire à la réussite universitaire.

L’investissement pour la recherche est-il un axe prioritaire ?
L’investissement dans la recherche constitue un de nos axes stratégiques majeurs. Nous travaillons activement sur la coordination des financements de la recherche afin de libérer du temps pour les enseignantschercheurs qui, pour trouver des budgets, sont contraints à un travail administratif improductif, long et fastidieux qui les détourne souvent de leur mission principale. Notre présence sur un éventail de secteurs très large, allant des domaines fondamentaux aux technologies les plus poussées, constitue une force par rapport à d’autres établissements. Je tiens à préciser que nous sommes parmi les leaders mondiaux en recherche dans plusieurs domaines comme celui du stockage de l’énergie.

 

Dimension professionnelle
Quels sont les rapports que vous entretenez avec les entreprises (chaires, forums, stages, tutorat, intervenants professionnels…) ?
Si plusieurs entreprises comme Thalès ou Airbus sont membres du Conseil d’administration de l’Université Toulouse III – Paul Sabatier, nos relations avec les entreprises prennent différentes formes (contrats de recherche, stages et formation continue). Nos contrats de recherche avec les entreprises portent sur plusieurs dizaines de millions d’euros. Dans le cadre de l’IDEX de Toulouse, j’ai oeuvré au regroupement des écoles d’ingénieurs en matière d’ingénierie en créant la structure « Toulouse Ingénierie ». Nous renforçons ainsi notre présence dans le domaine de l’ingénierie avec comme objectif stratégique commun de passer de 2 300 à 3 000 diplômés en Midi-Pyrénées. Enfin, si nous développons les Cursus Masters/Ingénieur, nous venons également de voter la création d’une école d’ingénieurs interne à l’UPS qui prendra le nom d’UPSSITECH.

L’entrepreneuriat est-il intégré à vos formations ?
Nous favorisons l’entrepreneuriat par le biais de cours spécialisés, tout en facilitant la création d’entreprise à l’aide d’un incubateur commun aux trois universités de Toulouse. Chaque année, nous avons des lauréats au concours des étudiants créateurs d’entreprises.

 

Ouvertures
De quelle manière, votre université s’ouvre-t-elle à la société ?
Nous travaillons en lien avec des associations pour diffuser les savoirs en participant, par exemple, au lancement du minibus « Les petits débrouillards », sous le parrainage de l’émission C’est pas sorcier. Nous accueillons parfois des événements qui sont, a priori, extérieurs car nous sommes soucieux de nous ouvrir à la société. Nous organisons des initiatives pour les scolaires : rallyes scientifiques, conférences, journées à thème, stages hippocampe de trois jours pour les classes de lycée avec des activités mathématiques encadrées par des doctorants. Les lycéens découvrent ainsi les sciences sous un autre angle. Nous disposons d’une Maison pour recherche et l’Enseignement des Sciences destiné à travailler avec les enseignants du scolaire.

Par quoi se traduisent vos relations à l’international ?
En dehors de centaines d’accords de coopération avec des établissements étrangers, notre ouverture à l’international se manifeste par une augmentation de la mobilité des étudiants, l’échange de professeurs avec des invités de longue durée (3 mois par an) et le développement des laboratoires internationaux. Si nous venons, avec le PRES Université de Toulouse, d’ouvrir un bureau en Chine, nous prévoyons d’en ouvrir un en Amérique Latine (Brésil) afin d’accompagner les pays qui se développent à grande vitesse.

 

Problématiques
La faiblesse de l’attractivité des filières scientifiques vous préoccupe-t-elle ?
Aujourd’hui, on assiste à une récession étudiante, le pourcentage de bacheliers qui poursuivent des études supérieures étant en baisse depuis 2005. Ce phénomène me préoccupe particulièrement dans les filières scientifiques car, dans un certain nombre de secteurs comme les mathématiques, nous constatons un déficit d’étudiants par rapport aux besoins de la société. Partant de ce constat, nous mettons en place une stratégie afin de renverser la tendance. Parallèlement, nous nous employons à démontrer que les filières scientifiques sont porteuses d’emploi. Statistiques à l’appui, l’insertion professionnelle est bien meilleure dans ces disciplines que dans certaines filières pourtant très prisées des étudiants. Nous souhaitons former un plus grand nombre d’étudiants, en particulier dans les disciplines désertées comme les sciences fondamentales. Pour réaliser cet objectif, nous nous appuyons sur des formations adossées à la recherche. Nous devons mettre en avant un certain nombre de filières et développer notre attractivité avec des opérations de communication assorties d’un discours simple : « En entrant dans notre université, vous avez l’opportunité d’assister à des cours dispensés par les meilleurs chercheurs au monde ! »

 

Comment concevez-vous la création d’un campus intelligent pour l’UPS ?
Nous nous sommes penchés sur la question de la montée en gamme de notre patrimoine immobilier. Notre ambition consiste à faire de notre campus un lieu d’innovation, de durabilité et d’intelligence. Le mode de financement du Plan Campus a été modifié car, en assurant nous-mêmes la maîtrise de l’ouvrage, nous avons la possibilité de créer des programmes qui vont permettre l’innovation et rendre nos bâtiments eux-mêmes innovants afin qu’ils deviennent les vitrines de notre savoir. Pour ce faire, j’ai créé une commission scientifique qui regroupe les chercheurs afin de suivre les opérations de construction et de rénovation tout en faisant des propositions novatrices.

 

Patrick Simon