Khaled Saadaoui
Khaled Saadaoui

Les femmes dans la finance: le plafond de verre? – Normandie Junior Conseil

Connue pour être un bastion masculin, la finance reste dominée par les hommes, laissant peu de place aux femmes dont la présence se limite souvent aux postes de middle-back office. Le secteur de banque-assurance n’est pas épargné par les préjugés sexistes et les stéréotypes dont souffrent les femmes au travail de manière générale et l’on y observe une certaine inégalité à leur égard en termes d’accompagnement et de suivi de carrière, d’opportunités d’évolution et de traitement salarial.

 

 

Khaled Saadaoui
Khaled Saadaoui, Enseignant-chercheur en finance et RSE, EM Normandie

Sur le plan légal, il n’existe pourtant aucune discrimination à l’embauche puisque la loi interdit de mentionner le sexe dans les offres d’emploi et garantit le même salaire, du moins au départ. Aussi, l’association française des banques avait signé en novembre 2006 les accords relatifs à l’égalité professionnelle dans le but de réévaluer les salaires des femmes et changer les comportements.

À en croire les enquêtes effectuées sur le sujet, une grande majorité de dirigeants trouve que le nombre des femmes dans les départements financiers n’a pas augmenté et que les hommes sont mieux payés que les femmes pour un poste équivalent. Cet écart s’élèverait à une moyenne de 55 % voire 79 % si l’on tient compte des bonus . Malgré une prise de conscience croissante de la part de tous les acteurs concernant leur difficulté à s’imposer, la situation des femmes n’évolue pas puisque les équipes dirigeantes restent majoritairement masculines.Les femmes déplorent à ce titre la difficulté d’accès aux réseaux informels des décideurs, le manque d’opportunités de haut niveau et l’absence de mentors. Elles expliquent cette situation par le manque de parité au sein de la direction générale et par l’absence de femmes dans les postes sensibles et stratégiques de la finance. Les femmes ont du mal à trouver des « Role Models » alors que les hommes parviennent plus facilement à identifier un mentor au sein de l’entreprise qui peut les aider dans l’évolution de leur carrière.

Face à cette situation, les femmes travaillant dans le secteur de la finance ont dû joindre leurs efforts pour créer des associations où elles peuvent se rencontrer et discuter de leur profession et des objectifs de leurs carrières et échanger sur les meilleures pratiques face aux stéréotypes et préjugés sexistes. Outre-Atlantique, l’on peut citer deux grandes associations largement reconnues à savoir la Financial Women’s Association et l’American Society of Women Accountants. Ces associations fournissent un soutien personnel et professionnel aux femmes du secteur, un réseau de contacts locaux et nationaux, des possibilités de réinstallation avec un réseau de référence d’emplois et des possibilités de leadership ainsi que le développement des compétences en gestion et en management.
En France, une initiative similaire, Financi’Elle, a vu le jour. C’est une fédération de réseaux de femmes cadres de la finance (secteur Banque-Assurance) créée en janvier 2011 à l’initiative de l’association BNP Paribas Mix City et de Féminin by Société Générale. Elle regroupe les réseaux formels ou informels, des femmes  de 8 secteurs (Axa, Barclays, BPCE, BNP Paribas, Caisse des dépôts, Crédit agricole CIB, HSBC et Société Générale) et compte déjà plus de 1 500 adhérentes sur les 120 000 cadres recensées du secteur.
Aujourd’hui, certes la loi ne peut pas changer les mentalités, mais l’État doit intervenir de manière plus volontariste en imposant une égalité de traitement au niveau des salaires pour le même poste. Par ailleurs, les évolutions sociales et législatives devraient accompagner les femmes et leur permettre de concilier plus facilement vie professionnelle et vie familiale. Toutes ces mesures seraient toutefois insuffisantes si les femmes ne font pas bouger les lignes et les mentalités en renforçant leur travail associatif et en collaborant davantage en réseaux. Elles doivent également saisir les opportunités offertes en périodes de crise, très souvent propices au changement, pour percer et s’imposer d’autant plus qu’elles peuvent valoriser leur statut de femme dans un contexte de plus en plus favorable à la diversité et à la mixité.

 

Khaled Saadaoui, enseignant-chercheur en finance et RSE, École de Management de Normandie