« Lucri bonus odor ex qualibet » disait Vespasien, l’odeur du gain est bonne quelle qu’en soit l’origine. A celui là même qui prétendait que « l’argent n’a pas d’odeur », Henri Jeanson répondit : « ce n’est pas que l’argent n’ait pas d’odeur, c’est l’homme qui n’a pas d’odorat ». Hybris, extravagance et dérives imputées au monde de la finance en ont fait « l’ennemi sans visage » des hautes sphères de l’Etat. Ne peut on donc pas envisager une finance plus éthique ?
Face à ces problèmes, beaucoup se sont engagés à créer des outils financiers se distinguant de la finance spéculative afin de répondre aux enjeux de l’économie sociale, fluidifier les échanges et financer des projets d’innovations sociales et solidaires tout en s’assurant de la transparence des investissements.
La finance solidaire : un principe simple
Le principe est simple : des financeurs solidaires mettent en relation des épargnants avec des porteurs de projets à forte utilité sociale. Ces financeurs peuvent être des établissements financiers qui proposent des placements solidaires et qui peuvent donc amasser l’épargne des déposants ; on parle d’épargne solidaire. L’épargne solidaire présentait en 2010 un volume de 3,15 milliards d’euros, cependant, une partie seulement est consacrée à la finance solidaire. En effet, le système financier oblige les investisseurs à reverser une part de l’épargne solidaire à des placements plus rentables et plus liquides. Qui sont donc ces supers héros de la finance ?
« Le besoin nous unit, l’intérêt nous divise. C’est du genre humain la devise »
Un héros aux multiples visages
Ces financeurs assurent surtout un travail d’accompagnement approfondi des porteurs de projet. Pour cela, ont été mis en place plusieurs outils financiers alternatifs. Des sociétés comme la NEF se revendiquent comme étant des banques éthiques, c’est à dire redirigeant l’épargne disponible vers des projets sociaux. Ainsi, des dispositifs régionaux permettent de minimiser les risques tandis que la finance devient un véritable lien social. Ainsi est né le phénomène des CIGALES (Club d’Investisseurs pour une Gestion Alternative et Locale de l’Epargne Solidaire). Il s’agit d’un groupe (jusqu’à 15 personnes) qui décide d’investir une partie de son épargne dans un projet choisi collectivement. Ces cigaliers offrent aussi un suivi personnalisé du projet comme le montage d’un business plan ou autres…
La microfinance : il s’agit de l’offre de services financiers aux plus pauvres. L’un des problèmes posés aux pays pauvres est qu’une grande partie de la richesse (maisons, petits commerce) sont sans droits de propriété et donc sans représentation légale. Or aucune banque ne prête à quelqu’un qui n’a pas de propriété. C’est pour cette raison que d’autres institutions sont nées à l’initiative de Yunus fondées sur le micro-crédit. Il subsiste toutefois des zones d’incertitude à toutes ces démarches : la proximité systématique entre épargnants et créateur de projets ne peut permettre de générer et lever autant de fonds que la finance classique. Néanmoins, ces outils permettant une autre pratique de la finance ne méritent ils pas de vrais moyens à la mesure de leur impact social ?
La prochaine étape :
certains essayent de pousser ces concepts encore plus loin en soumettant l’idée de monnaies sociales
et complémentaires. C’est ainsi que le Fonds Social Européen a lancé en 2004 les cartes Sol.
Par Mohamed Alami Chehboune,
Délit d’Initié à Transaction Edhec
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