A l’occasion des 50 ans de l’association nationale des directeurs financiers et de contrôle de gestion, nous avons rencontré Thierry Luthi, son président. Il a partagé son regard sur l’évolution des fonctions financières, leur rôle dans la gestion et le développement des entreprises.
Qui sont les 3 200 membres de la DFCG ?
Nos membres sont à 90 % des professionnels de la finance et de la gestion. Parmi eux, environ 80 % sont des directeurs ou responsables financiers, et 20 % des responsables du contrôle de gestion. Les 10 % restants sont des proches de notre écosystème universitaires, professeurs, conseils, partenaires. 50 % de nos membres sont établis en régions, 50 % en Ile-de- France. La DFCG cible logiquement les sociétés susceptibles d’avoir une fonction financière de par leur taille et leurs enjeux. On estime que cela représente 35 000 entreprises et 2 000 groupes en France.
Créer du lien et des échanges
Vous avez un club dédié aux plus jeunes – Club DFCG Avenir – pourquoi ?
L’objectif est de dire aux plus jeunes qu’ils ont leur espace pour échanger, où ils peuvent s’exprimer librement (notamment en ayant pas leur supérieur hiérarchique dans le même club), aborder les sujets les concernant spécifiquement. Ils peuvent y avoir une convivialité différente, reprendre des fondamentaux si nécessaire, parler débuts et développement de carrière, bénéficier de coaching professionnel.
Quel est le sens d’un réseau de professionnels de la finance ?
C’est un atout d’appartenir à un réseau, d’autant plus quand la situation économique se tend. Il est à mes yeux important d’échanger entre confrères sur nos connaissances et pratiques professionnelles, l’évolution de nos métiers, partager nos expériences, et bien sûr tisser des relations qui peuvent être utiles pour poursuivre sa carrière au fil des aléas. Un réseau sert aussi à sortir de son quotidien, enrichit la perception de son métier, de son environnement.
Développer connaissances et capacité d’adaptation
Quelles sont les préoccupations majeures de vos membres ?
Elles sont évidemment liées aux évolutions de notre environnement et de nos professions.
– Souvent nos membres sont aussi trésoriers, responsables gestion de leur entreprise. Ils sont donc concernés par la mise en place des prévisions, la gestion des risques dans un environnement économique volatile.
– Ils sont aussi désireux de participer de plus en plus à la stratégie d’entreprise, au sens de son exécution. L’objectif étant de contribuer au développement de l’activité. Le thème de notre dernier Financium était d’ailleurs : à la recherche de la croissance perdue. Au sein d’écosystèmes complexes, il faut imaginer des modèles différentiants pour le développement à l’international.
– Ils souhaitent aussi être en mesure d’aborder de la manière la plus efficace les questions complexes et foisonnantes d’une fiscalité en évolution permanente, certaines nouvelles mesures étant même rétroactives.
Autour de quelles activités se retrouve la communauté ?
Des commissions travaillent sur des thèmes comme le contrôle de gestion, les normes comptables, la corporate finance, les modes de financement, la finance dans les sociétés cotées. Nous avons aussi des groupes sectoriels et régionaux qui organisent 400 réunions par an. Nous éditons une revue mensuelle Finance et gestion, organisons un colloque annuel Financium, remettons le Trophée du meilleur directeur financier, nous avons aussi des publications (travaux, communications, livres blancs, collection DFCG chez Eyrolles). Nous avons ainsi édité il y a deux ans un livre d’experts intitulé : 70 recommandations pour améliorer la performance des entreprises. Nous sortons à l’occasion de nos 50 ans un nouvel ouvrage collectif sur les enjeux économiques et financiers de notre société, ses évolutions depuis 50 ans. Le 26 juin nous célèbrerons officiellement notre anniversaire au Musée du Quai Branly.
Informations à foison et contrôle du risque
Comment a évolué la fonction finance depuis 50 ans ?
– Les documents de création de la DFCG en 1964 évoquent déjà la place centrale que prendrait le financier dans la compréhension de l’évolution des entreprises.
– Les méthodologies de contrôle de gestion sont venues des Etats-Unis dans les années 80. Avec des tableaux de bord, des balance score cards. Ceci dans une logique de prévision, de technique budgétaire à partir de données chiffrées.
– La révolution est la mise à disposition depuis les années 2000 de données de manière massive et croissante. Le capital d’information est considérable, l’enjeu étant son utilisation et en tirer la quintessence. La mission des financiers est de fournir les informations permettant aux responsables métiers de prendre la bonne décision. La microinformatique dans les années 80 a engagé ce processus, qui s’est accéléré avec les progiciels de gestion dans les années 90 puis les réseaux à partir de 2000. Le data mining et la business intelligence sont ainsi devenus stratégiques.
– Aujourd’hui, on assiste à un effacement du facteur temps. Process, outils, réseaux et technologies sont au service de la bonne organisation et gestion des comptes de l’entreprise qui, grâce au reporting les suit en temps réel (fast closing, rolling budgétaire, forecast). Cela permet d’accélérer les décisions, d’être très réactif.
– Autre évolution : les entreprises sont amenées à accélérer leur développement dans un monde instable et ouvert. Cela intensifie la nécessité de mesurer le risque au travers de plans de contrôle internes, processus de délégation et d’organisation. Les règles prudentielles ont été rénovées mais la situation reste complexe.
Qu’en est -il de l’évolution des fonctions financières ?
Les nouveaux enjeux induisent donc une montée des fonctions de gestion et de contrôle du risque. Je m’interroge par ailleurs sur l’avenir de deux filières distinctes en contrôle de gestion et en comptabilité. Des outils et produits de plus en plus sophistiqués font converger ces fonctions. Je crois que la transversalité est de plus en plus nécessaire pour produire des chiffres sincères. Parallèlement, les fonctions financières deviennent de plus en plus techniques pour répondre aux enjeux d’un environnement très complexe. Une entreprise d’une certaine taille a besoin de spécialistes dans chaque domaine.
Les qualités clés du financier pour
Thierry Luthi
– Valeurs d’éthique, être au service de la transparence, de l’exactitude, de l’accuracy.
– Maîtrise de la complexité.
– Respect des calendriers.
– Aimer les chiffres, les partager, les expliquer, être pédagogue.
Ce qui lui plait le plus dans la fonction
– Avoir une vision à 360° de l’entreprise, de ses enjeux et activités.
– L’imagination nécessaire pour anticiper les questions que l’on va vous poser et préparer ses réponses.
– Le fait qu’à un moment donné tout se traduit par des chiffres dans une entreprise.
– Le travail d’anticipation, et de faire le lien entre tous les paramètres.
La DFCG en quelques chiffres
Création en 1964
3 200 membres responsables financiers
14 groupes régionau x
400 manifestations par an
Organisation du colloque Financium
Remise du Trophée finance et gestion
http://www.dfcg.com/ (portail) – http://www.dfcg.fr/ (site)
A. D-F