Bertrand David, enseignant-chercheur en traitement du signal et directeur de la formation initiale de Télécom ParisTech nous invite à partager son quotidien. Mû par sa passion de la pédagogie, il aime engager voire surprendre ses étudiants, et sait inversement se laisser surprendre par eux ! Il décrit une école familiale et offrant toute liberté pour innover.
Quelle ambiance à Télécom ParisTech ?
J’aime l’esprit qui irrigue l’établissement. J’ai de nombreux collègues très créatifs et passionnés qui innovent dans leur pratique et pédagogie. Etre entouré de gens intelligents, qui ont des idées parfois iconoclastes, n’hésitent pas à aborder des problèmes complexes, c’est très stimulant. Et pour cela nous obtenons un vrai soutien de l’institution. Notre directeur est très partisan de cela et nous offre la liberté d’expérimenter et proposer de nouveaux concepts. C’est aussi une structure très familiale avec 170 élèves en 1ère année, 170 personnels administratifs et 169 enseignants-chercheurs.
Enseignant-chercheur depuis 15 ans, quelle est votre approche pédagogique ?
J’ai toujours été porté sur l’innovation. Au-delà de mon intérêt personnel, je constate comme tout le monde une évolution de la manière d’apprendre et de faire chez nos élèves. Il est donc un impératif pour nous enseignants, et pour la direction de la formation, de penser de nouveaux formats. Plus largement, les interactions avec les enseignants et directeurs de formation de nos réseaux de NewUni, de ParisTech et de l’IMT sont des sources d’inspiration et d’émulation pour progresser.
Qu’aimez-vous particulièrement en matière de pédagogie ?
J’adore engager et passionner mes élèves ! Pour cela j’utilise des problèmes et les conduit à apprendre (les fondements théoriques) en les résolvant par eux-mêmes. Par exemple pour le cours en e-signal je les fais travailler sur l’inférence de théorème, observer l’inférence entre les nombres, chercher, s’interroger, hésiter, essayer, échouer, proposer des scenarii. Ce type de pédagogie crée une dynamique intellectuelle intéressante. Je suis très heureux de les voir apprendre à travailler en groupe, progresser d’une séance sur l‘autre. L’enseignant devient ainsi un accompagnateur, un guide, un médiateur. C’est la posture adéquate à mon sens pour former des « solutionneurs de problèmes ».
Pourquoi former ce type d’ingénieurs pour demain ?
Ils doivent posséder cet esprit avec l’avènement foudroyant de la donnée, des réseaux de neurones profonds. Tout va si vite qu’il faut qu’ils sachent se mettre à jour, se poser des questions, et solutionner des problèmes. Nos étudiants sont très forts ! Ils vont à la fois très vite et ont beaucoup de subtilité dans leur approche. C’est une chance de faire face à un tel auditoire, et il faut accepter parfois de ne pas avoir réponse à tout.
Vous proposez un exercice assez original, la lettre en polonais, de quoi s’agit-il ?
Je leur soumets une lettre en polonais donc, et leur demande de travailler en groupe pour en comprendre le sens général. Mes élèves ne parlant pas polonais bien entendu. Et pourtant ils réussirent à décoder un texte a priori incompréhensible, from scratch ! Cela montre la force du groupe, d’être à plusieurs, de discuter, de progresser dans l’interaction.
Votre 2è « produit pédagogique phare », c’est le projet ?
Le projet permet de travailler par pédagogie inversée et collaborative. C’est le cas en 1ère année avec le PACT – Projet d’apprentissage collaboratif thématique. Les élèves sont initiés au mode collaboratif, à la complexité d’un problème concret et découvrent par ce biais les domaines de recherche de l’école. En 3ème année, le PRIM – Projet de recherche et d’innovation Master – les conduit à prendre des risques, à exprimer ce « qu’ils ont en eux » en travaillant sur une problématique d’innovation d’une entreprise ou d’un laboratoire.
Pour l’enseignant, il faut accepter de « lâcher quelque chose ». Lorsqu’on adore enseigner au sens classique, organiser la connaissance, ce n’est pas toujours facile. Car la médiation met en scène la connaissance. Il faut se préparer aux à-côtés et accepter de ne pas être dans le contrôle absolu du cours, de ne pas avoir ce plaisir de la maîtrise de son jeu. Un projet, c’est un apprentissage collectif, sur un sujet souvent créé par les élèves. Notre rôle devient de les accompagner pour faire quelque chose de plus, apprendre à gérer le groupe.
Parlez nous de votre tableau ? 🙂
J’adore avoir un beau tableau ! Bien ordonné, avec des encadrés. Cela me vient d’un professeur d’électrotechnique en leçon d’agrégation. Il était d’une sévérité terrible. Avec lui l’objectif était de tenir plus de 5 minutes au tableau…
Vous avez aussi votre technique pour échauffer les étudiants en début de cours ?
Je leur fais des quizz minute de suivi, c’est ce que j’appelle le footing, l’assouplissement de la mémoire. 5 questions, puis nous discutons des solutions dans la foulée. J’ai environ 1 500 questions en stock…
« Télécom ParisTech a une vocation d’universalité en tant que leader du numérique »